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CHAPITRE XIV
DE L’ENVAHISSEMENT DU POITOU PAR SAINT LOUIS (1242)
A LA GUERRE DE CENT ANS
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Saint Louis en Poitou. Sièges de Fontenay-Rohan, Béruges,
Fontenay-le-Comte, Mervent et Vouvent (1242).
Excommunication de Geoffroy, dit la Grand’Dent (1230). Toute puissance
des papes.
Concession d’un droit aux frères de l’Aumônerie
de Fontenay. Excommunication contre les Seigneurs de Mouchamps et de Puybelliard.
La légende de Mélusine.
Fontenay réuni aux domaines d’Alphonse, - Hommage
de divers seigneurs, - Gouvernement Paternel d’Alphonse, - Sa mort (1271),
- Philippe le Hardi en Bas-Poitou et à Fontenay (1272).
Inondation à Fontenay. Construction de l’Acheneau
neuf. Erection de Fontenay en siège Royal.
Le Grand Gauthier (1307).
Erection de Luçon et de Maillezais en évêchés (1317).
Mort de Philippe le Long, - Règlements de police (1343).
Etat littéraire, scientifique et social du Poitou au commencement du
XIV°siècle.
Robert Girard, moine de Saint-Michel-en-l’Herm.
Pierre de Bressuire, dit Berchorius. Marchebuse. Pierre Bugon, Béatrix
d’Agout.
Spécimen de la langue et de l’orthographe française
en Bas-Poitou au commencement du XIV° siècle (29 octobre 1324).
Mode de succession noble existant entre la Dive et la Sèvre, la Sèvre
et la mer.
Canton des Essarts, etc. Le mariage de la fille aînée du seigneur
en 1340.
Commerce, - Industrie, - Etat social à Fontenay au commencement du XIV°
siècle.
Etat social général en Bas-Poitou. Les roturiers eux aussi peuvent
acquérir.
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SAINT LOUIS -EN POITOU. - SIÈGE DE FRONTENAY-
ROHAN, BÉRUGES,
FONTENAY-LE-COMTE, MERVENT ET VOUVENT.
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Hugues X, comte; de la Marche, seigneur de Lusignan, obéissant
aux impulsions dosa femme Isabelle, qui s'appelait orgueilleusement
Comtesse et Reine, parce qu'avant d'épouser le comte de la Marche
et d'Angoulême, elle avait appartenu en premières noces
à Jean-Sans-Terre (1); et qui ne pouvait souffrir la pensée
que son mari fut soumis à personne, résolut de profiter
de la première occasion de se soulever contre la suzerainèté
d'Alphonse et du roi son frère. De son côté ce dernier
avait atteint, depuis le 23 avril 1236, sa majorité, et s'était
déjà montré plein de prudence et de fermeté.
- Alphonse, quoique plus jeune de quatre ou' cinq ans, se sentait fort
d'un tel frère. Il habitait généralement Poitiers
et s'y trouvait, en 1242, lorsque Hugues, toujours poussé par
sa femme, qui ne lui pardonnait pas d'avoir reconnu en lui un maître,
vint jusque dans le palais du comte lui déclarer insolemment
qu'il ne le; reconnaissait plus comme son suzerain, pas plus que le,
roi son frère, et qu'entre eux et lui, il en appelait désormais
aux armes. Après ces paroles de colère, il disparaît,
rejoint ses gens, met le feu à la maison qu'il avait habitée
à Poitiers, et repart pour Lusignan. C'était une guerre
déclarée; Louis ne la refusa point. Il passe en Poitou,
ravage les terres du comte de la Marche, et prend ses meilleures, places.
Hugues appelle à son secours son beaufrère Henri III,
qui débarque à Royan et s'avance sur les rives de la Charente
(2).
Louis disposait d'une flotte de quatre-vingts navires équipés
à la Rochelle, et de trente-mille hommes, Il marche à
la rencontre des révoltés et les trouve rangés
en bataille sur les bords du fleuve. Le monarque anglais s'était
emparé du pont de Taillehourg ; il fallait enlever le poste ou
traverser la Charente à la nage et sacrifier des milliers de
soldats. Louis, suivi seulement de finit chevaliers, s'avance sur le
pont, bravant les coups de l'ennemi. L'armée s'élance
sur le chemin qu'avait frayé l'épée du roi et repousse
les Anglais jusque sous les murs de Saintes. Poursuivant ses exploits,
il ruine-les domaines seigneuriaux des Lusignan, détruit ce qui
leur appartenait aux environs de, Poitiers, rase le château de
Béruges et de. Montreuil-Bonnin, assiège et prend Frontenay-Rohan-Rohan,
où s'était enfermé le ameux Geoffroy la Grand'Dent,
terreur des moines de Maillezais et des environs et qui, quelque temps
auparavant, avait pillé et détruit le château de
l'Hermenault. Avant ce dernier assaut où fut blessé Alphonse,
Geoffroy déserte son poste et court se réfugier à
Fontenay.
La terreur qu'inspirait le roi était telle, qu'après
trois jours d'assaut, Fontenay, défendu par Geoffroy la Grand'Dent,
lui ouvre ses portes (26 mai) (3). Mervent est pris également
(4), et le roi le donne à Maurice Gallereau, avec la terre des
Ouillères, confisquée sur Geoffroy, et lui promet en même
temps de lui livrer en échange, s'il les retirait, Monzay (Deux-Sèvres),
et Escoué, en la paroisse de Montreuil (5). Quatre jours après,
Vouvent avait le même sort que Mervent (6).
La réconciliation dut s'opérer à quelques mois
de là, et Geoffroy rentrer en grâce avec son suzerain,
car nous le voyons, en avril 1213, rendre foi et hommage à Alphonse,
pour les châteaux de Mervent et de Vouvent, et les fiefs de Fontenay
et de Soubise (7).
Plus tard, Mervent et Vouvent passèrent aux Parthenay l'Archevesque
et aux de Rohan, qui ont produit une foule de guerriers fameux et de
femmes célèbres.
Une trêve de cinq ans fut conclue entre les deux rois, et un
des résultats de cette guerre fut que Saint Louis ordonna aux
seigneurs poitevins qui possédaient des fiefs en même temps
en France et en Angleterre, d'avoir à choisir entre les deux
pays; un même vassal ne pouvant avoir à la fois deux suzerains.
Les seigneurs s'y conformèrent, et désormais aucun de
ceux du Poitou ne dépendit d'aucun seigneur d'outre-mer (Mathieu
Paris, ad anno 124? (8).
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NOTES:
(1) Toutes les chroniques.
(2) D'après une enquête de l'an 1255, Thibault-Chastaigner,
seigneur de la Meilleraye, de Réaurnur, etc., et ses deux fils,
auteurs de la branche des seigneurs du Breuil, de Challans, la Jarrie
et Saint-Fulgent, embrassèrent le parti de Saint Louis et du
comte Alphonse, son frère, dans la guerre que ces princes soutinrent,
en 1241, contre Hugues, de Lusignan, au sujet de l'investiture du Poitou
(BeauchetFilteau, page 622).
(3) L'armée de Saint Louis campait dans le champ
de foire actuel,
(4) On montre encore, à gauche du vieux château,
les rochers où, selon la tradition, aurait campé le roi
de France.
(5) archives de Fontenay. T. I, page 95.
(6) Le château de Pouzauges était également
remis à Saint Louis, qui y mettait une garnison, sous le commandement
du sire de Châteaubriant, qui promettait de le remettre au roi
à, première réquisition. (Archives de Fontenay,
T. I, page 97 - mai 1242.) Les mômes archives font connaître
que Saint Louis était a Vouvent le 30 mai et le 6 juin.
(7) Archives de Fontenay, T. 7, page 103. - Original,
- Archives nationales, carton J, 490. - La paix avait été
signée avec Hugues de Lusignan, devant Pons, au mois d'août
1242.
(8) En 1249, les Juifs étaient chassés du
Poitou, et pendant la cinquième croisade, notre pays fut administré
par Blanche de Castille, aidée de Philippe, trésorier
de Saint-Hilaire, maître Renaud, homme de loi, et Guillaume d'Esnancourt
(Antiquaires de l'Ouest, III, 407 et suivantes).
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EXCOMMUNICATION DE GEOFFROY
DE LUSIGNAN
DIT LA GRAND' DENT.
TOUTE PUISSANCE DES PAPES.
