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CHAPITRE XI
LA FEODALITE EN VENDEE, DE 877A 1180
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La féodalité en Vendée de 877 à 1180.
Relèvement des églises, - Châteaux féodaux.
Les pirates de Noirmoutier vers 1060.
Obligations militaires des bas-poitevins aux X° et XI° siècles.
Les premiers châteaux-forts de Vendée et les églises fortifiées
(Moricq, Beauvoir, La Garnache, Talmont, Fontenay, Maillezais, Apremont, etc.)
Les châteaux-forts bas-poitevins aux XI°, XII° et XIII° siècles.
Château de Pouzauges.
La trahison du seigneur de Talmont (1138), Louis VII devant Talmont.
Le moyen-âge, ses faiblesses et ses grandeurs.
L’église féodale en Vendée.
L’an mille.
Abbayes de la Vendée. Saint Jean d’Orbestier.
Sainte-Croix de Talmont.
Bellenoue.
Nieuil-sur-l’Autise.
Moreilles.
Bois-Grolland.
Trizay.
Breuil-Herbaud.
L’Ile Chauvet.
La Grainetière.
La Blanche.
Lieu-Dieu en Jard.
Angles.
Les Fontenelles.
Influence des croisades sur les fondations monastiques, - l’église
adopte les institutions et les Mœurs féodales. Etablissement des avoués.
Développement des églises de campagne.
La Roche-sur-Yon et le Poiré-sur-Vie, - Droits du prieur de Saint-Lienne-Ecoles.
Usage des bancs dans les églises. - Puissance des ordres religieux en
Vendée au XII°siècle.
Anciens prieurés (Mouchamps, Fontaines, Cheffois, Courdault, Lande-Beauchêne,
Saint-Laurent-
Sur-Sèvre, Sigournais, Puybelliard, Aizenay, Saint-Florent-des-Bois,
etc.)
Caractère malheureux de cette époque au point
de vue moral, - Création du sacré collège, - la Papauté.
Puissance de la Papauté.
Eglises des XI° et XII° siècles, Saint-Nicolas
de Brem (cryptes de Fontenay, Tiffauges, Curzon, Les Essarts), Nieuil-sur-l’Autise,
Vouvent, Foussais, Maillé, Fontaines, Belleville,
Maillezais, Chalais, Benet, La Chaize-Giraud, Les Moutiers-les-Mauxfaits, Mareuil-sur-Lay,
Luçon, La Grainetière.
Caractères des vieilles églises de Vendée.
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LA FÉODALITÉ EN VENDÉE DE 877 à 1180
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A partir du règne de Charles le Chauve, il n'y eut plus d'intérêts
généraux, plus de gouvernement national. L'assemblée
de Kersi-sur-Oise, ayant, en 877, rendu héréditaires des
fiefs concédés jusque là à titre temporaire,
la puissance des rois devint illusoire.
Comme on voyait briller partout le fer destructeur des Normands, et
qu'il n'existait plus ni force centrale, ni corps d'armée qui
pût arrêter, ce torrent, tout propriétaire fut forcé
de veiller à sa propre défense, afin de . ne chercher
son salut que, dans son courage (1).
Le Poitou surtout, fut ainsi pendant plus d'un siècle, abandonné
à ses propres forces ; les populations s'habituèrent alors
à ne plus compter que sur leurs ducs et comtes, devenus héréditaires
et véritables souverains du pays. Chaque seigneur bravant utilement
les défenses faites par Charles le Chauve, fortifia son château,
et mit sa famille et ses biens à l'abri de la surprise et du
péril.
La menace, continuelle du danger précipita surtout le mouvement
de concentration de la propriété foncière (2),
et rendit plus nécessaires les liens qui s'établirent
entre la faiblesse et la force pour la défense commune.
L'excès des malheurs et des périls ramena tous les intérêts
les plus opposés au soin du salut commun, et la plus impérieuse
des lois, la nécessité, fit alors naître de ce chaos
un nouvel ordre de choses qui est devenu la féodalité.
Nous dirons peu de choses de ce régime, qui en Vendée
fut constitué d'une manière plus forte et plus indépendante
rendit de grands services à son origine, et donna lieu plus tard
à des abus de tous genres.
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NOTES:
(1) On attribue assez généralement à
ces premières résistances de la noblesse contre le souverain,
l'origine de cette chevalerie errante (A) qui a ses pages si pittoresques
dans les murs du moyen âge. Les manoirs étaient souvent
dés refuges, où un chevalier admettait à une hospitalité
généreuse, le voyageur qui regagnait sa patrie, le pèlerin,
le, marchand lui-méme.
(A) La chevalerie était proprement, de nom comme
de fait, la milice d'élite de la France dont il est déjà
fait mention dans un des capitulaires de Charlemagne (807), l'armée
du' château féodal.
(2) Cette concentration fut encore dans le même
temps favorisée par l'établissement du droit d'aînesse,
qui n'existait pas dans la loi germanique. - La loi salique appelait
tous les enfants mâles au partage égal de la terre, dans
les successions, et assurait même une part aux enfants illégitimes
; les filles seules étaient esclaves avec une rigueur exagérée,
que l'usage avait fait disparaître.
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RELÈVEMENT DES ÉGLISES.
- CHÂTEAUX FÉODAUX
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A la fin du Xe siècle, les églises et les monastères
du Poitou se relèvent de toutes parts : toutes les classes de
la population réunissent leurs premiers ' efforts pour rebâtir
les temples de Dieu et faire disparaître les ruines des abbayes
; mais à côté du clocher qui s'élance de
nouveau vers le ciel, près du monastère qui répare
ses murailles renversées, et de l'ancien village gallo-romain
qui commence à reconstruire ses maisons de bois brûlées
par les Normands, nous trouvons la tour féodale qui a résisté
aux attaques des pirates. A l'abri de ses fortes murailles, habite le
possesseur d'un grand fief devenu héréditaire il est là
avec sa famille, au milieu des tenanciers qui cultivent sa terre, entouré,
de vassaux, possesseurs d'anciens fiefs qui lui doivent foi et hommage,
et le service de leur épée au jour du combat. Plus d'une
fois, à l'approche des Normands, l'enceinte fortifiée
à servi de refuge aux populations : le seigneur féodal
est sorti avec ses hommes d'armes, et a repoussé loin de la contrée,
le pillage et l'incendie ; trop heureux, lorsqu'il ne se servait pas
quelquefois lui-même de sa puissance pour molester plus faible
que lui, ainsi qu'en témoigne le fait suivant.
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NOTES:
(1) Cette concentration fut encore dans le même
temps favorisée par l'établissement du droit d'aînesse,
qui n'existait pas dans la loi germanique. - La loi salique appelait
tous les enfants mâles au partage égal de la terre, dans
les successions, et assurait même une part aux enfants illégitimes
; les filles seules étaient esclaves avec une rigueur exagérée,
que l'usage avait fait disparaître.
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LES PIRATES DE NOIRMOUTIER VERS
1060
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Au premier âge de la féodalité vouée au
régime de la force, moins encore par son principe et sa nature,
que par le milieu et les circonstances dans lesquelles elle se développa,
presque tous les seigneurs étaient devenus,, suivant le mot énergique
d'un chroniqueur (Orderic Vital) " brigands, ennemis des voyageurs
et des faibles ".
Plusieurs chartes de cette époque prouvent en particulier que
ceux, de nos côtes tiraient d'une active piraterie, la source
la plus claire et la plus abondante de leurs revenus. Celle dont on
va lire la traduction appartient au Cartulaire de l'abbaye de Saint-Sauveur-de-Redon,
en Bretagne.
Cet acte est la convention faite par le seigneur Perenès (1),
abbé de Saint-Sauveur, et de ses moines, avec Gautier et Gosselin
hommes nobles, seigneurs des châteaux de la Garnache, de Beauvoir
et de Noirmoutier. Car il arriva que les susdits nobles, ayant suivi
un vaisseau des moines allant en Poitou, s'en emparèrent à
son retour et le pillèrent complètement.
Dans la suite, repentants de cette faute, ils rendirent à deux
moines de ce monastère, Merkiou et Gautier, tout ce qu'ils avaient
pris. Voulant, en outre. obtenir d'être associés au bénéfice
des prières de tous les frères, ils concédèrent
à perpétuité, eux, leurs femmes, leur fils et leur
postérité, l'exemption de tous droits, cens et seigneuries,
pour deux navires des moines de Saint-Sauveur.
Les témoins suivants ont corroboré la puissance de cetteconvention
: Gautier, lui-même, et Gosselin Pierre, fils de Gosselin ; Guillaume,
moine de Saint-Jouin ; Hermenfroy, moine de Saint-Martin; Gosselin,
de Palluau; Airard, de Noirmoutier ; Aimery, son fils ; Albéric,
de la Garnache ; Boson, de Beauvoir ; Albois, le fils d'Armand ; Béranger,
fils de Gautier ; Aimery, sénéchal; Gobin; Haton, prévôt;
Monz (2).
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NOTES:
(1) Mourut en 1060.
(2) Recherches historiques sur le département de
la Vendée, par feu de la Boutetiére.
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OBLIGATIONS MILITAIRES DES BAS-POITEVINS
AUX Xe ET XIe SIÈCLE
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Le comte du Poitou gouvernait comme partout la force militaire de
son territoire ; mais, contrairement à ce qui se passait ailleurs,
les Poitevins n'étaient tenus qu'à trois mois de service,
et c'était peut-être là une de ces immunités
déjà fort anciennes, qu'avait signalées le poète
Claudien. Au reste, le recrutement n'appelait que les hommes libres,
c'est-à-dire ceux qui possédaient quatre manses, ou habitations
rurales, contenant chacune une valeur d'à peu près dix
arpents (1). Pour maintenir les soldats sous les drapeaux, au-delà
le terme de trois mois, il fallait une prolongation de la guerre ; mais
alors, comme le service de ce que l'on appelle aujourd'hui l'intendance,
n'était pas encore inventé, l'armée vivait dans
le pays occupé, entière-ment aux frais des populations
qui, souvent, étaient ruinées pour longtemps.
C'étaient donc les leudes, les vassaux et arrière-vassaux
qui effectuaient les réunions armées sur un point donné
du territoire. Là se rendaient, au premier appel, comme nous
l'avons vu pour Fontenay-le-Comte, en 841, les hommes libres qui recevaient
les ordres immédiats du comte. Antérieurement à
l'époque féodale, c'était le roi seul qui avait
le droit de convoquer les seigneurs de tout rang qui étaient
ses hommes liges. Mais tout fait croire qu'à l'époque
où nous voilà parvenus, le vieil esprit d'opposition à
la monarchie d'outre-Loire, s'étant toujours maintenu, le comte
avait déjà acquis une assez grande indépendance
de la couronne, pour que les leudes ne voulussent obéir qu'à
lui seul. C'est donc sous sa bannière que les Poitevins s'en
allèrent, dans la Neustrie, guerroyer contre les Normands (2).
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NOTES:
(1) Ducange (V. Mansum) Guérard. -Prolégomènes
du Polyptique d'Iminon, page 378
(2) Auber. - T. VI, pages 47 et 48. - C'est au commencement
du x' siècle, vers 927, que la vicomtesse d'Aunis, Senégonde,
donna à l'abbaye de Saint-Maixent, cent-huit ares de marais salants,
situés près de la Rochelle.
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LES PREMIERS CHATEAUX FORTS
DE VENDÉE ET LES
ÉGLISES FORTIFIÉES
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En peu d'années, le Bas-Poitou, naguère sans défense,
vit ses coites Hérissées de forteresses, les murs de ses
cités garnis de tours, les villages bien armés, chaque
éminence protégée par un château défendu
par un fort, et la terre peuplée de cultivateurs soldats.
Alors s'élevèrent, pour être remplacées
ou complétées ultérieurement par d'autres plus
formidables, les_ forteresses de Moricq, Beauvoir, La Garnache, Noirmoutier,
Fontenay, Maillerais, Mareuil-sur-le-Lay, Apremont, Palluau, Puymau
frais, Mortagne, Mervent, Tiffauges, Pouzauges, Bazo-ges-en-Pareds,
La Roche-sur- l'on (1), Talmont, Châteaumur, etc.
Les monastères eux-mêmes, Noirmoutier, Saint-Michel-en-l'Herm,
devenaient des forteresses. Les plus simples églises se crénelaient
dans les campagnes, s'entouraient de murs épais, afin d'offrir
un asile, soit; aux laboureurs de la contrée, qui venaient s'y
abriter au besoin avec leurs femmes, leurs enfants et leurs troupeaux,
soit à des hommes d'armes qui s'en faisaient les défenseurs
en y tenant garnison. Cet usage se conserva longtemps, et les églises
du Boupère ,de Saint-Juire-Champgillon, de Réaumur, et
l'ancienne chapelle d'Ardennes, près Charzais, nous rappellent
encore ces temps d'insécurité et de violence, où
le salut ne résidait que dans là force.