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Geoffroy Ier, frère de Guy de Lusignan, roi de Jérusalem,
après s'être couvert de gloire devant Saint-Jean-d'Acre,
en 1180, était revenu avec le titre de seigneur de Jaffa et de
Césarée en Poitou, où il entretenait une suite
nombreuse de routiers, avec lesquels (chose inconcevable), il se ruait
de préférence sur les abbayes et les prieurés.
Maillezais était surtout le monastère, sur lequel il s'acharnait
le plus volontiers, et, sa mort avait été accueillie avec
un vrai plaisir.
Son fils Geoffroy II, dit la Grand'Dent (1), devait marcher sur ses
traces et dépasser même les horreurs commises par son père.
Pendant de longues années, l'abbaye de Maillezais est pressurée
et ses biens ravagés : l'abbé Guillaume III, surnommé
le Fort, se décide à mettre fin à la persécution
et il déclare en personne, au, terrible baron, qu'il s'opposerait
énergiquement à la continuation de ses violences, mais
rien n'y fait, Guillaume aggrave ses exactions, poursuit de sa haine
tous les autres monastères, notamment celui de l'Absie. L'abbé
.Guillaume se rend à Rome, et obtient du Pape Honorius III, que
le spoliateur serait puni des peines canoniques, mais à son retour
il meurt. Geoffroy envahit de nouveau le monastère; de Maillezais,
et le pille. Les moines, sous la conduite de leur nouvel abbé
Raynaud ou Baynald, abandonnent l'abbaye, et à travers plusieurs
lieues de marais, arrivent à Niort où ils reçoivent
un asile.
Le châtiment ne devait pas se faire attendre plus longtemps ;
sur les réclamations de Raynald, Grégoire IX lance contre
le puissant seigneur une bulle d'excommunication qui le met en interdit.
Quand Geoffroy paraît, les flambeaux s'éteignent, le service
divin cesse, la foule s'écoule, les temples, sont fermés...
A cette époque de foi profonde, l'interdit était une
arme redoutable entre les mains des papes, et Geoffroy, obligé
comme les plus puissants rois du moyen âge, de s'humilier devant
la tiare pontificale, signe à Spolète un traité,
en vertu duquel l'île de Maillezais tout entière, Souil
et Chalais, sont libres de toutes redevances, coutumes, juridictions
auxquelles il prétendait. Ce traité concède aussi
aux Frères de l'Aumônerie, près Fontenay, un droit
de chauffage dans la forêt de Mervent. L'excommunication est levée
(1 juillet 1232).
Mais préalablement à son départ pour Rome, il
avait dû prouver son repentir et réparer les maux qu'il
avait causés. C'est sans doute; dans ce dessein que fut écrite
la charte traduite par Apollinaire Briquet, et dont nous donnons un
extrait :
" A tous ceux qui ces présentes lettres verront, Geoffroy
de Leziniem, vicomte de Châtellerault, seigneur de Volvent et
Mayrevant, salut éternel. Vous saurez que, étant sur le
point de prendre le chemin de la cour de Rome, pour terminer mes différents
avec l'église de Maillezais, j'ai voulu, avant mon départ,
satisfaire, autant qu'il en est. en mon pouvoir, tous: ceux qui ont
à se plaindre de moi, et surtout, les hommes qui professent la
vie religieuse; ce qu'ayant entendu Geiffroi, abbé de l'Absie,
il est venu près de moi et m'a demandé réparation
des dommages, pertes et injures que moi et mon père avons fait
éprouver au monastere et aux moines de l'Absie. J'ai appris par
le témoignage de gens (lignes de foi, que ces plaintes étaient
justes... Alors pour le remède de mon âme et le salut de
mes parents... j'ai satisfait... 1232 (2). "
(1) Geoffroy était ainsi nommé parce
qu'il avait une dent si. longue, qu'elle sortait de sa bouche. - Une
médaille singulière qui, d'après Millin (Voyage
dans les départements du midi de la France) n'aurait pas été
connue du savant Mazet, ancien bénédictin, représente
d'un côté le comte Geoffroy II, coiffé d'un casque
singulier attaché avec une mentonnière ; une grande dent
sort (le sa bouche et on lit autour de a pièce : Godefridus de
Lusinem. Il y a sur le revers de la médaille, la tête d'un
animal monstrueux. Tentzel, qui, le premier a décrit cette médaille,
dans un ouvrage extrêmement rare, dit que l'histoire de Geoffroy,
a Grand' Dent, a été traduite du français en italien
et de l'italien en allemand en 1456, par les ordres du margrave Rodolphe
de Hochberg. On y lit que deux chevaliers aragonais vinrent inviter
le brave Geoffroy a, aller combattre un monstre, gardien d'un trésor
qui avait été amassé par quelqu'un de sa maison.
Quoique cet animal eût déjà dévoré
un chevalier anglais qui vouait, l'attaquer, Geoffroy n'hésita
pas de tenter l'aventure, nais il mourut de maladie, avant d'avoir pu
joindre le monstre. Cette médaille aura été frappée
dans le XVe siècle par quelque seigneur de la maison de Lusignan,
qui a voulu honorer a mémoire d'un de ses, plus illustres ancêtres.
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NOTES:
La tête du monstre est celle de celui que Geoffroy
aurait certainement vaincu, si la mort ne l'avait prévenu.
(2) Histoire du Poitou, - Prières justificatives,
t. n, page 483.
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CONCESSION D'UN DROIT AUX
FRÈRES DE
L'AUMONERIE DE FONTENAY,
AUTRES EXCOMMUNICATIONS,
EXCOMMUNICATIONS DIVERSES,
MOUCHAMPS - EXCOMMUNICATION
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Deux ans après, le terrible Geoffroy concédait aux
frères de Saint-Lazare de l'Aumônerie de Fontenay, le droit
de prendre dans la forêt de Mervent, le bois nécessaire
à leur chauffage (1) Geoffroy mourut sans postérité
en 1248, et fut inhumé dans l'église de Vouvent, où
il avait fondé une chapelle (2).
AUTRES EXCOMMUNICATIONS
Avant Geoffroy la Grand'Dent, les seigneurs laïques de Mouchamps
et de Puybelliard, avaient été frappés des mêmes
peines canoniques que lui, et comme lui, avaient du céder devant
cette force morale, qui au moyen âge surtout fut redoutable, et
souvent aussi, disons-le, utile.
EXCOMMUNICATIONS DIVERSES
Le Puybelliard. Le prieuré de Puybelliard, dépendant
de la célèbre abbaye de Marmoutiers de Tours, avait un
dangereux voisin en la personne du vicomte de Thouars, le plus puissant
vassal du comte de Poitiers. Il n'y avait pas de vexations qu'il n'essayât
sur les pauvres moines, saisissant leurs revenus, pillant leurs terres,
enlevant leurs serfs, s'appropriant les blés de leurs semis.
Mais un jour de l'année 1186, une feuille de parchemin expédiée
de Vérone et portant le sceau du pape Urbain III, fit tomber
tout à coup les prétentions tyranniques du seigneur vicomte.
C'était une bulle du serviteur des serviteurs de .Dieu à
ses chers fils les archiprêtres de Tours et d'Amboise. Voici quelques
passages de cette bulle : " Des excès de cette nature ne
devant pas être encouragés par une coupable négligence,
nous mandons à votre discrétion par les présentes
lettres apostoliques, d'admonester très formellement ledit vicomte,
pour qu'il restitue ce qu'il a pris, indemnise convenablement les religieux
et leurs sujets du tort et des injures qu'il leur a faits, et se désiste
dorénavant de tout excès à-leur égard. S'il
prétend n'avoir agi qu'en vertu de son droit, examinez l'affaire
et jugezlà de suite, et dans le cas où il refuserait,
par hasard, de se soumettre à votre admonestation ou sentence,
sans vous laisser arrêter par aucun appel formé par ledit
vicomte, enchaînez-le dans les liens de l'excommunication et traitez-le
en excommunié, défendant à qui que ce soit de l'approcher,
jusqu'à ce qu'il vous ait donné pleine satisfaction "
(3).
MOUCHAMPS. - EXCOMMUNICATION
En 1154, le seigneur de Mouchamps, Airaud, établit dans
son château situé près de l'église, et sur
le sommet du rocher qui domine la pittoresque vallée du Petit-Lay,
un pressoir auquel il veut contraindre tous ceux qui possèdent
des vignes à apporter leurs vendanges. C'était pour lui
un facile moyen de remplir son. cellier des meilleurs vins du cru, sans
qu'il lui en contât beaucoup. Les manants courbèrent la
tête, mais les moines de la Grenetière, par l'organe de
Thomas, leur abbé, réclamèrent près de l'évêque
de Poitiers Calon ? qui fit cesser, par une bonne excommunication, les
exactions; du seigneur de Mouchamps (4).
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NOTES:
(1) L. Brochet. - Voir la charte dans l'Histoire
de la forêt de Vouvent page 29
(2) Geoffroy, , la Grand'Dent, serait le fils d'Eustaehe
Chabot, fille de Thibaud-Chabot III, sire de Vouvent, de Rocheservièré
et de la Grève, poétisée sous le noue de fée
Mélusine.
(3) Extrait d'un travail de M. Paul Marchegay.
(4) C'est dans les vignobles de la Tranchelandière
et de Grandry, que les moines récoltaient leurs meilleurs vins.
-De a charte latine analysée par M. Marchegay, il résulte
qu'Airaud et l'abbé de la Grenetière comparurent devant
l'évêque de Poitiers à Pareds, aujourd'hui simple
village de a commune de a Jaudonnière. (Annuaire de la Société
d'émulation de la Vendée, année 1857.)
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LA LÉGENDE DE MÉLUSINE
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Les érudits veulent que les châteaux-forts de Mervent,
de Pouzauges, de Tiffauges, de Châteaumur et de Vouvent aient
été bâtis vers le XIIe siècle, mais les paysans
vendéens ont oublié l'histoire ; ils ne connaissent que
la légende et la racontent volontiers aux voyageurs.
A une certaine époque, ces châteaux s'élevèrent
au-dessus du sol, presque en même temps et avec une rapidité
merveilleuse, saris le secours d'aucun ouvrier. Quelle était
la main qui dressait ainsi, et comme par enchantement, ces donjons crénelés
et redoutables, derrière lesquels devaient s'abriter de puissants
seigneurs. Personne ne le savait : le travail se faisait la nuit, Un
soir, un homme de Pouzauges, pour découvrir le mystère,
se cacha dans les broussailles, au pied du bois de la Folie, non loin
de- la' tour carrée à trois étages qui, quoique
démantelée, brave encore impunément la fureur des
vents et des intempéries. A minuit sonnant, une fée, blanche
apparition des nuits, parut : c'était la Mère Lusine qui,
seule,, sans secours humain, montait pierres et ciment et parachevait
ce monument gigantesque. Honteuse d'être découverte, elle
s'enfuit en criant :
Poudauq, Tiffaug, Mervent, Châteaumur et Vouvent, irant chaqu'
an, j' le jure, d en pierre en périssant.
Depuis lors une pierre se détache chaque année de ces
cinq forteresses. Les corneilles, voltigeant le jour sur les ruines,
croassent et se lamentent sur cette malheureuse destinée, tandis
que des bêtes fantastiques et des lutins narquois font des niches
aux hommes qui se hasardent à visiter les ruines au clair de
lune.
Mélusine était une princesse, fille d'un roi d'Albanie
et d'une fée. Elle habitait au fond de la forêt du Colombier,
près Lusignan. Un jour que Raymondin, comte de Poitiers, chassait
à courre à travers bois, il perdit la chasse et s'égara
dans les fourrés. La nuit tombait, et le comte était fort
en peine de retrouver son chemin, quand il arriva dans une clairière
où une fontaine bouillonnait au fond d'une vasque de pierre.
A la clarté naissante de la lune, il aperçut tout à
coup une bande de jeunes filles, nues jusqu'à mi-corps, qui prenaient
leurs ébats dans l'eau limpide et, parmi elles, une jeune dame
d'une surprenante 'beauté : ses magnifiques cheveux blonds ruisselaient
sur ses blanches épaules et elle les peignait avec un peigne
d'or. Cette princesse accueillit grès gracieusement Raymondin.
Elle lui fil servir à souper par ses dames d'honneur et, au dessert,
sous la bleuâtre lumière de la lune, ils fleuretèrent
doucement ensemble. Raymondin; très amoureux, demanda la main
de la dame, qui n'était autre que Mélusine, et elle la
lui accorda à une seule condition ; c'était que tous les
samedis, il la laisserait absolument libre de s'enfermer chez elle et
ne chercherait jamais à savoir ce qu'elle y ferait. Comme les
gens passionnément épris, le comte promit tout ce qu'on
voulait et, peu de jours après, les noces furent célébrées
en grande pompe à Poitiers, bien que la famille de Raymondin
vit, sans enthousiasme,- s'installer dans le palais du comte très
chrétien' cette étrange épousée, trouvée
au fond d'un bois.
La tour Mélusine à Vouvent
(Cliché d M. Rabaud)
Comme cadeau nuptial, Mélusine construisit à Lusignan
un château princier, dont les murailles, comme à Tiffauges,
Pouzauges et Vouvent. s'élevèrent comme par enchantement.
Les jeunes mariés vinrent y habiter, et au bout d'un an, la princesse
mit au monde un fils qui n'avait qu'une dent, mais une dent phénoménale,
qui lui valut le nom de Geoffroy à la grand'dent. L'année
d'après nouvelle grossesse cette fois, Mélusine accoucha
d'un garçon qui n'avait qu'un il au milieu au milieu du
front. Plus tard, un autre garçon naquit, et ce fut encore un
être exceptionnel, car il n'avait qu'une oreille. Tout en adorant
sa femme, Raymondin commençait à s'effrayer de cette succession
de monstres, et se trouvait fort mortifié, lorsque les gens de
son entourage lui adressaient d'hypocrites compliments de condoléance.
Au quatrième enfant phénomène., il confia sa tristesse
à son frère cadet. Celui-ci lui dit qu'il y avait là-dessous
quelque diablerie, et demanda à son aîné si, par
hasard, sa femme n'était pas une sorcière. Raymondin alors,
avoua que, tous les samedis, la princesse s'enfermait dans sa chambre
pendant vingt-quatre heures, et qu'on ne savait trop à quoi elle
employait son temps.
" Il faut le savoir, insinua l'autre, c'est un cas de conscience;
elle s'y livre sans doute à quelques maléfices, et de
là viennent tous tes malheurs. " Le samedi suivant, les
deux frères se dirigèrent à pas de velours vers
la chambre de Mélusine; Raymondin regarda par le trou de la serrure
et ce qu'il vit le stupéfia grandement. - Nue et blanche comme
un lis, Mélusine se baignait dans un vaste réservoir;
elle chantait en peignant .ses admirables cheveux d'or, et le comte
découvrit que son corps se terminait eu queue de serpent. C'était
pour que personne ne se doutât de cette cruelle transformation
hebdomadaire. que la fée se claquemurait tous les samedis dans
son boudoir. " L'heureux homme, s'écriait à ce propos
ce pince-sans-rire de Henri Heine, l'heureux mari, dont la femme n'était
serpent qu'à moitié ! "
Raymondin n'apprécia pas ce bonheur, car d'un furieux coup d'épaule
il enfonça la porte de la chambre. A l'aspect de ce mari courroucé,
Mélusine poussa un cri de désespoir, s'évanouit
dans l'air et, depuis ce temps-là, on ne la revit plus. Parfois,
cependant, les nuits de lune, on l'entendait voler et chanter plaintivement
autour du château qu'elle avait bâti ; même, elle
pénétrait dans le dortoir des enfants et les berçait
doucement dans leur lit (1).
La légende veut qu'elle soit aussi revenue dans ses autres châteaux,
mais seulement dans des occasions importantes et pour annoncer, par
des cris effroyables, de terribles calamités, principalement
lorsque quelques seigneurs de la maison de Lusignan, ou quelqu'un des
rois de France étaient menacés de la mort. On prétend
l'avoir entendue avant celle des rois Henri IV et Louis XIII, et les
mères ne cessent encore de répéter ces récits
aux petits enfants qui pâlissent d'effroi en les écoutant.
Quel beau sujet de féerie fournirait la légende si poétique
de .Mélusine.
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NOTES:
(1) Au pays de Mélusine, par André
Theuriet. Le Journal du mercredi 11 mars 1896.
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FONTENAY RÉUNI AU
DOMAINE D'ALPHONSE.
HOMMAGE DE DIVERS SEIGNEURS.
GOUVERNEMENT PATERNEL D'ALPHONSE. - SA MORT.
PHILIPPE LE HARDI EN BAS-POITOU (1272).
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Louis IX réunit Fontenay aux autres domaines d'Alphonse,
son frère. Ce changement de maître (1) donna à la
ville une importance qu'elle avait été jusque-là
loin d'atteindre. Seule place un peu forte des possessions privées
du frère du roi, dans cette partie du Poitou, elle devint par
cela même le centre féodal de la contrée. Aussi,
sépara-t-on de la mouvance de la tour de Maubergeon de Poitiers
pour les joindre à la sienne, Talmond, Olonne, Curzon, Champagné-les-Marais,
Luçon, le Petit-château de Vouvent et Coulonges-les-Royaux.