Eglise fortifiée du Boupère, d'après un cliché
de M. Bonneau.
Depuis ce moment, les Normands cessèrent peu à peu de
trouver, dans le Bas-Poitou, une proie, facile ; et s'ils lui firent
encore de cruelles blessures, ils y rencontrèrent au moins, à
chaque pas, des guerriers, des périls et des combats.
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NOTES:
(1) Il y existait une église et un château
dès le milieu du Xe siècle.
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LES CHATEAUX-FORTS BAS-POITEVINS
AUX XIe, XIIe
ET XIIIe SIÈCLES.
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Vers le XIe siècle, les châteaux-forts du Bas-Poitou se
composaient souvent de trois enceintes, dont la configuration se rapprochait
le plus possible de la forme rcctangulaire, bien que cette forme reçut
fréquemment de notables modifications en raison de la disposition
du terrain, dont on devait tenir compte avant tout. Le terrain enclos
par les remparts était appelé la Basse-cour; c'est là
que se trouvaient les magasins, les écuries, le saloir, le lardoir,
les logements; des maîtres du château et. de la garnison,
un puits ou une citerne, et enfin une chapelle, tantôt formant
un édifice à part, tantôt ménagée
dans une tour. Le donjon en pierres de taille, rond ou carré,
était divisé en trois ou quatre étages, et portait
à une certaine hauteur, des corbeaux rustiques, sur lesquels
on établissait des balcons en planches ; plus tard ce balcon
fut construit en pierre. Il faut remarquer que c'est presque toujours
par des ouvertures pratiquées au deuxième étage
qu'on pénétrait dans le donjon. Les murs étaient
soutenus par des contreforts carrés, et les donjons se terminaient
à leur partie supérieure par une terrasse ou par un toit
à quatre pans; jusqu'au XIe siècle, une des tours d'enceinte
servait habituellement de donjon.
Au ne siècle, la manière de bâtir devient plus
élégante et plus solide. Les tours sont garnies d'une
galerie de mâchicoulis en pierre, surmontée de créneaux.
Les donjons carrés étaient flanqués à leurs
angles supérieurs de guérites à vigie en encorbellement.
La première enceinte contenait des bâtiments qu'on utilisait
de diverses façons; la seconde renfermait le donjon et l'habitation
du baron. Dans la dernière moitié du XIIe siècle,
les tours rondes devinrent les plus communes, et les baies affectèrent
la forme d'arcs en tiers-point.
A partir du XIIIe siècle, la France féodale était
constituée, le réseau de forteresses était complet,
et on éleva peu de châteaux. L'architecture militaire de
cette époque présente les mêmes caractères
que l'architecture religieuse que nous avons étudiée.
Les salles d'habitation prirent un développement considérable
et furent décorées de vitraux et de peintures. Dans les
constructions importantes, le donjon renferme une autre tour encore
plus importante, appelée maîtresse-lotir, belfroy, beffroi,
parce qu'elle contient la cloche d'alarme. Il arrive aussi que les donjons
n'ont pas de porte au rez-de-chaussée : dans ce cas on y entrait
par une fenêtre assez élevée, qu'on atteignait avec
une échelle ou au moyen d'un pont manoeuvré par une poulie.
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CHATEAU DE POUZAUGES
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Le château de Pouzauges, édifié vers, la fin du
XIIe ou vers le commencement du XIIIe siècle, peut passer pour
un des principaux types d'architecture militaire en Bas-Poitou. Il se
compose d'un donjon et d'une forte enceinte de murailles, dont l'épaisseur,
en quelques points, atteint près de deux mètres.
DONJON DU CHATEAU DE POUZAUGES XI
D'après une eau-forte de M. de Rochebrune
Ces murailles, renforcées de tours, dont dix étaient
encore parfaitement reconnaissables il y a quarante ans, se trouvaient
défendues par des fossés d'une largeur et d'une profondeur'
énormes. Une autre enceinte, complètement détruite
aujourd'hui, protégeait toute la partie de la seconde enceinte
qui n'était pas baignée par l'eau des douves.
Ce donjon, de forme carrée, possède trois étages
voûtés. Ses côtés, de 18 m 40 de largeur,
sont flanqués aux angles et au milieu, de tourelles pleines,
aplaties sur les faces. Le premier étage, partiellement situé
en contre-bas du sol, ne présente d'autre ouverture qu'une porte.
Privé de cheminée, il devait servir de magasin. Le second
renfermait la grande salle du château, éclairée
par une fenêtre carrée de petite dimension et pourvue d'une
porte étroite très élevée au-dessus de la
base de l'édifice. Une grande cheminée permettait de Chauffer
cette pièce, qui était la plus belle et la moins triste
du sombre manoir. A côté se trouve une salle complètement
obscure. Au troisième, deux grandes chambres à coucher
reçoivent le jour par deux ouvertures carrées. Enfin l'édifice,
à la partie supérieure duquel on accédait jadis
par un escalier en colimaçon, était recouvert d'une plate-forme
qu'environnait un chemin de ronde, protégé par un parapet
soutenu par des mâchicoulis.
La grosse tour qui défend l'angle le plus aigu de l'enceinte
principale s'appelle encore Tour de Bretagne. Elle pourrait bien être
l'oeuvre de Gilles de Rais, dont le terrifiant souvenir plane encore
ici comme à Tiffauges. Une de ses meurtrières semble de
toute évidence avoir été construite pour l'emploi
de l'artillerie la pénétration que, l'on remarque de chaque
côté était, sans nul doute, destinée à
recevoir la traverse sur laquelle devait s'appuyer la couleuvrine et
plus tard l'arquebuse. Un porte-voix, comme à Tiffauges, servait
à transmettre les commandements autour des courtines, dans toute
la circonférence de l'enceinte et autour de la salle du troisième
étage du donjon. Son diamètre intérieur était
de 0 m. 20. Quant à-la paroi intérieure, elle était
enduite de mortier à la chaux.
Plans et coupes du vieux donjon de Pouzauges
vieux donjon de Pouzauges
Rien ne peut rendre l'aspect de cette solitaire et puissante forteresse,
avec ses murs noircis et déchirés par le temps, où
l'oeil découvre à peine les jours qui étaient si
parcimonieusement ménagés aux habitants de cette féodale
demeure. Véritable nid d'aigle, tout y a été combiné
pour la défense, rien ménagé pour le plaisir des
yeux. Une simple visite à cet antique témoin d'une époque
qui n'est plus, en dit davantage sur- la vie privée du moyen
âge, que toutes les descriptions, et on ne peut songer sans effroi
aux guerres épouvantables qui obligeaient de riches et puissants
seigneurs i venir s'emprisonner, avec leur famille, dans une telle résidence
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V. - CANTON DE TALMONT
La trahison du Seigneur de Talmont en 1138
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Talmont, aujourd'hui simple chef-lieu de canton, fut jadis la, capitale
d'un des grands fiefs du comté de Poitou, embrassant toute la
région comprise entre le cours inférieur du Lay et celui
de l'Yon et du Jaunay, et les côtes de l'Océan. Les ruines
du château, bâti au commencement du Xle siècle, disent
encore quelles dut être son importance : elle est attestée
d'ailleurs par tous les documents du moyen âge, rappelant le rôle
joué dans notre histoire provinciale par les familles qui l'ont
possédé successivement, de Talmont, de Lezay, de Mauléon
et, enfin des vicomtes de Thouars. Il fut rasé en 1628 (1), en
même temps que les fortifications de la Rochelle, après
que cette dernière ville eût succombé sous les coups
de Richelieu.
De tous les événements de l'histoire de Talmont, le plus
important sans contredit était resté dans l'ombre jusqu'à
ces derniers jours ; il vient d'être trouvé par M. Jules
Lair, dans un manuscrit de la Bibliothèque nationale (3), fragment
inédit de la vie de Louis VII, préparée par le
célèbre Suger, abbé de Saint-Denis. Ce savant;
s'est empressé de publier sa précieuse découverte
(4) mais- l'un des épisodes qu'elle renferme est si intéressant
pour le Bas-Poitou, que nous, n'hésitons pas à en donner
ici la traduction littérale, d'après M. Marchegay.
" Suger, après avoir raconté les débuts
difficiles du règne de Louis VII et les circonstances d'une insurrection
de Poitiers, qui s'était érigée en commune, en
1138, mais fut soumise aussitôt par le jeune monarque, continue
en ces termes.
Nous quittâmes donc joyeux la ville délivrée d'un
si grand poids, et après y avoir apaisé beaucoup d'occasions,
de débats divers, nous dirigeant en hâte du côté
de l'Océan, vers un noble château, dont le nom vient de
talus mundis ou talis mundus (5), et qui, suivant l'opinion de ceux
qui l'expliquent ainsi, le doit tant à la beauté du lieu
qu'à la fertilité du sol et aussi à la sûreté
du château, dans les fossés duquel la marée de l'Océan,
qui n'est pas fort éloigné, monte deux fois par jour,
et par son mouvement dans les ruisseaux d'eau douce, permet deux fois
par jour d'apporter en bateau, dans l'intérieur des terres et
jusqu'à la porte de la tour, abondance de poissons, de viandes
et de marchandises diverses. Le Roi fit sommer de se présenter
devant lui, un certain baron nommé Guillaume de Lezay, homme
factieux et fourbe, qui avait usurpé ce château à
l'occasion de sa garde. Il avait déjà eu avec lui un démêlé,
au sujet des faucons blancs du duc Guillaume (6), de ceux qu'on appelle
gerfauts, retenus par lui et restitués seulement sous le coup
des menaces et de la crainte, et il le pressait vivement aussi pour
la reddition du château. Celui-ci nous prenant à part,
l'évêque de Soissons et moi, invitait instamment par notre
entremise, le seigneur Roi à venir en personne recevoir son château.
Aussi l'évêque et plusieurs autres engageaient le seigneur
Roi à se hâter d'aller prendre possession du château,
puisqu'il lui était offert. Mais nous, et un bien petit nombre,
partageant notre avis, craignions leur perfidie et regardions comme
dangereux pour nous et notre seigneur, de pénétrer dans
l'enceinte du château avant la remise de sa tour inexpugnable.
Pour dissuader d'agir ainsi, nous _ rappelions un fait semblable, à
savoir que jadis le Roi des Français, Charles (7), de retour
d'une expédition en Lorraine, après avoir accepté
avec confiance l'hospitalité qu'Herbert, comte de Vermandois,
lui offrait comme. vassal et comme ami, avait trouvé un perfide
ennemi qui le retint en captivité jusqu'à sa mort ; d'autant
plus que nous avions appris que ce même Guillaume avait fait la
même chose ou à peu près au duc Guillaume, lequel
ayant logé une certaine nuit dans le château, put à
grande peine, lorsqu'il voulut sortir le matin, franchir les portes
perfidement fermées sur lui et les siens, contraint d'y laisser
prisonniers quelques-uns des plus nobles seigneurs de son armée(8).
Mais comme le plus grand nombre préférait, aller que s'arrêter,
nous refusâmes de céder à leur sotte audace. Pour
eux, ayant envoyé en avant leurs sergents choisir des logements
et acheter des vivres, ils les suivaient comme en se jouant. Nous au
contraire, attribuant à une trop grande légèreté
cette conduite d'hommes qui, imprévoyants, désarmés,
envoyaient en avant leurs destriers et leurs armes, nous les blâmions
avec force invectives. L'événement ne tarda point. Déjà
le susdit Guillaume, ne pouvant plus cacher sa trahison, et qu'il eut
fait arrêter sans bruit quelques-uns de ceux qui étaient
entrés les premiers, tenait lui-même la porte embrasée,
laissait entrer ceux qui lui paraissaient de meilleure prise, et repoussait
ceux dont il ne voulait pas. Courant en désordre et vociférant,
ceux qu'on saisissait au dedans criaient à ceux du dehors de
prendre la fuite. Les traîtres, ouvrant aussitôt les portes,
se mirent à la poursuite de ces derniers, s'efforçant
de prendre les uns, de blesser ou bien de dépouiller lestement
les autres. Quand soudain, bien que tardivement, le seigneur Roi courant
aux armes avec son armée, ceint de sa cuirasse, de son casque
et de ses jambarts de fer, accourut au secours des fuyards, tomba sur
ceux qui les poursuivaient, et avec ses Français, les seuls à
peu près qui l'eussent suivi, rendit la pareille aux Poitevins.
Là on vit le Roi couper de sa propre épée les pieds
a deux de leurs chevaliers, supplice d'autant plus douloureux que son
manque de force, à cause de sa' grande jeunesse (9), le faisait
durer plus longtemps. Les mettant donc en fuite, les refoulant jusqu'à
la porte, malgré son encombrement, avec l'aide de Dieu,il tira
de la trahison de ces scélérats une si grande et si digne
vengeance, que sur l'heure, contre tout ce qu'on pouvait espérer,
il se décida à attaquer à main forte et bras tendu
le château qui semblait inexpugnable, renversa et brisa par les
armes ses moyens de défense, et livra aux flammes tout le château,
même les abbayes et les églises, jusqu'à l'enceinte
de la tour, où se réfugièrent ceux des traîtres
qui avaient échappé à la mort " (10).