On y établit un sénéchal ayant droit de juridiction
supérieure sur tous ces fiefs, et elle s'appela désormais
Fontenay-le-Comte (Fontiniacum comiti.
La Fontenelle avait recueilli un fragment d'inscription placé
autrefois dans l'un des murs du palais de, justice, et qui avait, appartenu
à l'édifice bâti sous Alphonse; pour y tenir les
assises. Le nom d'un sénéchal ou de. tout autre officier.
du comte ayant fait exécuter les travaux,, remplissait, le vide
laissé par la cassure (2). (N. . . du comte de Poitiers et de
Toulouse m'a fait faire).
Alphonse traita en souverain juste et équitable tousses sujets,
et en particulier les bourgeois, de la nouvelle capitale du Bas-Poitou,
augmenta leurs privilèges et leur permit d'entrer dans cette
voie de prospérité qui, malgré bien des, entraves
dont. nous parlerons plus tard, ne s'arrêta qu'au moment de la
révocation de l'édit de Nantes.
Avant de partir pour la Terre Sainte en 1268, il rédigea, ainsi
que sa femme le monument de ses dernières volontés. Par
cet acte ils affranchirent leurs serfs et leurs enfants quels qu'ils
fussent (3).
Alphonse étant mort le 21 août 1271 (4), au château
de Cometo en Toscane, le Poitou fit retour au roi qui le conserva pendant
quarante années consécutives.
Le neveu d'Alphonse, Philippe le Hardi, vint en Poitou l'année
suivante (5), et notamment à Fontenay-le-Confite, où il
confirma les privilèges accordés par saint Louis, à
la ville de Niort. En revanche, il se montra peu généreux
pour la ville qui lui donnait l'hospitalité. Il octroya pourtant,
en 1282, à JeanBloynyen, bourgeois de Fontenay, " qui tenait
du roi à foy et homage, le criage et coustume du vin vendu à
détail en la ville dudit Fontenay, elle droit de l'avoine demoura
au roy, etc.." Cette charte contenue en partie dans l'Inventaire
des titres de Notre-. Dame, établit que c'est à partir
de 1282, que la ville perçut à son bénéfice
les droits de vente en détail du vin, qui jusque-là avaient
toujours appartenu aux seigneurs ; elle complota la concession faite
au mois de mars 1268 (6) par Alphonse, concédant aux habitants
le banc ou estal du vin qui se vendait en détail. En 1269 il
avait fait don de 40 sols à la Léproserie de Saint-Thomas,
et de pareille somme à l'Hôtel-Dieu, fondé vers
le commencement du XIIIe siècle, dans les Loges (7).
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NOTES:
(1) Au mois de février 1246, Raoul de Mauléon
cédait à Alphonse, tous les droits qu'il avait sur le
domaine de Fontenay, et au mois de mars 1248, Alphonse donnait son acquiescement
à l'achat par Sebrand-Chabot de l'Herbergement de l'Alberterie,
sis au faubourg des Loges, à lui vendu par Girard-Voussard, Au
mois de juillet 1253, Aimery de Thouars, Aimery de Rochechouart et Geoffroy
de Tonnay, agissant au nom de ses filles, se reconnaissaient les hommes
liges d'Alphonse, pour les terres provenant de a succession de Raoul
de Mauléon, à ceux abandonnées par le dit comte.
- Archives de Fontenay, Tome i, pages 111-117-119.
(2) Peut-être était ce l'un de ceux de Adam
Pannetier ou de Renaud Guionnet, qui furent sénéchaux
d'Alphonse à Fontenay, de 1241 à 1258. On fit des travaux
eu local de a juridiction en 1243. - Fillon. Poitou-Vendée, Fontenay,
page 29.
(3) Avant de partir pour a Palestine, Alphonse avait écrit
trois lettres au sénéchal du Poitou, pour lui demander
de réunir, les fonds nécessaires à son voyage.
Les lettres. datées de 1269, septembre 1269 et 28 janvier 1270,
se trouvent aux Archives de Fontenay, T. I, pages 165, 171 et 175.
(4) Antérieurement à a mort de son oncle,
et a la date du 20 mars 1271, Philippe le Hardi avait enjoint au sénéchal
de 'Poitiers, de vider un différend survenu entre Thibaut-Chasteigner
et Guillaume Incard, au sujet du cimetière de saint-Pierre. -
Archives de la seigneurie de Saint-Michel-le-Cloucq, Fontenay, T. I,
page 183.
(5) En 1371-1272, Guillaume de Parthenay l'Archevêque,
seigneur (le Parthenay, Mervent, Soubise, Mouchamps, etc., accompagna
le roi- Philippe le Hardi, avec cinq chevaliers, contre le comte de
Foix, bien qu'il fut mineur, et eût pu refuser le service qu'on
réclamait de lui. Il mourut vers 1308, en désignant sa
sépulture dans l'abbaye de a Grenetière, qu'il affectionnait
beaucoup. - Benj.-Fillon, page 495.
(6) En cette même année 1268, le seigneur
de la Chaize-le-Vicomte, Geoffroy de Châteaubriant, ayant envahi
les terres de Belleville, fut de ce chef, condamné à une
amende de 2.800 livres.
(7) Les archives de Fontenay, T. I, pages 189 à
194, contiennent les noms des habitants de Fontenay, qui s'étaient
cotisés pour aider à la reconstruction de l'Hôtel-Dieu
de Fontenay, sous le règne de Philippe le Hardi, ce qui indique
que les travaux n'étaient pas encore terminés.
|
INONDATION A FONTENAY.
- CONSTRUCTION
DE L'ACHENEAU NEUF.
]RECTION DE FONTENAY EN SIÈGE ROYAL.
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Ce fut sous le règne de ce prince, que se passa l'événement
suivant, raconté par la Chronique du Langon. Le Both de l'Anglée
creusé pour dessécher les prairies de Velluire n'avait
qu'une levée d'une grande épaisseur, assez haute pour
résister aux eaux de la Vendée. Presque en même
temps, une autre levée fut construite pour se rendre à
Notre-Dame de Coussaye, qui se trouve aujourd'hui isolée au milieu
de la plaine, près du Poiré-de-Velluire. Les eaux de la
Vendée, trop resserrées pour pouvoir passer facilement
sous les arcades du pont de la Craverne, refluèrent vers Fontenay
et inondèrent les Loges qui étaient déjà
le faubourg industriel de la ville. A. la suite d'une crue exceptionnelle,
et pour éviter leur ruine, les Fontenaisiens s'assemblèrent,
et la nuit, allèrent secrètement rompre les chaussées
du Pontreau et du Both de l'Anglée. Cet événement
décida de la construction du canal, dit de l'Acheneau neuf ou
canal du Roi, allant du Both de l'Anglée à Luçon,
et qui fut terminé vers 1283 (1).
Cette même année (1283), un arrêt du Parlement maintenait
le roi de France en possession des comtés de Poitou et d'Auverge,
réclamés par Charles de Sicile, frère de saint
Louis et d'Alphonse (2).
Son successeur, Philippe le Bel, érigea Fontenay en siège
royal à la fin du XIIIe siècle, puis plus tard, en décembre
1311 (3) le donna avec le Poitou à son fils puisé Philippe
le Long. Celuici étant devenu roi en 1316, en fit présent
avec Niort, Mont-morillon et autres terres en accroissement d'apanage
à son frère Charles, comte de la Marche (4). C'est à
ce Charles de la Marche que l'on doit l'agrandissement de la Maladrerie
fondée au XIIIe siècle, pour séparer des autres
hommes les malheureux atteints de la lèpre(5).
C'est durant cette période, dernières années du
XIIIe siècle et premières années du XIVe siècle,
que fut rédigé le Grand Gauthier, précieux manuscrit
dressé par un évêque de Poitiers, ancien moine cordelier
et docteur en théologie.
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|
NOTES:
(1) Le canal du Roi fut creusé aux frais des
communes d'Auzais. de Petosse, de l'Hermenault, de fouillé, de
Saint-Valérien, de Saint-Laurent de a Salle, du Poiré,
du Langon, de Mouzeuil, de Nalliers et de Sainte-Gemme-la-Paine.
(2) Archives de Fontenay. -T. I, page 195.
(3) Huit ans auparavant, Maurice de Belleville, seigneur
de Montaigu et de a Garnache, fut un de ceux des seigneurs poitevins
qui se rendirent en 1303, aux armées de Flandre, d'après
le mandement du roi Philippe le Bel, et qui se couvrirent de gloire
à a funeste bataille de Courtray, où périrent vingt-mille
Français. Il fut, par sa fille Jeanne, le grand-père du
fameux connétable Olivier de Clisson.
(4) Cette session empêcha, l'année suivante
Fontenay d'être le siège d'un évêché,
lors de la création de ceux de Luçon et de Maillezais.
(5) Jean Parthenay l'Archevêque, seigneur de Parthenay,
Vouvent, Mouchamps. etc., fut en 1321-22, lors de la, peste qui désolait
le Poitou, un des seigneurs qui poursuivaient avec le plus d'acharnement
les Juifs et les lépreux, que a voix .publique accusait d'avoir
empoisonné les sources.
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LE GRAND GAUTHIER
|
C'est à Gauthier de Bruges, évêque de Poitiers,
dont les démêlés avec le pape Clément V furent
retentissants, que l'on doit, vers 1307, un Pouillé du diocèse
de Poitiers, connu sous le nom de Grand Gauthier ou Gautier, parce qu'il
le dressa pour établir nettement et incontestablement l'ordre
à mettre dans les choses de son église. C'est une nomenclature
de tous les bénéfices du diocèse, de leurs conditions
d'existence, leurs collateurs, les perceptions à y faire, l'ordinaire
ou autres bénéfices simples qui en dépendaient.
Là se trouvent des notions qui, sans lui, n'eussent probablement
jamais été connues. Ce livre était d'une grande
importance pour le diocèse de Poitiers et pour l'évêché,
puisqu'il énumérait tous les titres de cette vaste église,
et' mentionnait les obligations de chaque titulaire, les droits réservés
à l'évêque et tous les actes concernant les domaines
de l'évêché. Ce livre, si précieux aujourd'hui
et si utile à notre histoire bas-poitevine, a eu des fortunes
diverses. Il avait disparu dès le temps de Gautier, soustrait
sans doute par une main infidèle intéressée. L'histoire
accuse de ce fait un certain André, doyen de Talmont, qui avait
profité, pour le faire disparaître, de la vacance du siège
entre Gauthier, ancien moine, et son prédécesseur. Gauthier,
fort soucieux des soins dont il prenait la charge et qui, sans doute,
avait pu comprendre l'utilité pratique de ce Pouillé,
s'empressa de le reconstituer à force d'enquêtes et de
recherches laborieuses, et quand il l'eut achevé, il mit en première
page, afin d'authentiquer tous ces renseignements, une lettre à
son successeur pour lui faire connaître l'histoire de ce livre,
comment il avait disparu et comment lui, Gauthier, s'était donné
la peine de le refaire. IL affirmait que tout y était conforme
à la vérité et qu'on devait s'en rapporter à
cette publication comme à l'original lui-même (1).
Par suite de circonstances restées inconnues, il tomba, versa
le premier quart du XIXe siècle, aux mains d'un connaisseur qui
le garda jusqu'à sa mort et dont les héritiers le cédèrent,
en 1841, à la Bibliothèque de Poitiers, où il est
fréquemment consulté par ceux qu'intéressent ces
matières (2).
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|
NOTES:
(1) Aillery. - Pouillé de Luçon. pp.
1 et 108.
(2) Archives historiques du Poitou (Vol. XXV et suivant.
(Auber, T. IX, pages 98 et 99
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ÉRECTION DE LUÇON
ET DE MAILLEZAIS EN
ÉVÊCHÉS (1317)
|
L'évêque de Poitiers, qui étendait sa juridiction
non seulement sur toute la province de ce noie, mais aussi sur les confins
des provinces voisines, ne pouvait, malgré tout son dévouement,
suffire à l'administration d'un aussi vaste diocèse. Le
pape Jean XXII, d'accord avec le roi de France, comprit que l'étendue
du diocèse de Poitiers était trop considérable
pour un seul homme, et par bulles données à Avignon aux
ides d'avril 1317, ii décida la création d'évêchés
nouveaux à Luçon et à Maillezais, qui étaient
de florissantes abbayes.
Le nouveau diocèse de Poitiers comprenait à peu près
ce que l'on est convenu d'appeler le Faut-Poitou. Celui de, Luçon
avançait jusqu'au delà Clisson, avoisinant par un point
la Sèvre Nantaise, et cotoyait l'Océan. Il comprenait
les doyennés d'Aizenay, de Mareuil-sur-le-Lay, de Montaigu ;
l'archiprétré de Pareds, le doyenné de Talmond,
soit environ 255 paroisses, 13 abbayes et nue quantité de prieurés.
Le premier évêque fut Pierre de la Voirie, abbé
du monastère- de Luçon depuis quinze agis. L'évêché
de Maillezais comprit l'archiprêtré d'Andin, les doyennés
de Bressuire, de Fontenay-le-Comte, de Saint-Laurent et de Vihiers,
soit 228 paroisses, 9 abbayes et 148 prieurés. Geoffroy Pouvreau,
fut, ainsi que nous l'avons déjà dit, le premier évêque
de Maillezais, après avoir été longtemps abbé
de ce monastère. Il fut sacré à Avignon le 20 novembre
1317.
Disons en passant que les titulaires de ce dernier siège résidèrent
presque constamment dans le prieuré de Saint-Hilairede-Fontenay,
dont l'air était paraît-il beaucoup plus sain que celui
des marais de Maillezais (1) et aussi à l'Hermenault.
Le 22 avril 1630, une bulle du Pape Urbain VIII transférait
à Fontenay le siège épiscopal de Maillezais, et
le 11 janvier de l'année suivante, une autre bulle sécularisait
le monastère de Maillezais, de l'ordre de Saint-Benoît,
et érigeait un chapitre séculier à Fontenay (2)
; mais ces bulles ne furent pas suivies d'effet, l'échevinage
et la magistrature s'étant opposés de toutes leurs forces
à l'établissement de l'évêché si-
près d'eux. Le 2 mai 164.8 (3), Innocent X enlevait à
Maillezais soit titre de cité, et transférait le siège
épiscopal à la Rochelle, en appelant à ce poste
Raoul de la Guibourgère, déjà évêque
de Maillezais. La bulle du pape et l'ordonnance du roi furent enregistrées
au parlement, le 7 septembre 1650, mais elles ne reçurent leur
entière exécution qu'en 1656, et encore les lettres royales
confirmatives de la translation, ne sont-elles que du 20 mai 1664 (4).
Raoul mourut le 15 mai 1661, à l'âge de 72 ans, et fut
inhumé dans l'église du couvent des Capucins de Fontenay,
établi sur l'emplacement de l'ancien hôtel Bélesbat,
acheté par les moines à Claude d'Aubigné le 27
janvier 1632 (5).
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|
NOTES:
(1) Le sceau en bronze de l'abbaye de Maillezais
a été retrouvé en 1854 dans les fondations du moulin
du château de Fontenay. Il est antérieur à 1317.
(2) Archives de Fontenay. - T. IV, pages 9-17 et 19-39.
(3) Archives de Fontenay,. T. IV, page 171.
(4) Archives de Fontenay, T. iV, pages 231, etc.
(5) Archives de Fontenay, T. IV, page 51.
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MORT DE PHILIPPE LE LONG
- RÈGLEMENTS
DE POLICE (1343)
|
Philippe le Long étant mort le 3 janvier 1322, son frère
Charles le Bel, comte de la Marche, lui succéda, et ses domaines
se fondirent alors dans ceux de la couronne. Le règne de ce prince
et les premières années de celui de Philippe de Valois
qui lui succéda en 1328 (1), n'offrent guère d'événements
particuliers au Bas-Poitou, et il faut arriver à 1343, pour retrouver
quelques souvenirs. Disons seulement que Louis de Thouars, 22e vicomte
et seigneur de Talmont, etc., servit dans l'armée de Philippe
de Valois en qualité de seigneur banneret en 1338-39-40 et 41.
Des règlements de police pour Fontenay, conservés dans
l'inventaire des titres de Notre-Dame, et qui remontent au 21 octobre
1343, sont de la plus grande sagesse, et quelques-uns ne seraient pas
désavoués aujourd'hui. Ces règlements, élaborés
à Niort par plusieurs prélats, gens d'église, bourgeois,
conseillers et avocats, sous la présidence de Jourdain de Loubert,
conseiller du roi, gouverneur du roi et sénéchal de Poitou
et de Limouzin, nous apprennent une foule de particularités sur
l'organisation de la localité, sur les poids, le mesurage, la
poissonnerie, la boulangerie, etc. (2)
Ces documents nous font connaître notamment qu'une famille Billaud
exerça, au carrefour de la Fontaine, les fonctions de notaires,
depuis environ 1300, jusqu'au règne de Charles VIII (1483), et
qui avec d'autres assez nombreuses, formait dès le XIIIe siècle,
une sorte de bourgeoisie.