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NOTES:
(1) Louis Brochet. - Huit jours dans la région
de la Châtaigneraie et de Pouzauges. - Léon Arde. - Annuaire
1854.
(2) Dans un mémoire rédigé en 1661
par Marie de la Tour, et publié par M. imbert. T. XXXII de la
Soc. des Ant. de l'Ouest, la duchesse de la Trémoille dit: "
Le 8 avril 1634, j'obtins un arrêt du Conseil, qui nous adjugea
une somme de 50.000 livres, pour nous dédommager du razement
du château de Talmont, fait en 1628. "
(3) Fonds latin, n°s 12, 720.
(4) Voir Bibliothèque de l'Ecole des Chartes,
année 1873, pages 583-596.
(5) Ce jeu de mots disparaît' en français.
D'autres étymologistes voient dans Talmont, .le nom de son possesseur
nomen viri, proprium Talemudus. (Ad. de Valois, notitia Galliarum, p.
577) ;d'autres le font venir de deux mots celtiques, Tal, hauteur, Mon,
courbure de rivière. (D. Fonteneau, t. LXXV, page 507).
(6) Père d'Eléonore, qui, par son mariage
avec Louis VII, lui avait apporté les duché d'Aquitaine
et comté de Poitou.
(7) Charles le Simple, en 923
(8) Le Cartulaire de Talmont, page 162, raconte ainsi
ce fait qu'il place en 1127. Comme un jour, au commencement de son règne,
le comte Guillaume, fils du comte Guillaume le Grand, quittait le château
de Talmont, où il était venu la veille, Guillaume de Lezay
s'empara de Hugues le Brun de Lusignan et de quelques autres barons
de la compagnie du Comte, et, eut l'audace de vouloir les retenir longtemps
captifs.
(9) Louis VI[ avait alors environ 17 ans
(10) Recherches historiques sur l'ancien Bas-Poitou,
par Paul Ma chegay - Annuaire 1874.
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LE MOYEN AGE, SES FAIBLESSES
ET SES GRANDEURS
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Avec les Capétiens, la royauté cessa d'être une
imitation de l'empire romain, comme sous les deux premières races.
Elle prit un caractère national, occupa le rang le plus élevé
dans la hiérarchie féodale, et trouva sa force dans l'hérédité,.
par ordre de primogéniture, et dans la suzeraineté, ce
précieux lien qui, partant du plus humble vassal, vint aboutir
au roi, le premier des suzerains (1).
Le moyen âge ne fut pas non plus, en Vendée, exempt des
tristes taches qui se retrouvent dans l'histoire de toutes les sociétés
modernes humaines : il eut la rudesse et les violences de la jeunesse,
et trop souvent l'abus de la force y fit plier momentanément
les règles les mieux établies. Mais, à côté
des grandes fautes, se montrent l'expiation et le repentir, le dévouement,
l'héroïsme et la foi profonde. Si dans cette organisation
sociale, quelques parties se ressentent encore de l'inexpérience
et de la barbarie des temps primitifs, il y a du moins dans l'ensemble
une vie puissante, une grandeur qui n'a jamais eu d'égale, et
le développement des immortels principes du christianisme. Ce
qui frappe surtout dans les institutions de cette époque, c'est
la variété infinie, la liberté et la sage pondération
des éléments qui les composent : on voit qu'elles ne furent
pas seulement l'uvre des conquérants, mais l'heureuse alliance
des Gallo-Romains et des Francs.
Que serait devenue l'ancienne civilisation corrompue et épuisée,
si elle ne s'était pas retrempée et rajeunie à
de nouvelles sources? Mais aussi, comment les destructeurs de la puissance
romaine eussent-ils pu sortir de la barbarie, s'ils n'avaient pas reçu
des peuples au milieu desquels ils venaient s'établir, les règles
et les traditions qui pouvaient servir de contrepoids à la sauvage
indépendance des forêts de la Germanie ?
Au moyen âge, les Gaulois et les Francs ne formèrent plus
qu'un seul peuple, avec une puissante organisation, où chaque
race avait mis son empreinte, ou toutes les idées, tous les intérêts
sociaux trouvèrent leur représentation et restèrent
un s dans une admirable harmonie.
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NOTES:
(1) La grandeur féodale était accessible
et simple : la distance courte du vassal au suzerain ; par l'enchaînement
hiérarchique des fiefs, l'abîme était comblé
entre le plus petit et le plus élevé des propriétaires
féodaux, de degré en degré , le moindre d'entre
eux se liait au roi, sans courir le risque de perdre le sentiment de
sa propre dignité. (Guizot.- Essai sur l'Histoire de France.)
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L'ÉGLISE EN FÉODALE
EN VENDEE
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Si, dans le Bas-Poitou comme ailleurs, la féodalité
laïque dut sa puissance territoriale à l'hérédité
des bénéfices et, à la recommandation des alleux
(1), l'église féodale dut surtout la sienne à l'obligation
de la dîme. A côté des fiefs laïques de Talmont,
de Montaigu, de la Roche-sur-Yon, de Fontenay, de la Flocelière,
de Pouzauges, de Mortagne-sur-Sèvre, de la Mothe-Achard, de Mareuil,
d'Apremont, de Mervent, il y eut aussi les terres d'église. Elles
ont un aspect différent, selon qu'elles appartiennent à
l'évêché ou à des abbayes. L'évêque
de Poitiers s'est emparé surtout des domaines royaux contenus
dans le territoire de sa cité : ils forment généralement
une masse compacte, assez bien arrondie. Au contraire, le couvent qui
s'est formé plus tard, a dû accepter des donations de toutes
mains, en tout pays, et son domaine se compose ordinairement de parcelles
disséminées (2).
A l'époque où nous sommes rendus, les richesses des couvents
tendent à s'accroître dans une plus rapide proportion que
celle des évêchés (3). Les monastères de
Saint-Martin-de-Ligugé, de Saint-Jouin-de-Marnes, de Saint-Maixent,
de Luçon, de SaintMichel-en-l'Herm, de Maillezais même,
sont plus populaires que l'église épiscopale de Poitiers.
" Ils ont un plus grand renom de sainteté et une réputation
miraculeuse mieux établie. Ils attirent à la vie religieuse
les nobles et les non nobles amoureux de la paix et qui, en prenant
le froc, y apportent leurs biens."
Du reste, les moines ayant fait vu de pauvreté, ce n'est
pas à eux que s'adresse la donation : c'est à -saint Martin,
c'est à saint Benoît, c'est à saint Hilaire, aux
glorieux confesseurs et aux glorieux martyrs dont ils suivent la loi.
D'ailleurs, l'administration des moines est plus régulière,
plus paternelle, plus douce que celle des violents châtelains;
aussi les serfs accourent-ils nombreux, avec leurs femmes, leurs enfants,
leur bétail. Les couvents ne risquent rien à s'établir
dans les solitudes, dans les forêts vierges : le désert
ne tardera pas à- se peupler autour d'eux et la lande à
se transformer en. bonnes terres arables. Plaider contre les moines,
c'est bien chanceux ; ils traînent le baron illettré devant
un tribunal d'Église qui juge en latin. Contre eux, le baron
n'a d'autre ressource que la violence; or, la violence engendre le remords,
et le remords est une source de libéralités (4).
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NOTES:
(1) On appelait recommandation, l'acte par lequel le possesseur
d'un alleu le transformait en fief sous la protection d'un seigneur.
(2) Le bourg d'Oulmes avait été donné, dès 965,
à, l'abbaye de Saint-Cyprien do Poitiers, par un nommé Guillaume.
(3) Parmi les nombreux privilèges accordés aux
abbayes, tels que l'exemption de tous péages, et le privilège
de la pèche, partout on leurs navires pouvaient pénétrer,
il en est un particulièrement remarquable, dont il est fait mention
en 940 : c'était une autorisation, pour les religieux, de créer
des bureaux de change dans leurs diverses maisons. Ce moyen de faciliter
les transactions commerciales, presque uniquement dévolu aux
moines, était donc connu dès le Xe siècle (Auber.
- T. VI, page 216). - En octobre 934, il est question d'un complant
de vignes que reçoivent de l'abbé de Saint-Maixent, Godemer
et Ermangarde, hauts personnages poitevins, à condition que dans
cinq ans " le plant qu'auront fait les donataires sera partagé
entre eux et le donateur ". - Auber, 263.
(4) Rambaud..- Histoire de la civilisation, T. i, pages
135, 136, 137.
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L'AN MILLE
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On était alors à l'an mille, et d'affreux pressentiments
alarmaient tous les esprits, sur la fin prochaine du monde et le règne
de l'Antechrist. Depuis le commencement du siècle, on s'attendait
à voir finir le monde. Mundi termino appropinquante disent presque
tous les auteurs du temps. On avait vu l'empire de Charlemagne crouler
après l'empire romain, les ruines s'entasser sur les ruines,
les malheurs succéder aux malheurs. Le christianisme lui-même,
semblait impuissant à guérir les maux d'ici-bas; de sorte
que cette fin du monde était à la fois l'espoir et la
terreur des chrétiens " Voyez ces vieilles statues, dans
les cathédrales et même dans les églises romanes
des Xe et e siècles, maigres, muettes et grimaçantes dans
leur roideur contractée, l'air --souffrant comme la -vie, et
laides comme la mort. Voyez comme elles implorent, à mains jointes,
cette seconde mort de la résurrection. qui doit les faire sortir
de leurs ineffables tristesses. " C'est l'image de ce pauvre monde
où chacun attendait.
...Le prisonnier attendait clans le noir donjon, le serf attendait
sur la-glèbe, le moine attendait au fond du cloître, entre
l'ange consolateur t le diable qui tirait la nuit sa couverture, en
lui disant avec un éclat de rire : " Tu es damné",
le seigneur attendait entre les murs de son sombre manoir, derrière
lesquels s'était souvent accompli plus d'un drame terrible.
Le siècle s'écoula pourtant sans qu'on entendit le son
de la trompette fatale, et chacun finit par espérer. La nature,
brusquement rassurée, se sentit prise d'un élan d'espérance:
partout on voulut par des monuments durables attester sa foi, encore
surexcitée par des prédications.
Chacun à cette époque de rénovation tint à
se faire complice de ces artistes généreux, de ces imagiers
qui s'intitulaient " les logeurs du bon Dieu et maîtres de
l'oeuvre ", qui venaient de trouver en eux, la puissance d'expression,
la vitalité de la` race, et d'affirmer le génie, si longtemps
comprimés de la nature.
La noblesse, pour expier ses fautes ou se sanctifier, le clergé
pour exalter le culte de Dieu, prodiguent leur argent et leur influence,
et le peuple ses sueurs pour élever des églises, des châteaux,
des donjons, des abbayes. Depuis la chute des Carlovingiens, l'art français
naît, grandit, se développe, et dans cette nuit étoilée
du moyen âge " le rôle civilisateur de la France se
reflète sur tous .les points du Bas-Poitou.
Le XI, le XII et le commencement du XIIIe siècle furent pour
la Vendée, l'époque où les grands monastères
pourvus de riches donations s'élevèrent comme par enchantement
mais bien antérieurement à cette date, des dons nombreux
avaient été faits aux couvents par des bas-poitevins.
Citons au hasard. Au mois d'août 969, Aubert, fils de Ramnulfe,
donne le domaine de la Faucherie au monastère de Luçon.
- En 989, Guillaume Fier-à-Bras concède à l'abbaye
de Bourgeuil; le village et l'église de Longèves, ainsi
que quelques maisons des Loges, des vignes situées à Fontenay
et à l'Orbrie, la Court de Foussay et l'église Saint-Hilaire
de, ce lieu. - En 997, Girbert Corpeau et Agnès sa femme,' donnent
à l'abbaye de Maillezais divers domaines situés à
Coùtigny, la Vallée-d'Or, le Bois-Roux, lés Chaumes
etc. De 1019 à 1029, Guillaume le Grand, duc d'Aquitaine et comte
de Poitou, donne à l'abbaye ci-dessus plusieurs domaines, entre
autresla chapelle de Ruscunila, placée à Fontenay, les
deux moulins construits au pied du château, divers domaines situés
à Boisse, Serigné, Vouvent, Xanton, Darlais, Tesson, etc.
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ABBAYES DE LA VENDÉE
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De l'an 1007 à l'an 1210, quatorze abbayes, suivant presque
toutes la règle de Saint-Benoît, furent édifiées
sur le sol du Bas-Poitou.
Nous résumons ci-après leur histoire.
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SAINT-JEAN-D'ORBESTIER
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L'abbaye bénédictine de Saint-Jean-d'Orbestier, dont
on voit encore les ruines dans la commune du Château-d'Olonne
fut fondée en 1007, par Guillaume IV, dit le Grand, duc d'Aquitaine,
comte de Poitou et seigneur de Talmont. Dans la charte de fondation,
on lit qu'il y avait autour de ce couvent une forêt nommée
0rbisterium, qui avait une grande étendue.