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|
NOTES:
(1) Deux ans auparavant, le 4 décembre 1326,
Jehanne de Saint-Vincent, veuve de Thibaud-Chabot et sa fille Perrine,
fondaient au faubourg Saint-Martin de Fontenay, un couvent de religieuses
de Sainte-Claire, (Archives de Fontenay, T. I, page 220 bis). - La seconde
fondation fut faite le 18 janvier 1460 par Catherine Terroille, veuve
de Méry Berlin; page 331.
(2) Fillon. - Recherches sur Fontenay, T. i, page 47.
Une cloche fondue en 1350 pour Notre-Dame, fut envoyée à
l'hôtel de la monnaie de la Rochelle, en janvier 1793.
|
ETAT LITTÉRAIRE, SCIENTIFIQUE
ET SOCIAL DU POITOU
AU COMMENCEMENT DU XIVe SIÈCLE
|
La sagesse de Saint Louis et de son frère Alphonse, comte
de Poitiers, l'équité de Charles IV, les chartes octroyées
par ces nobles princes, et aussi par Philippe le Hardi, les liens plus
étroits que les Croisades avaient créés entre les
grands seigneurs et leurs vassaux, l'adoucissement des murs, l'accroissement
du nombre des propriétaires du sol dû à la plus
grande facilité d'acquérir, le zèle louable dont
faisait preuve une grande partie du clergé, pour établir
entre toutes les classes de la société l'amour fraternel,
avaient fait du Bas-Poitou, une des plus riches contrées de la
France (1). Cette contrée, qu'une pensée religieuse avait
rempli d'enthousiasme, qui à la voix d'un ermite s'était
rangée sous la bannière des preux, avait-senti souffler
sur elle, comme une émanation d'Orient, une littérature
toute naïve et chevaleresque, et' quelques poitevins obtenaient
l'honneur si envié alors de s'entendre appeler poètes
provençaux. - C'était vers la cour de Toulouse ou les
grandes cités méridionales, que se sentait attiré
Pierre Million, noble poitevin, qui devint maître d'hôtel
de Philippe le Long, comte de Poitiers, et qui mourut vers 1320.
En 1320, Louis Emeric, seigneur de Rochefort, qui était alors
en Bas-Poitou, payait aussi son tribut aux lettres. Il fut connu de
Pétrarque, dont il reçut des éloges, comme étant
l'un des meilleurs poètes de son temps.
Vers la même époque, Guillaume de Montloudun, après
avoir été gouverneur des enfants du roi de Hongrie, professait
à Poitiers la philosophie et le- droit canon.
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|
NOTES:
(1) Nous ne voulons pas dire par lit que tout fut
parfait, car sur certains points, notamment dans le Talmondais, se produisaient
encore trop souvent des attaques a main année, et quelques ecclésiastiques
séculiers ou réguliers, usurpant tous les droits réguliers
ou privés, se faisaient trop souvent allouer à vil prix
des biens très importants. Des meurtres trop souvent impunis,
étaient aussi commis par des nobles et des roturiers ; mais il
y avait néanmoins dans les moeurs un progrès indéniable.
|
ROBERT GIRARD, MOINE DE
SAINT-MICHEL-EN-L'HERM
|
Sous Charles V, un moine de Saint-Michel-en-l'Herm, nommé
Robert Girard, se rendit célèbre par ses observations
astronomiques. Lors de la vente des livres provenant de l'abbaye, faite
par le district de Fontenay, le précieux manuscrit qui avait
échappé au sac de 1569, tomba- entre les mains de Gallot
Jean-Gabriel (1). Ce fait étant venu à la connaissance
de Lakanal, alors président du Comité d'instruction publique,
le célèbre transformateur du Jardin du roi en muséum
d'histoire-naturelle, écrivait à M. Poëy-d'Avant,
alors receveur de l'enregistrement à Fontenay-le-Comte et, déjà
apprécié par ses vastes connaissances en histoire naturelle,
la missive suivante :
Paris, le 24 mai 1793.
" J'ai appris, citoyen, par le citoyen Garos, votre ami,
que vous lui aviez autrefois parlé d'un manuscrit où sont
des observations sur les saisons, le cours des astres, les phénomènes
du .ciel et marées faites au temps de Charles V, par un moine
de l'abbaye de Saint-Michel-en-l'Herm, nommé Robert Girard. Le
citoyen Garos m'a dit que le manuscrit était présentement
dans la bibliothèque du citoyen Gallot, qui a été
à la Constituante. Il peut y avoir intérêt pour
la science à ce que les observations (le ce moine soient vues
par un astronome. C'est pourquoi je vous invite, citoyen, à faire
l'es démarches nécessaires pour que le volume qui les
contient me soit envoyé, par une occasion sûre, dans le
plus bref délai. S'il est nécessaire d'en prendre la copie,
il sera transcrit aux frais (le la commission et ensuite remis au. citoyen
Garos, qui se chargera de vous le remettre en mains propres.
« Salut et fraternité.
« Signé : LAKANAL.
Les événements malheureux qui survinrent à
cette époque, a Fontenay, la prise de cette ville par les Vendéens,
les graves désordres qui s'y accomplirent, ne permirent sans
doute pas à Poëy-d'Avant de donner suite au desideratum
de son correspondant, et l'affaire en resta sans doute là. Peu
de temps après, Gallot abandonnait Fontenay, et se retirait à
la Rochelle pour y exercer les fonctions de médecin militaire
près l'armée de l'Ouest, dans lesquelles il se croyait
plus utile (2).
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|
NOTES:
(1) Gallot, Jean-Gabriel, médecin distingué,
né à Saint-Maurice-le-Girard (Vendée), le 30 septembre
1744, successivement membre de l'Assemblée provinciale du Poitou,
député du Tiers aux États généraux,
membre de l'administration départementale de a Vendée,
mort le 4 juin 1791, d'un typhus d'hôpital qu'il avait contracté
en-soignant les soldats malades.
(2) Société d'émulation de la Vendée
(année 1889). Jean Poëy-d'Avant et son cabinet d'antiquités,
par A. Billon.
|
PIERRE DE BRESSUIRE
|
Pierre de Bressuire. dit Berchorius, surnommé le Pline
du moyen âge, naquit à Saint-Pierre-du-Chemin, en 1292,
d'une famille- de petits propriétaires, dont le nom a disparu
vers 1450, et mourut à Paris en 1362. -Théologien remarquable,
éloquent prédicateur, écrivain de talent, il fut,
vers 1320, attaché au cardinal Després, vice-chancelier
du pape.--R Honoré de la confiance de plusieurs papes, il fit
à Avignon la connaissance de Pétrarque et, en 1350, il
devenait l'un des secrétaires du roi Jean le Bon, à la
prière duquel il traduisit en français l'Histoire romaine
de Tite-Live, qui obtint un immense succès. - Vers 1351, il se
fit bénédictin et composa une sorte d'encyclopédie
intitulée Reductorium, repertorium et dictionarium morale ustriusque
et testamenti, etc., imprimé pour la première fois à
Strasbourg en 1474 (1).
Dans cette encyclopédie (XIVe livre), il consacre un long article
aux raretés du Poitou, notamment " à une, espèce
d'oiseaux qui n'ont d'autre principe de production que la pourriture
des vieilles planches des vaisseaux ", et à d'autres qui
tous les ans envoient à la tour de Maillezais trois ou quatre
députés pour examiner l'état des lieux avant d'y
venir faire leurs nids.
A côté de ces théories qui, aujourd'hui, nous feraient
sourire, il n'en a pas moins écrit des choses remarquables, où
il se révèle tout à la fois théologien,
physicien, médecin-anatomiste, botaniste, géographe, astronome,
etc.
Le savant bénédictin fut inhumé à
Paris dans la chapelle du couvent des Barnabites, dont il était
prieur. Son corps fut déposé près de l'autel, du
côté de l'épître et sous une tombe plate qui
a disparu. Le Maire, dans l'ouvrage intitulé :.Paris ancien et
nouveau, T. ;, page 375, donne son épitaphe, trop longue pour
que nous la reproduisions ici.