Les principaux bienfaiteurs de l'abbaye furent les ducs d'Aquitaine,
Richard Coeur de Lion, roi d'Angleterre, plusieurs seigneurs de Mauléon,
de Vivonne, de la Roche-sur-Yon, d'Apremont, de Montaigu, de La Mothe-Achard
et les vicomtes de Thouars. Vers 1251, le monastère devint la
proie des flammes et fut rebâti avec les aumônes des fidèles,
d'après les exhortations de l'abbé. Plus tard il eut beaucoup
à souffrir des guerres de religion, et ses bâtiments, détruits
presque entièrement, ne furent relevés qu'en partie.
Pendant tout le moyen âge, le nombre des religieux fut toujours
assez considérable. En 1428, ils étaient dix-huit. En
1533, ils n'étaient que quatorze. Dispersés par les protestants,
il n'y en avait plus que trois en 1577 (1). Enfin en 1668, le, prieur
et le sacriste y résidaient seuls. La suppression de l'abbaye
fut faite en faveur de la cathédrale, qui, moyennant 1200 livres
de rente, s'engagea à acquitter les charges anniversaires, obits,
etc. Il ne reste plus d'Orbestier qu'une maison, qui a conservé
le nom de Prieuré, et les ruines de l'église, dont nous
avons donné une vue dans l'histoire des guerres de religion en
Bas-Poitou T. Ie page 158.
En 1789, le revenu de l'abbaye était de 1.000 livres.
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NOTES:
(1) On lit dans l'État du Poitou sous Louis XIV;
par Dugast-Matifeux ; L'abbaye de Saint-Jean-d'Orbestier (seu orborum),
destinée par le titre de sa fondation ii la retraite des enfants
orphelins ; il y a trois ou quatre religieux, et vaut â l'abbé
4.000 livres et a chaque moine 5 ou 600 livres. - Extrait du Mémoire
de, Colbert de Croissy au roi, 1667.
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SAINTE-CROIX DE TALMONT
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L'abbaye bénédictine de Sainte-Croix de Talmont fut fondée
en 1010 (1), par Guillaume le Chauve, prince de Talmont. Son fils Guillaume,
docile aux intentions de son père, approuva les donations déjà
faites, et y ajouta la moitié des revenus de l'église
d'Olonne. - Kalédon, qui avait épousé la coeur
de Guillaume, ayant hérité de tous les biens de la famille,
confirma également les dons antérieurs et y joignit l'église
de Saint-Vincent-sur-Jard, celle de Saint-Hilaire-la-Forêt, celle
de Saint-Nicolas-de-Grosbreuil, la dîme de ces paroisses, et l'autorisation
de prendre, dans la forêt d'Orbestier, tout le bois nécessaire
pour restaurer ces églises. Il ajouta plusieurs bois et terres
situés près la, ville de Thouars.
L'abbaye de Sainte-Croix eut fort à souffrir dés guerres
de religion. Parmi les plaintes que l'évêque de Luçon
portait au roi en 1565, au sujet des vexations exercées par les
protestants envers les monastères et bénéfices
du diocèse : " L'abbaye de Talmont, dit-il, dans laquelle
on voulait avoir dix-huit ou vingt religieux, est entièrement
ruinée.
Depuis quatre ans, il ne s'y fait aucun service divin; les religieux
ont été chassés par l'abbé apostat, nommé
Boutard, et les revenus de l'abbaye ont été aliénés,
dissipés et vendus (2). "
Sainte-Croix de Talmont: était une abbaye royale, jouissant
d'un revenu de 4.000 livres, au moment de la suppression du monastère,
et de la réunion de la mense monastique à la chambre ecclésiastique
de Luçon. La maison servit alors de retraite à quelques
curés vieux et infirmes, auxquels on donnait une faible pension.
Quelques années avant 1789, sous M. de Mercy, cette maison avait
été peu à peu délaissée, et au commencement
de la Révolution, il n'y résidait plus aucun prêtre
.infirme. Un ecclésiastique, servant de vicaire à la paroisse,.
.acquittait seule les messes d'obligation.
L'abbé de Talmont avait le droit de présentation à
vingt-quatre cures, dix-sept prieurés et cinq chapelles.
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|
NOTES:
(1) Douze ans avant cette fondation, le samedi 8 juillet
1028, d'après la Chro-nique de Maillezais, une tempête
violente jeta l'épouvante en' Poitou., ['11e revêtit des
caractères effrayants que nul ne se souvenait' d'avoir vus. Le
nord du BasPoitou, plus voisin de la Loire, fut surtout maltraité
(Auber, T. vii, page 119,
(2) L'abbaye de Talmont, écrivait en 1666, Colbert
de Croissy au roi, où il y a quelques religieux non réformés,
possédée en commende par le sieur comte de, Laval, fils
de M. le duc de la Trémouille (A), vaut de revenus, en tout,
8.000 livres de rente. Etat du Poitou sous Louis XIV, par Dugast-Matifeux.
(A) Louis Maurice de la Trémouilte, comte de Laval,
pair de France, suivit d'abord la carrière des armes et entra
ensuite dans les ordres, comme cadet de famille, tandis que son frère
aîné restait protestant. Il fut à la fois abbé
de Charron et de Talmont. Pourvu en. 1665 de cette seconde abbaye, il
se plut à y faire sa résidence, en reconstruisit les bâtiments,
et y mourut le 25 juin 1681. C'était un - homme de lettres, amateur
de livres et d'objets d'art,dont il avait rassemblé une assez
nombreuse collection (page 87).
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BELLENOUE
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L'abbaye de.Bellenoue, située dans la commune de, Château-Guibert,
fut fondée antérieurement à 1047 par Gognore, fils
de Geoffroy, premier vicomte de Thouars, et par Aénor, femme
de ce dernier, qui se fit moine et fut inhumé à Saint-Michel-en-l'Herm,
dont la nouvelle abbaye devint une dépendance. Aimeri, son fils,
entouré de ses vassaux, en présence du prieur Raynault,
et de divers autres témoins, confirma entre les mains de l'abbé
de Saint-Michel, la donation faite par son père. La charte de
fondation se trouve en entier dans le. Gallia Glaristiana.
L'abbaye de Bellenoue fut dédiée à la_ Sainte-Trinité,
et réduite plus tard à l'état de simple prieuré,
rapportant 900 livres au XVIIe siècle.
En 1719, de Cornillon Saint-Verge résidait dans la maison appelée
encore La Cure, située au sud de Bellenoue, sur le chemin qui
conduit à. la Série.
Sur la porte extérieure de la cure, on lisait encore- en 1845,
cette inscription
C. Servant hujusce loci rector cedem cedificandam curavit, rappelant
ainsi le nom de Servant Charles, curé inhumé dans l'église
de la Trinité de Bellenoue, le 15 janvier 1671:
En 1778, le prieur qui était curé primitif du lieu,
tirait de ce bénéfice 1.500 livres de revenu.
Le 20 avril 1305, mardi de Pâques, Bertrand de Goth, archevêque
de Bordeaux, visita le prieuré de Bellenoue, et " y coucha
avec son train, puis le lendemain 21 prêcha et fit, autres actes
de visite ".
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NIEUIL-SUR-L'AUTISE
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L'abbaye de Nieuil-sur-l'Autise (ordre de saint Augustin), fut fondée
sous le vocable de saint Vincent en 1069, par Airauld Gassedener ou
plutôt Cassedener (Casse denier), seigneur de Vouvent.
La motte gauloise de Nieuil (najogilum), était alors devenue
le centre d'un fief appelé la Court de Nieuil, dont fut investi
le nouveau monastère (Besly).
Gui Geofroy, duc d'Aquitaine, confirma en 1076, les dons faits par
le fondateur. Les successeurs de ce prince augmentèrent encore
le nombre de ces libéralités. Aénor de Châtellerauld,
épouse de Guillaume- X, vint mourir dans l'abbaye, et voulut
que sa dépouille mortelle reposât dans l'église
du lieu ; la reine Aliénor, sa fille, s'y rendit en 1141, et
ne se montra pas moins généreuse que ses ancêtres.
Louis VII se hâta de s'associer à l'acte de munificence
de sa femme., - Les Chabot, devenus seigneurs de Vouvent, suivirent
le même exemple ainsi que les Parthenay l'Archevesque, qui leur
succédèrent dans la possession de cet important domaine.
Les religieux de Nieul employèrent les richesses qu'ils tenaient
de leurs bienfaiteurs à édifier l'une des plus belles
églises romanes du Bas-Poitou. Elle existe à peu près
intacte de nos jours, pet les parties absentes n'empêchent pas
de juger de son ensemble.
Cette abbaye étendait sa juridiction sur de nombreux prieurés,
cures et chapelles des diocèses de La Rochelle, Luçon,
Poitiers, Saintes, Maillezais et Nantes.
C'est sous l'administration de Balthazar de la Vrillière, c'est-à-dire
à la fin du XVne siècle, que l'on résolut de faire
disparaître le monastère de Nieuil, dont les bâtiments
étaient dans le plus mauvais état. Enfin, par sentence
de fulmination des 8 et I-t août 1718, enregistrée suivant
arrêt du parlement de Paris du 11 avril 1720, l'abbaye de Nieul
était sécularisée et unie à l'église
cathédrale de la Rochelle (1).
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|
NOTES:
1) Pouillé du diocèse de Luçon, Aillery.
- Poitou-Vendée, Fillon et de Roche brune. - Histoire de l'abbaye
de Nieuil, par Arnauld.
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NOTRE-DAME DE MOREILLES
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L'abbaye de Moreilles, d'abord de l'ordre de Clairveaux, fut bâtie
par les seigneurs de Triaize sous l'invocation de la Sainte Vierge.
Elle existait avant 1109, puisqu'à cette date Airnery de Bouil,
seigneur du Poiroux, ayant fondé dans cette paroisse l'abbaye
de Bois-Grolland, fit venir des moines de Moreilles, et mit le nouveau
monastère sous la direction et dépendance de la maison-mère,
dépendance dont il sut s'affranchir en grande partie dans la
suite. Néanmoins l'existence de cette subordination, au moins
pendant quelques années, est nettement établie par le
document ci-dessous tiré du Cartulaire du Bas-Poitou par Paul
Marchegay.
Au nom de la sainte et indivisible Trinité, moi, Aimeri de
Bouil, voulant bâtir une maison dans laquelle Dieu fut perpétuellement
honoré par ses fidèles serviteurs, j'ai plusieurs fois
demandé à vénérable homme Méchin,
abbé de Moreilles, d'envoyer à Bois-Grolland un certain
nombre de religieux et de leur donner un abbé, afin qu'ils y
fixent leur résidence, ils y prient constamment le Seigneur pour
le pardon de mes péchés et des péchés de
mes parents, et enfin pour le bien spirituel de tous les fidèles
vivants et trépassés. Le sus dit Méchin, après
de longs ajournements, mais toujours sollicité par moi et par
beaucoup d'autres, a fini par accorder cette requête.
La bulle privilégiée de Lucius II accordée à
l'abbaye de Moreilles entre le 12 mars 1144 et le 25 février
1145, lui conféra spécialement la grange ou ferme de Bois-Grolland,
qu'Aimery de Bouil avait donnée à la dite abbaye.
L'abbaye de Moreille fut, en 1145, visitée par Gilbert de Porte,
évêque de Poitiers, et affiliée, en 1152, à
l'ordre de Citeaux.
Lorsqu'en 1203, l'abbaye de Bois-Grolland quitta la règle de
saint Benoît, pour se soumettre à la règle établie
à Citeaux; l'affiliation fut faite par Robert, abbé de
Bois-Grolland, entre les mains de Maurice, évêque de Poitiers
; mais avec l'assentiment d'Ortensius, abbé de Moreilles.
Au mois d'avril de cette même année 1203, l'abbé
Ortensius (1) intervint comme témoin, dans un acte de donation
faite au profit du prieuré de Saint-Hilaire de Fontenay, par
Guillaume Chasseloup et son frère Girard Voussard (2).
En 1541, c'est-à-dire trois ans avant de ressortir au siège
royal et sénéchaussée de Fontenay, l'abbaye de
Moreilles avait pour fermier Joachim Voysin de la Popelinière,
près Sainte-Gemme-la-Plaine, père du célèbre
capitaine et historien protestant Lancelot Voysin de la Popelinièrel.
Ruinée en 1562 par les protestants, et en 1615, parla garnison
de Maillezais, des prieurs zélés profitèrent du
bon vouloir de Richelieu et de son successeur au siège de Luçon,
Aimery de Bragelongne (3), pour reconstruire les lieux incendiés.
- Le monastère sembla ressusciter alors, et vit s'augmenter considérablement
le nombre de ses religieux (4). L'église, reconstruite en 1699,
par les soins du prieur Gédoin, fut bénite la même
année par Mgr Charles Frézeau de la Frézelière,
évêque de la Rochelle.
Au mois de mai 1714, Dom Boyer, savant bénédictin, qui
visita l'abbaye de Moreilles et qui y prêcha dit, dans le compte-rendu
de son voyage, que l'église de Moreilles était fort belle,
et que le prieur, D. Jacques Godel, qui le reçut " avec
force amitiés, ainsi que D. Foulon et D. Hébert ",
faisait à ce moment-là " bâtir à grande
hâte et bien réparer son monastère ", dont
l'évêque de Lavaur, Nicolas de Malézieux, était
abbé, depuis longtemps.
Au moment de la Révolution, il' ne restait plus à Moreilles
qu'un seul moine, auquel l'abbé commendataire, qui était
l'évê.que de Nancy, faisait une pension sur les vingt-mille
livres qui lui restaient.
Le 13 février 1790, eut lieu la déclaration de l'abbaye
de Moreilles, avec le bail de son revenu de 21.150 livres, affermé
sur la caution du directeur général des fermes (5).
L'abbaye de Moreilles possédait à Chavigny, un marais,
sur lequel les habitants de Nalliers et de l'Isleau avaient pour "
coutume ancienne " le droit de mener pacager leurs bestiaux, ainsi
qu'il appert d'un acte de 1463.
Elle possédait également, dans la paroisse de Bessay,
les moulins de la Rochette, deux à eau et un à vent. Ces
moulins furent arrentés par l'abbé, en 1703, à
Antoine Guignard, moyennant la rente de 200 livres, dont 40 pour le
curé de Bessay, et 75 pour l'église du même lieu,
consentie par Jean des Forges. L'acte de confirmation est du 6 février
1729 (6).
Aujourd'hui, il ne reste plus de la riche abbaye de Moreilles, possédée
par M. G..., qu'un vaste enclos, un mur de l'église et des- écuries.
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|
NOTES:
(1) Le nom du même abbé figure avant 1203,
dans un document de la plus haute importance, ayant trait à Chaillé-les-Marais,
et que nous regrettons de ne pouvoir reproduire ici.
(2) Archives de Fontenay, T. iI page 64.
(3) Aimery de Bragelongne, fatigué du fardeau
épiscopal, quitta volontairement cette fonction, pour se retirer
dans l'abbaye de Moreilles dont il devint abbé.: Il y mourut
en 1642. - Un autre abbé de Moreilles, Nicolas de Malézieux,
évêque de Lavaur, se trouvait dans son abbaye a la mort
de Mgr de Lescure c'est lui qui, le 9 juillet 1723, célébra
dans la cathédrale de Luçon, un service solennel à
l'intention de son défunt confrère.
(4) Lors des obsèques de Mgr, de Nivelle, en 1662,
le prieur de Moreilles officiait. Dans l'assistance, se trouvaient Dom
François de la Cour, et Dom René Le Geay, moines de la
même abbaye. - Boileau, curé de Coussay. - Bruneteau, du
Langon, et Grasset, de Petosse. Colbert de Croissy, dans son Etat du
Poitou, page 81, prétend qu'en 1666, il n'y avait dans l'abbaye
de Moreilles, que cinq religieux non réformés qui, dit-il,
vivaient assez bien. -- Le revenu était de 20.000 livres, et
le commendataire était Martin de Bragelongne, neveu de l'évêque
du même nom.
(5) Annuaire de la Société d'émulation
de la Vendée, 1857, page 245, id. 258. Voir Chassin. - La Préparation
de la guerre de Vendée, T. I, pages 137-141.
(6) Archives du diocèse.
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BOIS-GROLLAND
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Bois-Grolland (Broqlium ou Boscum Grolandi, et plus souvent Brolium
Grollandi), dans la paroisse du Poiroux, était une abbaye dédiée
à la Sainte Vierge. Elle avait été fondée
en 1109, par Aimery de Bouil, seigneur du Poiroux, et placée
sous la règle de saint Benoît. Celle de Citeaux y fut établie
plus tard. Le fondateur y fit venir des moines de Moreilles et mit le
nouveau monastère sous la direction de sa maison-mère,
dépendance dont il sut s'affranchir en grande partie dans la
suite.
" Au nom de la sainte et indivisible Trinité, moi, Aimery
de Bouil, voulant bâtir une maison dans laquelle Dieu fut perpétuellement
honoré par ses fidèles serviteurs, j'ai plusieurs fois
demandé à vénérable homme Méchin,
abbé de Moreilles, d'envoyer un certain nombre de religieux et
de leur donner un abbé, afin qu'y fixant leur résidence,
ils y prient constamment le Seigneur pour le pardon de mes péchés
et des péchés de mes parents, et enfin pour le bien spirituel
de tous les fidèles vivants et trépassés. Le susdit
Méchin, après de longs ajournements, mais toujours sollicité
par moi et par beaucoup d'autres, a fini par accéder à
cette requête. " Marchegay. - Cartulaire dit Bas-Poitou.
L'église et les bâtiments de Bois-Grolland furent détruits
pendant les guerres de religion, puis rétablis par les religieux
de l'étroite observance. L'abbaye jouissait d'un revenu de 6.000
livres (1). L'anniversaire de la dédicace de l'église
avait lieu tous les ans, le 16 décembre. La charte de fondation.
nous apprend que, tout près, il existait alors une forêt
du nom de Vertou (Wertaw, c'est-à-dire du silence, lieu tout
à fait convenable à des religieux).
L'église et le monastère avaient été bâtis
dans un goût assez recherché, sous la direction de Dominique
.Robin qui, de prieur de Vertou, était devenu prieur et second
fondateur de l'abbaye de Bois-Grolland .
En 1807, l'abbaye abandonnée était devenue le chef-lieu
d'une congrégation . dite- des Ursulines de Bois-Grolland. Elle
était composée de religieuses de plusieurs ordres que
la guerre avait séparées, et qui s'étaient réunies
là pour y vivre de la vie conventuelle. La supérieure
était Mlle-de Lézardière. appelée en religion
soeur Sainte-Angèle. Cette congrégation fut autorisée
par le gouvernement. Sa règle était basée sur celle
de saint Augustin. Elle avait une maison à la Roche-sur-Yon,
dite de Saint-Gabriel ; d'autres au Poiré-sur-Vie, à Aizenay,
aux Sables-d'Olonne, à Tiffauges. La principale mission des Ursulines
était l'instruction de la jeunesse et le soin des malades pauvres.
En 1813, la mère Sainte-Angèle, sur la demande qui lui
en fut faite, et avec la permission de Mgr Paillou, se transporta, ainsi
que plusieurs de ses religieuses, dans la ville de Luçon, où
elles se réunirent à quelques anciennes Ursulines et s'employèrent
à l'éducation des jeunes filles.
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NOTES:
(1) Il avait pour abbé commendataire, en 1666,
Mgr de Lingendes, évêque de M con.
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TRIZAY
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L'abbaye de Trizay, dont on voit encore quelques bâtiments dans
la commune de Saint-Vincent-Puymaufrais, à peu de distance du
Lay, est indiquée dans le Pouillé des bénéfices
de France, sous le nom clé Trisagium Trisaium. Placée
sous l'invocation de Notre-Dame, elle était fille de l'abbaye
de Pontigny, de l'ordre de Citeaux, et eut pour fondateur en 1124, Hervé,
seigneur de Mareuil, frère de Guillaume, seigneur d'Apremont.
L'ouvrage ci-dessus ne la fait cependant dater que de 1145 (1).
Voici, d'un autre côté, en quels termes le Dictionnaire
dés familles de l'ancien Poitou parle de cette fondation. "
Pierre Achard était, en 1117, présent à la fondation
de l'abbaye de Trizay, par Hervé de Mareuil, Geoffroy de Tiffauges
qui fut un des bienfaiteurs de cette abbaye, et autres L'auteur du Dictionnaire
de la noblesse prétend que c'est seulement en 1124, et sous l'épiscopat
de Gilbert, évêque de Poitiers, que Pierre Achard souscrivit
l'acte de fondation de cette abbaye.
De la déclaration des biens, revenus, etc., fournis le 6 janvier
1790, par le sous-prieur de Trizay (2), il résulte qu'à
cette époque, l'abbaye ne comptait plus que cinq religieux, dont
la réputation, au dire de certains contemporains, n'était
rien moins qu'exemplaire.
Dom Le Rouge, religieux de Trizay, a fait imprimer à Fontenay,
en 1773, un ouvrage sur l'agriculture, qui a pour titre Principes du
cultivateur. Le même religieux est aussi auteur d'un livre qui
parut au moment de la Révolution, et qui a pour titre : Voyage
aux Pyrénées.
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|
NOTES:
(1) L'abbé Aillery dit que l'abbatiale de Trizay
aurait été bénite-le 15 août 1145.
(2) Archives nationales, F 17 1179.
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BREUIL-HERBAUD
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L'abbaye de Breuil-Herbaud, dans la paroisse de Falleron, fut fondée
avant 1130, sous l'invocation de Notre-Dame, et soumise à la
règle de saint Benoît. Le Dictionnaire des familles du
Poitou (art. Thouars) parle d'une confirmation faite en 1029; par Geoffroy,
vicomte de Thouars, de la donation en faveur du monastère de
Saint-Cyprien de Poitiers, par Raoul Flamme et Raingarde, son épouse,
de leur domaine de Breuil-Herbaud, pour y construire un bourg et une
église. Cette église, comme son nom l'indique, était
située au milieu du bois.
En 1680, l'abbé Jacques-Nicolas Beisser, fils d'un chirurgien
du Roi, chevalier, commandeur de Saint-Lazare et du MontCarmel, fit
rétablir l'église et les bâtiments de l'abbaye ,
rentrer les domaines usurpés et travailla pour le bien de la
maison. Dès l'an 1700 pourtant, il n'y avait plus de moines,
et la mense conventuelle avait été unie à la mense
abbatiale. Le revenu s'élevait, en 1789, à 6.000 livres,
selon les uns, et seulement à 3.000, selon d'autres.
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L'ILE CHAUVET
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On a prétendu que cette abbaye, située en la paroisse
de Châteauneuf, tirait son nom (insula Galveti) de sa situation
au milieu du marais septentrional, où elle apparaissait comme
chauve et dénuée d'ombrage ; mais il est plus rationnel
d'admettre que le terrain sur lequel elle fut bâtie portait tout
simplement le nom de l'un de ses propriétaires. Ce terrain formait
autrefois une petite île de l'Océan. L'auteur des Ordres
monastiques dit que quelques écrivains assurent que Charles le
Chauve fut le fondateur du monastère qui y fut établi.
Le Gallia Christiana (et nous partageons son avis), croit au contraire
qu'il faut en faire honneur aux moines de l'Absie et aux seigneurs de
la Garnache. Cette fondation aurait dès lors eu lieu seulement
vers l'an 1130. Quoi qu'il en soit, l'île Chauvet était
sous l'invocation de la Sainte Vierge et de l'ordre des Bénédictins,
qui la cédèrent longtemps après aux Camaldules
(1653) (1). L'abbé portait la croix pectorale, la mitre et la
crosse. Les religieux étaient au nombre de sept à huit,
et avaient sous leur dépendance le prieuré régulier
de la Jarrie-Vieille-Seigle, en la paroisse de Landevieille. L'abbé
nommait aussi à trois chapelles régulières desservies
dans l'église, sous les noms de Saint-Julien, Saint-Antoine et
Saint-Sébastien, et à la chapelle de Sainte-Catherine
qui s'y trouvait également.
En 1588, le monastère fut incendié par les capitaines
protestants du Bourg et de Granville.
Au moment de la Révolution, le revenu de l'abbaye- de l'île
Chauvet était de 4.500 livres (2).
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|
NOTES:
(1) Louis du Plessis de Richelieu, frère aîné
du grand cardinal, mort archevêque de Lyon, en 1653-fut, de 1633
ii 1643, abbé de l'abbaye de File Chauvet. - Un autre abbé,
Gaspard de Coligny, abandonna l'état ecclésiastique-pour
se marier, en 1681 (Auber).
(2) L'abbé Auber donne la date 1670 ; c'est à cette, date
que d'après lui, seraient arrivés à l'île
Chauvet 12 camaldules, appelés par l'abbé Henri de Maupas,
évêque du Puy, et ensuite d'Evreux.
Les camaldules étaient des bénédictins,
dont le nom vient de la petite ville de Camaldoli, en Toscane.
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LA GRAINETIÈRE
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La date de fondation de cet établissement religieux n'est rien
moins que certaine, mais on peut croire que cette fondation est due
à la terreur qu'inspirait l'approche de l'an mille.