Marchebrusc, originaire du Poitou, et sa mère, au génie
élevé et délicat, lauréate universelle des
jeux floraux et , aussi des cours d'amour qui n'avaient pas encore complètement
disparu, allaient habiter le pays de Mireille.
Pierre Hugon, gentilhomme de Dompierre-sur-Boutonne, composait plusieurs
chansons en l'honneur de Béatrix d' Agout, sa danse, qui présidait
la cour d'amour. il mourut vers l'an 1321.
Un travail semblable se produisait dans les sciences physiques, l'anatomie,
la botanique, la théologie, la géographie, etc., et on
peut dire que celui qui posséda au plus haut degré toutes
ces connaissances réunies, fut le bas-poitevin Berchorius, cité
plus haut.
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|
NOTES:
(1) Une traduction française (le son Histoire
romaine de Tite-Live fui, éditée à Paris, 1511-1515,
3 volumes in-Folio. - C'est le roi Jean qui lui avait donné l'ordre
d'écrire cette traduction. - On a sa signature apposée
en qualité de secrétaire de ce prince, au bas de lettres
royales délivrées le 21 août 1353, en faveur de
l'église de Pontoise.
|
29 OCTOBRE 1324
SPÉCIMEN DE LA LANGUE ET DE L'ORTHOGRAPHE
FRANÇAISES EN BAS-POITOU
AU COMMENCEMENT DU XIVe SIÈCLE
|
L'acte (1) original en parchemin. dont nous publions le texte, est
conservé dans les archives de la Vendée, parmi les titres
du, prieuré de Fontaines, situé en la paroisse du Bernard
et dépendant de l'abbaye de Marmoutier. La transaction qu'il
contient est peu importante, ainsi que le fait remarquer le savant M.
Marchegay, à qui nous empruntons ces renseignements, mais elle
présente un intérêt réel comme spécimen
de la langue française et surtout de son orthographe, remarquables
par leur analogie avec celles de nos paysans d'aujourd'hui. Elles paraîtront
d'autant plus incorrectes que ceux qui ont rédigé ou dicté
notre acte sont, d'une part, le véritable souverain de la contrée,
le vicomte de Thouars, prince de Talmont; et de l'autre, le procureur
ou fondé de pouvoirs d'un abbé d'un des monastères
les plus renommés et les plus riches de France, celui de Marmoutier,
près Tours, dont nous avons déjà parlé.
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|
NOTES:
(1)
"C'est le traitié e l'acort fait entre noble
home mon seygnour le viconte de Thoars e frère Richart Le Barber,
moyne de Mermoster, procurour de religiouz homez l'abbé e couvent
de Mermoster.
Premerement ge le dit procurour aprove et ratefié
le traitié qui fut fait à Longeville entre religiouz home
e honeste l'abbé de Saint Jehan d'Orbester, d'une part, se portent
por ledit noble, e frère Jofrey Oboin, priouz de la Roche, se
portens por religiouz homez l'abbé e le couvent de Mermoster,
e frère Guillaume de La Corbère, priour de Fonteynnes,
de l'autre ; qui tele est : Premerement ge le dit procurour, tant comme
procureur voit que les amonicions e les procès de l'église
fait por ledit abbé e couvent contre ledit noble, de l'auctorité
au chantre do Sauveour de Bleys, sous délégat et commissaire
de religions, home et honeste l'abbé de la Trinité de
Vendome, juge e conservateur des privilèges à l'abbé
au convent de Marmoster davant diz, sunt por nun faiz ; e ge le dit
procureur, les anichille e revoque du tot, e voit que il séant
de nul efeit en lot temps.
E noz Johan, viconte de Thoars davant dit volons et consentons
que tos les fays et les esplez qui hont esté faiz en prieuré
de Fonteynnez e eus apartenencez des deux enssa, por nez ou por autre
en nom de noz. séant houz por non faiz en toz temps ; e une jument
e autres prisez, s'eles y sont, ferons restituer e restablir e est pris
j'ors entre les parties, c'est assaveir lendemagne de la Saint Johan
Batiste prochain, à Longeville, auquel jor noz ledit viconte
serons. .
E ge le dit procureur promet a fayre e porchacier o efeit
que frère Guillaume de La Cerbère, priour de Fonteynnes,
y ,sera suffisamment fondé pour trayter e reostrerra audit noble
e a son conseil les originaux de lors franchicez e de lors libertez,
e noz ledit vicomte nos raisons ; e si noz poor acorder bien est, sinon
a chascun demoret son drey sauve, sens innover ne diminuer, excepté
les chozes desus ancanteez qui demeurent à toz jors mès
de nul efeit; e dedens le jour do traytié l'uns n'atemptera riens
contre l'autre.
En tesmoiny de la cete choze, nos vicomte davant diz trayons
mis en cete presente letre nostre propre seya.
Fait le lindi avant la feste de Tes Sains, l'an de grâce
mil troys cens e vingt e quatre."
Recherches historiques, par Paul Marchegay, Un
document par canton, 1867.
|
MODE DE SUCCESSION NOBLE
EXISTANT ENTRE LA DIVE
ET LA SÈVRE ET ENTRE LA SÈVRE ET LA MER.
|
Dans la portion du Poitou comprise entre la Dive et la mer, la
transmission des fiefs a été jusqu'au commencement du
XVIe siècle, régie par une loi toute particulière
appelée Retour. Ils n'y passaient pas du père au fils
aîné, mais successivement, et suivant leur ordre de naissance
à chacun des frères puînés du défunt.
Par le décès du dernier d'entre eux seulement, le fils
aîné de. l'aîné réunissait l'usufruit
à la nu-propriété sur laquelle ses oncles n'avaient
aucun droit. Cette loi atténuait la rigueur du droit d'aînesse;
mais le nombre des abus, procès et troubles qu'elle engendra,
fit solliciter et obtenir son abolition par les trois États du
Poitou. A l'appui de cette thèse, le savant M Marchegay a donné
dans l'Annuaire de la Société d'émulation de la
Vendée (1867), deux documents fort intéressants et on
ne peut plus affirmatifs. L'un provient des archives de Salidieu, près
Mareuil, et porte la date du 12 février 1496 (1). L'autre, plus
ancien, concerne surtout le canton de Chantonnay. Il porte la date du
23 juillet 1278 et a pour titre : La part héréditaire
d'un cadet de la maison de Thouars.
C'est en vertu de cette coutume, consignée dans le premier document
que nous venons de relater plus haut, et rendant les généalogies
des barons poitevins très difficiles à dresser, que Savari,
troisième' fils de Gui, vicomte de Thouars et d'Alix de Mauléon,
posséda après la mort de ses deux frères, Aimeri
et Rainaud, les, vastes domaines de son père et de sa mère..
Savari ayant cessé de vivre vers la fin de l'année 1274,
Gui, fils d'Aimeri, devint vicomté de Thouars, dont ses héritiers
directs continuèrent à jouir conformément au droit
de retour, -nom donné au mode de succession que nous venons d'indiquer.
Quoique déjà marié avec Marguerite d'Eu, et sinon
majeur, du moins émancipé, Aimeri est assisté,
dans; la pièce qui; suit; de sa mère Marguerite de Lusignan
et de Geoffroi de Châteaubriant, son second époux, parce
que celle-ci possédait à titre de douaire, quelques-uns
des domaines dont dispose notre charte. Elle concerne en effet un échange
passé entre le jeune vicomte et Agnès de Pons, veuve de
son oncle Savari, au sujet de l'oscle ou douaire de cette dame et de
la portion héréditaire de sa fille unique, Alix. La part
d'Agnès et celle d'Alix, fixées; par un acte du 30 décembre
1274, furent modifiées le 25 juillet 1278. Au lieu de leur tiers
dans les seigneuries de Pouzauges, du Boupère; de la Morvien,
de Monsireigne, de Chavagnes-en-Pareds, de la Fenêtre, de Sigournais,
de 1'lle-de-Bouin, de Soullans, du MaraisCoutumier et de l'Ile-d'Yeu,
les deux dames reçurent dans leur entier les seigneuries du Puybéliard,
de Chantonnay, de Château-Guibert, de Mareuil et de l'Herbergement-Ydreau.
La charte, rédigée en langue vulgaire, est des plus intéressautes
pour l'histoire du Bas-Poitou. Elle donne en effet des détails
sur plusieurs localités pour lesquelles les documents sont très
rares, entr'autres sur Chantonnay et sur les principaux domaines et
vassaux de ce fief, érigé plus tard en baronnie. Notre
chef-lieu de canton est appelé ici Chantaonnois. Pendant les
quatre ,siècles qui suivirent, il fut nommé Champtaonnat;
Chantaunay, et surtout Chantagnès, en latin Cantus Agnetis. L'orthographe
actuelle ne paraît qu'à partir de l'année 1600.