Contrairement à l'opinion de Thibaudeau et de l'abbé
Aillery (1), qui donnent la date de 1130, on peut affirmer que l'abbaye
de la Grainetière existait avant 1100, puisqu'à cette
époque, il lui était fait une donation de 45 sols de rente
sur la terre do Marigué; par Godefroid, fils d'Alfred, pour le
repos de l'âme d'Ozengarde, autrefois épouse de Guillaume
Judicaël, seigneur des Herbiers.
Quoi qu'il en soit, la premier abbé connu est un Guillaume
de Conchamps, également premier abbé de l'abbaye de Fontdoulce,
au diocèse de Saintes, fondée vers 1117. Son successeur
aurait été Gérald, qui plaça son monastère,
de l'ordre de saint Benoît, sous la dépendance de celui
de Saint-Michel-en-l'Herm.
L'abbaye de la Grainetière, dont il reste encore d'imposantes
ruines dans la commune d'Ardelay, était autrefois fortifiée,
et en temps de guerre, les habitants du voisinage s'y retiraient.
RUINES DE L'ABBAYE DE LA GRAINETIERE
D'après une eau-forte de M. de Rochebrune
En 1372, les Anglais vinrent assiéger la Grainetière,
défendue.. par un vaillant homme de guerre, Martinière,
et ne purent s'emparer que de la basse-cour, à laquelle ils mirent
le feu.
Les religieux avaient même le droit d'établir à
la Grainetière un capitaine. Le duc de Berry, comte du Poitou,
en nomma cependant sans leur consentement, et leur assigna des gages
sur le revenu du monastère. Ces capitaines vendaient et pillaient
les biens de l'église, ce qui força les religieux à
s'en plaindre à Charles VII qui, ainsi qu'Arthur de Richemond,
connétable de France, les avait pris sous sa protection. Le 6
mars 1425, une Commission fut adressée au sénéchal
du Poitou, Jean de Torsay, " pour faire enquête et rendre
justice à qui de droit " (2).
La maison de Chasteigner a possédé longtemps la Grainetière
et joui de ses revenus, quoi qu'il y eut des abbés titulaires,
dont elle avait fait de simples régisseurs. La mense conventuelle
fut unie, en 1760, à la mense abbatiale, sous réserve
d'une pension qui se payait au séminaire de Luçon. Cette
rente inamortissable était, en 1788, de 2.600 francs, sur laquelle
il était payé à Dom Billaud, ancien prieur, une
rente de 1.200 francs, plus une pension de 500 francs au desservant
de la Grainetière. On accordait aussi 200 francs au curé
d'Ardelay, pour aider à la nourriture de son vicaire. Cette abbaye
avait alors un revenu de 10.000 livres (3).
En 1789, l'évêque de Chartres, dernier abbé, y
plaçait un prêtre auquel il donnait 300 francs pour y dire
la messe, faire les offices et administrer les sacrements.
Disons pour terminer cette courte notice (4) que l'abbaye de la Grainetière
eut pour abbé, en 1533, Lazare de Baïf, qui fut tout à
fa ' fois maître des requêtes, diplomate, érudit
et poète, et que l'abbé Prévost, le gracieux auteur
de Manon Lescaul, habita la Grainetière. C'est à l'ombre
de ses grands bois, dans ce site à la fois romanesque et sauvage,
qu'il composa cet immortel ouvrage qui se répandit dans l'Europe
entière pour charmer ses loisirs (5).
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|
NOTES:
(1) Pouillé du diocèse de Luçon,
XXXIII.
(2) En 1671, Mgr Nicolas Colbert, évêque
de Luçon, visita la Grainetière. - Quatre ans auparavant,
dans un rapport au roi, Colbert de Croissy dit que l'abbaye possédée
par le sieur de la Roche-Posay (Louis Chasteigner), valait 6.000 livres
de rente.
(3) l fut un temps où les revenus de la Grainetière
étaient évalués à 3.400 hectolitres de grains,
sans compter ses autres ressources.
(4) Extraite de La Région des Herbiers - Ardelay,
par Louis Brochet..
(5) Lors d'une visite faite le 22 avril 1682, par Mgr
de Barillon, il fut constaté que l'abbaye renfermait quatre religieux
profès au lieu de six qui existaient précédominent,
et qu'ils vivaient à part, ayant chacun des bénéfices
particuliers.
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ABBAYE DE LA BLANCHE
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Une petite maison religieuse avait d'abord été fondée,
en 1172, dans l'île du Pilier ; mais comme la digue naturelle
qui la rattachait dit-on, à l'île principale, menaçait
peu à peu de disparaître et que les moines étaient
ainsi exposés à manquer de toute espèce de provisions,
on les transféra à Hério (Noirmoutier). Cette translation
a donné lieu à plusieurs appellations qui, quoique différentes,
désignent néanmoins le même monastère ...
Une fois installée à Hério, l'abbaye prit le nom
de Notre-Dame de la Blanche, sans doute à cause de la couleur
du costume des moines de Citeaux. En 1205, les seigneurs de la Garnache
firent à l'abbaye de la Blanche diverses donations confirmées
en 1236, par Pierre de Dreux, duc de Bretagne. Parmi les autres bienfaiteurs
de l'abbaye figurèrent Guillaume de Mauléon, Pierre Jobert,
de Talmont, Hugues, vicomte de Thouars et seigneur de la Garnache, Aimeri,
son fils. Tous ces dons furent approuvés en 1267 par Alphonse,
frère de Saint Louis, comte de Poitiers et de Toulouse. Déjà
une bulle de Grégoire IX, datée de 1235, avait confirmé
toutes les donations faites et à faire. Il avait pris l'abbaye
sous sa protection, et lui avait accordée des faveurs spéciales
qui rendaient les religieux comme indépendants de la juridiction
épiscopale.
Il paraît néanmoins que vers l'an 1500, sous l'administration
de l'abbé Jean V de la Trémouille, depuis évêque
de Poitiers, l'abbaye de la Blanche se trouvait dans un état
déplorable, et que l'église était sans ornements,
car l'abbé obtint du pape des indulgences pour ceux qui contribueraient
à la réparer. Ces indulgences données par le légat,
étaient de 1490.
L'abbaye de la Blanche éprouva, en 1562, les fureurs des protestants.
On lit dans le Gallia Christiana que l'un de ses abbés, Jean
VII (1532-1540) "était un loup, sous la peau d'une brebis,
et qu'il vaut mieux se taire que d'en parler ".Denis Largentier
porta la réforme dans le monastère, en y introduisant
des religieux de l'abbaye des Prières (1) au commencement du
XVIIe siècle.
L'abbaye royale de la Blanche possédait un revenu de 11 à
12.000 livres.
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|
NOTES:
(1) Abbaye de Bernardins, fondée en 1250, dans
le diocèse de Vannes, à l'embouchure de. la Vilaine.
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LIEU-DIEU-EN-JARD (Commune de
Jard)
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Vers la fin du XIIe siècle (1), Richard Ier, roi d'Angleterre,
duc de Normandie, comte d'Anjou et de Poitou, fonda l'abbaye de Jard,
au milieu d'un bois disparu depuis, et situé sur les bords de
la mer. Elle fut placée sous l'invocation de Notre-Dame. Cette
maison fut détruite par les Calvinistes le 31 mars 1568. Le 2
avril suivant, un conseil ayant été tenu à Nantes,
sous la présidence de l'évêque de Luçon,
pour connaître des vexations des protestants, l'abbé Jean
de Malins y déclara que le 31 mars de cette même année,
le couvent et l'église de Jard avaient été saccagés
et brûlés presque entièrement, ainsi que le château
de la Grange, demeure ordinaire de l'abbé, et la métairie
de la Châtaigneraie, qui faisait là meilleure partie du
revenu de l'abbaye.
En 1570, René de Sallo, religieux de Jard, devint évêque
de Luçon.
La mense conventuelle fui, vers 1730, par décret de Mgr de
Bussy-Rabutin, évêque de Luçon, unie au collège
des Prémontrés de Paris, auxquels l'abbaye appartenait
encore en 1755.
Les ruines de l'église annoncent qu'elle était considérable.
En 1789 le revenu de l'abbaye était de 7.500 livres (2).
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|
NOTES:
(1) D'aucuns prétendent que c'est en 1208.
(2) Colbert de Croissy évaluait, en 1666, à
20.000 livres de rente, l'abbaye de Jard, dont l'abbé commendataire
était alors l'évêque de Poitiers (Gilbert de Clérembault).
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NOTRE-DAME D'ANGLES
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D'après Thibaudeau dans son histoire du Poitou, l'abbaye d'Angles,
de l'ordre des Augustins, aurait été fondée en
1210.
Travée dans l'église d'Angles
(D'après une eau-forte de M. de Rochebrune).
En 1631, le sénéchal de Fontenay, François Brisson,
et Jean Besly, avocat du roi, vinrent visiter l'église et les
bâtiments qui avaient été ruinés pendant
les guerres de religion. Ils n'y trouvèrent que deux prêtres,
qui touchaient les revenus, s'élevant alors à 1.000 livres.
Le couvent était rempli d'immondices, et l'abbé n'y résidait
point. Le curé seul faisait l'office divin; aussi, pour sa décharge,
ob-tint-il, un peu plus tard, en 1671, de Mgr de Colbert, évêque
du diocèse, que l'église fut érigée en vicariat
perpétuel. Cependant les revenus du monastère étaient
encore considérables alors, et la faveur d'être nommé
abbé d'Angles était briguée par les plus hautes
familles. C'est ainsi qu'en 1704, Jean Pharamond de Sainte-Hermine,
ancien lieutenant de vaisseau, devint abbé d'Angles. On voyait
ses armes dans l'église du lieu.
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|
LES FONTENELLES
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L'abbaye des Fontenelles (Fontanelle), commune de Saint-André-d'Ornay,
située dans l'ancienne forêt de la Roche-sur-Yon, dont
on ne trouve plus que quelques faibles traces, était une abbaye
royale de l'ordre des Augustins, qui valait environ 3.600 livres. Elle
fut fondée en 1.210 par Guillaume de Mauléon, seigneur
de Talmont, et sa femme Béatrix, dame de Machecoul, Luçon
et la Roche-sur-Yon. Ces deux personnages et leur fille furent inhumés
dans l'église du monastère. Jean de Melun, évêque
de Poitiers, avait lui-même consacré l'église en
1248.
Les Fontenelles comptèrent parmi leurs bienfaiteurs, Charles,
comte d'Alençon et d'Anjou, Jean, duc de Normandie, le connétable
de Clisson, René, roi de Jérusalem et de Sicile, tous
seigneurs de La Roche-sur-Yon. Le couvent fut d'abord occupé
par les religieux de Saint-Benoît, et ensuite par les religieux
de Chancelade, dits chanoines de Saint-Augustin. Les Calvinistes massacrèrent,
en 1.569, les chanoines, dévastèrent l'église et
brûlèrent tous les bâtiments à l'exception
des cloîtres. L'abbé Jean Pidoux, oncle maternel du grand
fabuliste Jean de la Fontaine, ayant fait reconstruire le dortoir, les
protestants y mirent encore le feu plus tard, mais les auteurs de ce
second incendie furent contraints, en 1626, de rétablir à
leurs frais ce qu'ils avaient détruit. La règle se ressentit
de ces troubles :les religieux perdirent de leur ferveur, et Richelieu,
évêque de Luçon, crut devoir intervenir en 1614,
en leur imposant un règlement sévère. Ces mesures
furent cependant insuffisantes ; le désordre fut même poussé
si loin, que l'évêque fut obligé; en 1669 (1), d'interposer
une seconde fois son autorité d'une manière plus radicale
et plus efficace. Il y. appela donc des chanoines réguliers de
Sainte-Geneviève, qu'il chargea de réformer les religieux.
Il ne restait plus en ce moment aux Fontenelles que quatre moines qui
ne méritaient pas d'en porter l'habit et le nom. M. Legrip, dans
son histoire des Fontenelles (2), dit qu'à cette époque
les moines se livraient au plaisir de la chasse, dans la forêt
de La Roche. Ils s'y adonnaient avec une telle passion, qu'il était
impossible à certains jours d'en trouver un seul à l'abbaye
On les rencontrait aux alentours, le fusil sur l'épaule, vêtus
de gris, laissant de côté le scapulaire exigé par
les statuts (3).
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|
NOTES:
(1) En 1666, Colbert de Croissy évaluait à
6.000 livres de revenus l'abbaye des Fontenelles, possédée
alors par le fils de Beaumont Pally, gentilhomme, du BasPoitou.
(2) Annuaire de la Société d'émulation,
année 7874, page 155.
(3) La plupart des renseignements- historiques concernant
les abbayes dont nous venons de parler, ont été extraits
littéralement du Pouillé de Luçon, par l'abbé
Aillery.
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INFLUENCE DES CROISADES SUR
LES FONDATIONS MONASTIQUES
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Les dernières abbayes dont nous venons. de faire l'historique
n'avaient plus, en général, les dimensions des grands
établissements du XIe siècle, où l'importance des
créations répondait à de plus grands besoins spirituels,
où un plus grand zèle s'était porté vers
elles, affirmant sa foi par des couvres grandioses. Ce .sentiment religieux,
si développé après l'an mille, avait trouvé
à se satisfaire dans l'enthousiasme des Croisades, vers lesquelles
.nous verrons les plus puissantes familles bas-poitevines diriger leurs
ressources: le besoin d'argent étant devenu plus impérieux
que jamais.
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L'ÉGLISE ADOPTE LES INSTITUTIONS
ET LES
MOEURS FÉODALES
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Depuis 1061, l'abbé, dans les monastères de Luçon,
de Saint-Michel et de Maillezais, porte la crosse comme l'évêque,
et la crosse est un sceptre temporel, en même temps qu'une houlette
pastorale.
Comme l'évêque, il exerce une autorité absolue
sur les populations urbaines 'et agricoles de ses domaines. Il possède,
comme les seigneurs laïques, tous les attributs de la souveraineté,
y compris le droit de guerre. L'évêque a sa maison fortifiée
dans sa cité épiscopale; l'abbaye est ceinte de murailles
et ,,flanquée de tours, et nous verrons Saint-Michel-en-l'Herm
résister souvent aux assauts furieux des vicomtes de Thouars
et des protestants. Tous deux ont des soldats pour les défendre
et de hauts protecteurs pour les aider.
Quelquefois, ils chaussent les éperons d'or, revêtent
là cotte de mailles, les gantelets de fer, le baudrier militaire,
déploient leur bannière seigneuriale pour marcher à
la tête de leurs vassaux. Mais les couvents, dont les domaines
sont- plus dispersés, sont en général obligés
de s'adresser à quelque puis saut seigneur qui. devient leur
gardien, leur avoué, leur vidame(1).
Le clergé est complètement engagé dans l'engrenage
du système féodal. Les évêques, et les abbés
ont des vassaux : ils ont des protecteurs ; ils reconnaissent même
des suzerains, bien qu'ils ne se soumettent pas à toutes les
formalités du pacte féodal, et qu'ils se refusent ordinairement
à placer, leurs mains consacrées par l'autel dans les
mains d'un souverain laïque. On peut donc dire que l'établissement
religieux et le fief sont les deux points auxquels se rattachent, pendant
une longue période du passé tous les faits intéressant
l'histoire de nos communes rurales (2).
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|
NOTES:
(1) C'est surtout à, cette époque que s'établit.,
pour les abbayes, l'usage do prendre pour protecteur, un des principaux
seigneurs du pays qui, sous le nom d'avoué (advocatus), devait
défendre les biens et les intérêts placés
sous son patronage et commander le contingent militaire des terres abbatiales.
- Nous avons sous les yeux de nombreuses chartes où des restitutions
eurent lieu sur la réclamation des avoués. Nous voyons
par exemple que,, sur la réclamation d'Aymeri, vicomte de Thouars
et avoué du monastère de Saint-Maixent, devant le comte
Ebles et ses optimates, Godebald et Ermembert, restituent à l'abbaye
les domaines qu'ils avaient usurpés. Cette charte porte la date
de l'an 903 et est signée du comte Ebles, du vicomte. Aymeri,
du vicomte Hidegard,. du vicomte Savary et de plusieurs autres. - Charte
inédite de lis, collection B, Fillon.
(2) Rambaud. - Histoire de la civilisation, T. I, pages ,139. 140 et
141.
|
DÉVELOPPEMENT DES ÉGLISES
DE CAMPAGNE
|
Beaucoup des églises de la Vendée, établies du
vie au XIIe siècle, se sont constituées de la manière
suivante. Le fondateur concédait le terrain et faisait bâtir
l'édifice par ses paysans (1) ; puis il y installait quelque
pauvre clerc à titre de curé, et lui attribuait une partie
de la dîme, jusqu'alors payée à l'évêque
ou au monastère. Les évêques se plaignaient ils
ne voyaient aucune compensation à cette perte, parce que l'usage
reconnaissait le fondateur ou ses héritiers comme e patrons "
de l'église nouvellement fondée, et les- autorisaient
à nommer le curé. L'évêque et les abbés
ne jouissaient de ce droit que dans le cas où eux-mêmes
étaient les fondateurs, ce qui se produisait souvent pour ces
derniers ; ainsi, l'abbé de Luçon nommait à soixante
ou quatre-vingts prieurés ou paroisses, celui de Maillezais à
vingt-six églises ou prieurés, situés aux diocèses
de Saintes, de Poitiers, de Bordeaux, etc. l'abbé de Saint-Michel-en-l'Herm
nommait à cent un bénéfices, dont 51 dans le diocèse
de Luçon, 32 dans le diocèse de Maillezais, 16 dans celui
de Saintes, et 2 dans celui de Mende (2). Il en était ainsi des
abbés de Talmont, de Nieuil, etc.
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|
NOTES:
(1) C'était le cas de l'église de la. Flocelière,
.fondée. par un laïque, peu de temps après l'an mille.
(2) Louis Brochet. - Histoire de l'abbaye de Saint-Michel-en-l'Herm.
Pièces annexes, II et III.
|
LA ROCHE-SUR-YON ET LE POIRÉ-SUR-VIE.
- DROITS
DU PRIEUR DE SAINT-LIENNE. - ÉCOLES
|
Le prieuré de Saint-Lienne (1), à la Roche-sur-Yon.,
jouissait de droits considérables, qui lui avaient été
accordés par des seigneurs, sous la condition que les religieux
entretiendraient dans leur église, des lampes devant le corps
de saint Lienne. On conserve. dans les archives de la préfecture
de la Vendée, plusieurs chartes originales de donations faites
à cette condition: en 1208, par Guillaume de Mauléon en
1218, par Brient de Montaigu; en 1228, par Hervé de Velluire;
en 1256 et 1257, par Maurice de Belleville, seigneur de Montaigu et
de la Garnache. Aimery de Thouars, seigneur, de la Roche-sur-Yon, donne,
en 1218, au prieuré de Saint-Lienne, l'usage dans la forêt
de La Roche-sur-Yon, et 60 boisseaux de rente à prendre sur la
terre de Château-Fromage, à la condition que l'un des religieux
lui servirait de chapelain. Parmi les droits du prieur de Saint-Lienne,
se trouvait celui de mettre dans la paroisse du Poiré, un homme
clerc et lettré pour tenir les écoles en icelle.
Vincent de Pont de Vie, seigneur de Pont de Vie, au Poiré, ayant
voulu contester ce droit au prieur de Saint-Lienne, il fut rendu, à
Paris, une sentence qui donnait main-levée des empêchements
de Vincent de Pont de Vie, et qui maintenait le prieur de Saint-Lienne
dans son droit (1).
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|
NOTES:
(1) Voir à ce sujet la très intéressante
brochure de l'abbé Rousseau, aumônier au' lycée
de la Roche-sur-Yon. - La Roche-sur-Yon, ses origines. - Saint-Lienne
et son prieuré.
(2) Thibaudeau. - Notes, T.I, page 448.
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USAGE DES BANCS DANS LES ÉGLISES
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Anciennement les laïques n'avaient point de bancs dans les églises,
pas même dans la nef. On n'y remarquait qu'un siège en
maçonnerie, régnant le long des murs des nefs et des transepts,
ainsi que les églises du Vieux Pouzauges et des Moutiersles-Mauxfaits
en offrent de curieux exemples (1). Plus tard, on se relâcha de
cette discipline, en faveur des personnages importants et des seigneurs
supérieurs, patrons ou fondateurs. Et enfin, par des concessions
successives à l'esprit du temps, l'usage en est devenu général.
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|
PUISSANCE DES ORDRES RELIGIEUX
AU XIIe SIÈCLE
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La puissance des ordres religieux au XIIe siècle avait permis
aux moines de s'attribuer la plus grande et la meilleure partie des
fonctions ecclésiastiques. Non seulement les anciens monastères
continuent à s'enrichir, comme celui, de Saint-Michel-en-l'Herm
par exemple, qui à cotte époque étendait sa domination
sur plus de soixante bénéfices, mais il s'en forme sans
cesse de nouveaux apportant constamment d'autres stimulants à
la, générosité des fidèles.
Les abbés relevant du Saint-Siège primaient les évêques
dans leur diocèse, et ,ce ne fut qu'après de nombreux,
désordres qu'Urbain III obligea, en 1185, les moines à
remettre à des prêtres séculiers la direction des
paroisses rurales. Alors, mais presque toujours à l'ombre des
abbayes, s'élevèrent ces belles églises romanes
dont plusieurs sont demeurées à peu près intactes
sur divers points de la Vendée. Dans plus de vingt paroisses
on peut admirer encore ces façades superbes sur lesquelles l'homme
a rendu vivantes ces milliers de statues, ces légions d'anges
et de démons, d'hommes et d'animaux qui se dressent à
toutes les issues et à toutes les cimes, comme si la pensée
ordonatrice de l'uvre avait voulu en faire l'arche universelle
" la grande nef du monde " a dit Henri Martin.
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|
NOTES:
(1) Lors des fouilles que nous fines exécuter en
1888, dans le ténement des Vieilles-Eglises de Bouillé-Courdault,
nous découvrîmes le long du transept de la vieille chapelle
du prieuré de Courdault, fondé en 1063, par Airaud et
sa femme, des sièges en calcaire, dégrossis, accolés
le long des murs.:- Revue du Bas-Poitou.
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ANCIENS PRIEURÉS
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Pour démontrer combien était irrésistible le mouvement
religieux qui, après l'an mille (1), poussait les populations
du Bas-Poitou à édifier des établissements monastiques,
nous croyons devoir, après avoir fait l'historique des grandes
abbayes, donner la nomenclature de quelques prieurés, fondés
à peu près à la même époque sur divers
points du territoire, en dehors de ceux dont nous avons déjà
parlé, notamment, à propos de SaintMichel-en-1'Herm.
En 1020, un prieuré relevant de l'abbaye de Saint-Nicolas d'Angers
est fondé à Mouchamps.
Vers 1040 est fondé, dans la paroisse du Bernard, le prieuré
de Fontaines, par un chevalier de Talmont, et donné au monas-tère
tourangeau de Marmoutier. Parmi les obligations imposées aux
religieux en retour: de cette donation, et outre l'obligation de fournir
au prieuré un certain nombre de religieux qui y continuassent
des prières pour le seigneur de Talmont et autres, nous voyons
une redevance de mille sèches qu'il n'est pas. rare de rencontrer
en d'autres chartres du moyen âge. Cet objet était d'autant
plus précieux à Marmoutier qu'on ne pouvait se l'y procurer
qu'avec beaucoup dé difficultés et 'de grands frais (2).
En 1063, Airaud et sa femme fondent le prieuré de Courdault,
qu'ils cèdent aux moines de Saint-Cyprien de Poitiers (3).
En 1090, Pierre 1er, seigneur de la Garnache fonde, à une lieue
de Sallertaine, le monastère` de La Lande-de-Beauchêne,
qu'il place sous la direction de l'abbesse de Fontevrault.
A la même époque, le prieuré de Saint-Laurent-sur-Sèvre
est fondé par les moines de Saint-Cyprien de Poitiers.
Ceux de Sigournais et de Puybelliard sont antérieurs à
l'an 1090, époque où Bernard, abbé de Marmoutier,
près de Tours, vient les visiter.
Le prieuré d'Aizenay fut fondé vers 1050, et celui de
SaintFlorent-des-Bois avant 1099.
Celui de Sainte-Flaive-des-Loups dépendait, avant 1109, de
l'abbaye de Montierneuf de Poitiers.
Le 6 mars 1190, au moment de partir pour la Terre Sainte, Richard
Cur de Lion, roi d'Angleterre et comte de Poitou, fonde, dans
la paroisse de Pissotte, le petit monastère des Gourfailles,
et lui concède divers domaines, notamment La Levrière
et le fief de la Vitrelle en Pissotte, le moulin de La Roche, la Bonnelle,
au-dessous de Haute-Roche, la Touche et le bourg de Sérigné
(4).
Le prieuré Saint-Nicolas de Fontenay est mentionné dans
un acte du 28 novembre 1195, et celui de Saint-Hilaire du même
lieu, dans un document du mois d'avril 1203.
En 1135, Rainier de Mouchamps et sa femme fondaient, dans la paroisse
de Vendrennes, le prieuré de Bois-Goyer.
Celui des Epesses était, au XIIe siècle, dépendant
de l'abbaye de Vézelay., au diocèse d'Autun.
L'aumônerie de Pouzauges était fondée, en 1202,
par Guillaume de Chantemerle, seigneur de Pareds.
La Vau-Dieu en Vouvent et Champorté de Pouzauges, sont aussi
du XIIIe siècle, ainsi que beaucoup d'autres prieurés,
dont l'énumération serait trop longue.
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NOTES:
(1) Une note détaillée des donations faites
depuis 942 jusqu'en 1154, au prieuré Notre-Dame de Fontenay,
dépendant de Luçon, permet de supposer que ce prieuré
fut fondé au plus tard dans le premier quart du Xe siècle
(Archives de Fontenay, T. I, page 17.
(2) Auber M. VII,, page 225.
(3) Louis Brochet. - L'ancien prieuré de Courdault.
(4) Archives de Fontenay, T. I, page 17.
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CARACTÈRE MALHEUREUX
DE CETTE ÉPOQUE AU
POINT DE VUE MORAL. - CRÉATION DU SACRÉ
COLLÈGE. - LA- PAPAUTÉ.
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Par un manque de logique absolu, les seigneurs croyaient trop souvent
pouvoir concilier des murs déplorables avec les oeuvres
les plus éclatantes du zèle chrétien. Vers la fin
du XIe siècle, on en était arrivé sur ce point
à ne plus avoir d'autres règles que son caprice; les maîtres
de la terre disposaient des lois comme d'une villa et d'un arrière-fief
; les règles les plus saintes du pacte social étaient
foulées aux pieds, dès lors qu'elles proscrivaient l'injustice
et les mauvaises murs. Les princes eux-mêmes ne respectaient
plus le mariage, et trop souvent le trône de France était
souillé de plusieurs adultères. Le peuple, constamment
foulé aux pieds, était arrivé à un degré
d'abaissement étonnant, car la loi évangélique
n'existait plus pour les puissants, et les malheurs auraient été
encore plus grands, sans la généreuse intervention de
l'Église, qui par ses conciles, par la, trêve de Dieu,
par l'action des papes et des évêques, s'interposait souvent
entre les bons et les méchants.
Le clergé n'échappait pas toujours lui-même à
ces désordres croissants. Plusieurs évêques, pourvus
de leurs bénéfices par la simonie, résistaient
au pape et s'appuyaient sur le roi de France, dont le libertinage soutenait
le leur. Des princes aux murs déplorables, des cadets de
famille, s'asseyaient sur des sièges épiscopaux, sources
pour eus de fortunes scandaleuses (1).
Les papes étaient souvent nommés par les empereurs d'Allemagne,
et la confusion du spirituel et du temporel parut trop souvent complète.
En présence de cette situation pleine d'abus et de dangers pour
l'église, un moine de Cluny, Hildebrand, devenu depuis pape sous
le nom de Grégoire VII, fit décréter par un concile
tenu à Rome en 1059, que l'élection des papes serait désormais
faite par les cardinaux; c'est ainsi que fut constitué le Sacré
Collège.
Plusieurs prêtres, dit le savant bénédictin Maunoir,
crurent se mettre à couvert des censures canoniques, en prenant
des concubines au lieu d'épouses, et l'on vit, jusqu'au milieu
du XIVe siècle, des femmes entretenues dans des maisons particulières
(2).
Les abbés établis pour garder " les murs de Jérusalem
", furent quelquefois les premiers à déserter leur
poste, et se répandirent dans le monde, à la cour, y dépensant
follement leur temporel. Ce fut alors que les abus et les désordres
entrèrent par toutes les portes, et on peut les compter, par
les sentences multiples dont les foudroya l'Église (3). L'histoire
ne doit certes pas être plus indulgente pour de tels scandales,
que ne le fut l'Église elle-même, que rie le furent, les
saint Bernard et les Grégoire, mais il ne faudrait cependant
pas, confondant l'usage et l'abus, condamner en thèse générale
les richesses et le pouvoir temporel du clergé. On peut affirmer,
textes en main que le clergé séculier bas-poitevin surtout,
dut à son autorité temporelle, de civiliser et d'améliorer
notre pays ; de maintenir souvent l'équilibre entre les seigneurs
et les vassaux, de protéger le faible contre le puissant, l'opprimé
contre l'oppresseur, de frayer à travers ses rangs ouverts à
tous une route au plus pauvre et au plus petit, vers les plus grandes
destinées.
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NOTES:
(1) Aubert, tome VII, pages 320 et 342.
Pitre-Chevalier. - Bretagne ancienne, page 207.
Plusieurs conciles se tinrent à ce sujet a Poitiers,
notamment l'un en 1078. Un de 1075 défendit sous les peines canoniques
les plus graves, de reconnaître la qualité d'évêque
ou d'abbé, à quiconque aurait reçu son évêché
ou son abbaye des mains d'un laïque.
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PUISSANCE DE LA PAPAUTÉ
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Bientôt la souveraineté du pape ne s'exerça plus
uniquement sur les choses spirituelles, mais aussi sur les choses temporelles.
Les papes prirent en main la direction des affaires de l'Europe,. intervinrent
au cours des guerres entre les prétendants, proclamèrent
la guerre sainte contre les Infidèles, et furent les maîtres
incontestés. Le baron cuirassé de fer, les empereurs et
les rois, les nations elles-mêmes tremblèrent devant les
légats vêtus de rouge, comme tremblaient autrefois les
souverains de l'Asie, devant les envoyés du peuple romain.
Les seigneurs bas-poitevins n'échappèrent point non
plus aux foudres pontificales, non plus qu'aux foudres épiscopales,
ainsi que nous le verrons dans un prochain chapitre.
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ÉGLISES DES XIe ET XIIe
SIÈCLES (1)
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Saint-Nicolas-de-Brem. - Porche construit au XIe siècle, avec
des débris peut-être carlovingiens.
Crypte de Curzon
(D'après une eau-forte de M. de Rochebrune)
Cryptes de Notre-Dame de Fontenay et de Curzon. - Même plan
par terre, même exécution : quatre colonnes isolées
au centre; bancs au pourtour (2) pris dans les premières assises
de la construction, - voûte d'arête plein cintre.
Cryptes du château de Tiffauges, avec colonnes paraissant remonter
à une haute antiquité.
Crypte des Essarts, fin du me, - débris de tombeau très
ancien.
Les églises du XIIe siècle sont fort nombreuses en Vendée,
surtout dans les environs de Fontenay. Les plus importantes de cette
époque sont :
L'Église abbatiale de Nieuil-sur-l'Autise, l'un des monuments
les plus complets et les mieux dessinés qui subsistent dans la
Vendée. Le cloître, qui est aujourd'hui la propriété
de Mme Sabouraud, est complètement conservé, ainsi que
la salle capitulaire dont la voûte a été refaite
en 1616, par Pierre Brisson. L'Église de Vouvent, dont nous donnons
une vue au chapitre XV, a pu être construite environ dans le même
temps quenelle de Nieuil:
Foussais. - Le portail seul est conservé : le rez-de-chaussée
bien entendu, car le pignon est du XVe siècle. Sur l'un des deux
grands bas-reliefs encastrés après coup (La Descente de
Croix), on voit cette curieuse inscription :
Eraudus Audebertus De Sancto
Joanne Angeriaco me fecit |
L'autre bas-relief représente le souper chez Simon, et le Noli
me tangere.
Maillé et Fontaines sont très altérés
dans leurs; façades, dont les sculptures ciselées sur
les archivoltes, portent des traces de peinture, ainsi que plusieurs
des -parties intérieures de ces monuments. On a trouvé
aussi des traces de ces peintures extérieures, à Saint-Michel-le-Cloucq.
Belleville. - L'ancienne église de Belleville présente,
pour ce qui en reste debout, tous les caractères de l'architecture
de la fin du XIIe ou du commencement du Xllle. On y voit encore l'un
des plus curieux et des plus rares monuments de l'époque de transition
du roman au gothique qu'on ait en Vendée. C'était primitivement
la chapelle d'un prieuré de chanoines réguliers de l'ordre
de saint Augustin, dépendant de l'abbaye de Nieuil-sur-l'Autise,
desservant aussi le château , dans l'enceinte duquel elle était
située . Elle devint plus tard l'église paroissiale .
- Bâtie probablement par Maurice II de Bellevllle, Seigneur de
Montaigu ou par Brient, son successeur.
Façade de l'ancienne Eglise de Belleville (Vendée)
D'après un dessin de M. Auguste Douillard de Montaigu.
Mailtezais, - A l'abbaye, le narthex est du e siècle l'église
paroissiale est tout entière du XIIe siècle(3).
Chalais. - La chapelle de Chalais, située non loin de Saint-Pierre-le-Vieux,
est de la fin du XIe et du commencement du XIIe siècle ; le chevet
en est bien conservé, ainsi que les cariatides qui supportent
l'entablement, et qui pour la plupart représentent l'emblême
de certains vices, ou des personnages dans des postures quelquefois
bizarres(4).
Benet a sa façade du XIIe (5), mais elle a été
renforcée au XVe par des contreforts qui la défigurent.
La Chapelle-Giraud, avec ses intéressants bas-reliefs, qui
rappellent ceux de Foussais ; Les Moutiers-les-Maux faits et Mareuil-sur-le-Lay,
sont trois églises remarquables par leurs nefs intérieures
; celle des Moutiers principalement, dont les trois nefs sont parfaitement
conservées, et " sans déformation, tout en granit,
donne le type le plus parfait des églises romanes ". - Mareuil
offre de belles arcatures dans les murs extérieurs de sa nef
et de l'abside.
Luçon. - Mentionnons encore le transept de Luçon, qui
offre de belles arcatures du XIIe siècle.
La Grainetière n'a plus que quelques parties de son abside
et de sa salle capitulaire (6), qui font juger de la beauté de
son ancienne architecture.. Toute la construction est eu granit, parfaitement
appareillée et très bien conçue comme plan. Malheureusement
ce superbe débris n'est pas même respecté par la
propriétaire actuelle, qui démolit les parements des murs,
afin de réparer les maisons de ses fermiers. Dans les environs
des Herbiers notamment, il n'est pas rare de voir des chapiteaux employés
aux usages les plus divers (7). - A citer encore pour mémoire
Saint-Nicolas-de-Brem. Saint-Jean-d'Orbestier, La Caillère, l'arcade
du transept de La Chaize-le-Vicomte, etc.
ABBAYE DE LA.GRAINETIERE SALLE CAPITULAIRE
D'après une eau-forte de M. de Rochebrune.
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NOTES:
(1) Les églises se multiplièrent alors avec
une profusion d'autant -plus grande qu'un certain nombre de celles qu'on
avait édifiées jusque-là, étant construites
en bois, avaient été dévorées parle feu
ou détruites par les envahisseurs. - C'est aussi du commencement
du XIe siècle, c'est-à-dire vers 1030, que date la merveilleuse
invention de la musique moderne, par Guy d'Arezzo.
(2) Nous en avons également trouvé dans
les ruines d'une église romane, sise au ténement de la
Vieille-Église de Courdault, dans le canton de Maillezais, ainsi
que nous l'avons dit plus haut.
(3) Voir le dessin, chapitre ix, page 193.
(4) Louis Brochet. - La Vieille Église de Chalais,
Vannes,. imprimerie Lafolye, 1890.
(5) Voir la photogravure, au chapitre 24.
(6) Elle est (lu XIVe siècle,
(7) Congrès archéologique. Extrait d'un
rapport ce M. de Rochebrune et Recherches personnelles.
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CARACTÈRES DES VIEILLES
ÉGLISES DU POITOU
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En Vendée comme ailleurs, et peut-être plus qu'ailleurs,
dit Jules Quicherat, les églises de campagne présentent,
dans leur ensemble, l'ouvrage de plusieurs siècles. En généralisant
les observations consignées par le regretté M. Léon
Audé, il semble que 'la première construction dit plus
grand nombre remonte aux approches de l'an 1100 (1). Le plus primitif
est celui d'une croix latine formée par un vaisseau unique de
cinq travées, par le milieu duquel passe un court transept.
Le chevet,. qui est plat, dévie sensiblement hors de l'axe
de l'édifice. Ces dispositions ont été altérées
au XIVe et au XVe siècle, par l'addition de collatéraux,
tantôt à la nef, tantôt au chur, d'autres fois
dans toute la longueur du vaisseau.
Au XVe siècle appartiennent aussi des garnitures de mâchicoulis
et de breteches construites par dehors pour convertir l'église
en forteresse, ainsi que cela se voit encore aujourd'hui au Boupère
(2).
D'ailleurs, au moyen âge, l'architecture religieuse, en Bas-Poitou
surtout, prime généralement toutes les autres : les constructions
civiles même, et jusqu'aux édifices militaires, se conforment
en plus d'un point, surtout dans l'ornementation, au style adopté
par la religion. En effet, le moyen âge est la période
religieuse, par excellence, de l'humanité : elle a cumulé
l'office de la patrie, de la nation et de la cité : elle règle
la vie
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NOTES:
(1) Trois ans après l'an mille, -date assignée
par la superstition, b la. fin du monde, un vieil historien, Raoul Glaber,
nous apprend qu'il se manifesta dans toutes les Gaules une réaction
d'espoir et de joie qui lit sortir de terre des milliers d'églises.
Les anciennes furent démolies, quoi, qu'elles pussent servir
encore; on avait trouvé mieux.
(2) Il convient d'ajouter que des réparations
considérables et sans caractère fixe, ont suivi les guerres
de religion
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