Le texte de la charte, que nous avons abrégé en supprimant
des formules inutiles et divers passages peu importants, a été
découvert dans le chartrier de Thouars. Il est inséré
dans l'acte par lequel la jeune Alix, fille de Savari et d'Agnès,
confirme, en juillet 1287, les deux traités faits en 1271 et
1278 par sa mère et tutrice avec son cousin le vicomte Gui.
Possédés au XIVe siècle, par la puissante maison
de Craon, Chantonnay, le Puybéliard et Mareuil entrèrent
par mariage, dans la maison de la `Trémoille. Louis II, le chevalier
Sans-Reproche, qui devint vicomte de Thouars, du chef, de sa mère
Marguerite d'Amboise, ayant acheté 'la baronnie de Montaigu à
Jean de Belleville, seigneur de Sigournay, lui céda en 1519,
les seigneuries de Chantonnay et du Puybéliard, estimées
20.000 livres, pour compléter le paiement des 80.000 livres,
prix de son acquisition.
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NOTES:
(1)
"A touz ceus qui verront et orront cestes presentes
lettres, nous Gui, vicomte de Toarz, chevalier, sise en celi tens de
Toarz et de Talemont, et nous Geufray, sire de Chastiau Bruiant, chevalier,
et nous Marguerite du Lezeignen, sa fame, dame de la Chiese et mers
audit viconte, de, Toarz, et nous Agnès de Ponz, dame de Maroil,
fame ça en arrière à noble home Savari, jadis viconte
de Toarz, salu en Nostre Seignor durable.
Sachent tuit qui sont et quia venir sont que nous ledit
vicomte de Toarz, o la volenté et o l'assentemet dondit Chastiau
Bruiant et de ladite noble dame Marguerite de Leseignen, sa fame et
nostre chere mere, d'une part, et nous ladite Agnès de Pons,
de l'autre part, de noz bonnes volentez et non déceu, avon fet
et feson permutation et perpétuel eschange de nos choses.. en
tel manière que nous ledit vicomte de Toarz... avon baillé,
livré, et octroié... à la dite noble dame Agnès
de Ponz et a Aaliz sa fille, et fille audit Savari, jadis viconte de
Toarz, notre Oncle, notre chastiau et nostre chastelerie dou Pui Béliart
et toute la vile doudit Pui Béliart, o toutes ses appartenances,
et nostre ville de Chantaonnais, o le manoir qui i est et toutes ses
autres apartenances, et nostre ville de nostre manoir de Chastiau Guibert
o toutes ses appartenances, et tout ce que nous avons et avoir poon
et duon... esdites ville dou Pui Béliare, de Chantaonnais et
de Chastiau Guibert, et en toutes les appartenances desdiz leus, c'est
à savoir: domaines, manoirs, villes, rentes, cens, taillées,
bianz, destroiz, prez, bois, chaufages usages, garenes, fours, molins,
peschages, haute, justice et basse, servanties, fiez, rerefiez ; et
touz les homages plainz et liges.
C'est à savoir par reson dou Pui Béliart
:' l'omage des bers feu Pierre Loiau, o ses apartenances et les homages
de Jehan Prevoust de la Touche Embert, de Symon de l'Angle, de Aimeri
Bruiant, sire de Digne Chien, des hers feu Renaut Levesque, de la dame
des Bochaus, de Johan de la Barbrère... Et par raison de Chantaonnais
l'omage dou seigneur de Saint-Marz, et les homages dou seigneur de la
Tabarière et de Crous... Et par reson de Chastiau Guibert, l'omage
dou prévoust de Chastiau Guibert.. et touz et chacun les autres
hommages plains et liges, appartenanz ausdiz leus, et tout ce généraument
sanz riens i retenir.. . A avoir toutes les choses desusdites et chacunes
à tenir, a espleter dès orendroit a perpetuauté...
pesiblement,, franchement et quittement de ladite Agnès, por
raison de doaire, de oscle ou de domaison por noces, tout son viage
; et après sa mort, de ladite Aaliz sa fille, comme héritere
et des hers descendanz de sa char, ou des hers qui des hers de sa char
descendront perpétuaument, segont costume de païs ; ensembleement
o le chastiau de Maroil et o le, chastiau de l'Abergement Ydereau, o
toutes lors aparte - nances... Et ce fet nous lidiz vicomte de Toarz,
avon fet et feson o la volonté et o l'assentement de madame Marguerite
d'Eu, nostre fame... Et nous ladite Agnès de Ponz feson a savoir
à touz, que nous avion lessié, quité et octroie,
pour nous et pour ladite Aaliz, nostre fille, en perpetual permutacion
et en perpétuai eschange audit noble, monsieur Gui, vicomte de
Toarz, la tierce partie que nos avion et esploition et avoir poion et
devion à Pozauges (2), à Aube Pore... et en manoir de
la Mort Vivien. et a Monsireigne et a Chaveignes et a la Fenestre et
a Ségornay et en l'ille de Boig et en Solanz et en Mareis Costumer
et en toutes les appartenances, et la tierce partie que nous avon en
ce que ma dame d'Ardene, fahue, soloit avoir en Oys : a avoir, a tenir
et a esploitier des orendroit a perpetualté... doudit viconte
de Toarz ou de ses hors ou de ses successors, por renon de l'eschange
des choses que il a baillé a nous et a ladite Aaliz, nostre fille,
si comme desus est dit... Et prometon et graaton, nous Agnès
de susdite, que nous feron et procureron vers ladite Aaliz nostre fille,
de denz l'aage de quatorze anz accompliz, c'est à savoir entre
l'aage de doze anz et quatorze anz accompliz, que elle voudra et ratifiera
cest fet et la teneur de ceste letre, et que elle le jurra a tenir et
a garder a tout ers més, ranz venir encontre à Toarz,
audit vicomte à ses hors ou a son commandement... Et ce nous
prometon et graafon par nous fere et acomplir, sur l'obligation de touz
noz biens moebles et nou moebles, presenz et avenir... et quant à
la ratificacion qui se doit fere par nostre fille, a peine de mil et
tint cenz livres de monoie corant, les quex nous serions tenue à
rendre audit viconte ou, aus suens se ladite Aaliz, notre fille, ne
voloit retefier, c'est nostre fet de denz le tems desus dit.
Et que ce soit ferme et eslable a toz jorz més,
nous dit vicomte et nous Geufrai et nous Agnès de Ponz, desusdiz
en cestes présentes letres aposames noz séaus, en tesmoing
de vérité et en perpétuai mémoire des choses
desusdites, ensembleement o le séel de la séneschaucie
de Poitou establi a la Roche-sur-Yon pour nostre seigneur le roi de
France...
Ce fu fet, et cestes letres douées, ou jour de
lundi après la feste de la Madelene, en l'an de l'Incarnation
Nostre Seignor Jhesu Crist, mil deus cenz sexante et dix et oit, ou
mois de juignet."
Annuaire 1867, pages 246.249.
(2) Pendant qu'elle possédait Pouzauges, Agnès
y avait donné à Denise, sa nourrice, a tierce partie d'une
maison qui lui fut garantie par notre charte.
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CANTON DES ESSARTS, Etc.
LE MARIAGE DE LA FILLE AINEE DU SEIGNEUR EN 1340
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La loi féodale autorisait le suzerain à lever doubles
cens et taille sur ses vassaux et sujets dans cinq circonstances : 1°
et 2° quand lui et son fils aîné étaient armés
chevaliers ; 3° quand il mariait sa fille aînée; 4°
afin de payer sa rançon s'il était pris à la guerre,
et 5° pour contribuer au paiement des fiefs qu'il pourrait. acheter.
Quelquefois les vassaux obtenaient par charte expresse, l'abolition
de cet impôt ; et nous en avons un exemple pour la Mothe-Achard.
Saint-Hilaire-le-Vouhis et Falleron,, dans la 70e' charte du cartulaire
des sires de Rays.
En général, cette libération était facilement
accordée aux gens d'église:; par les lettres mêmes
qui leur confirmaient et amortissaient sur immeuble, une rente en un
simple droit acquis à titre gratuit, ou même onéreux
dans l'étendue d'un fief laïque.
Savary III de Vivonne ne voulut pas renoncer à ce double impôt
en faveur de l'abbaye , d'Orbestier. Pour ce que son monastère
possédait dans une lointaine, dépendance de la baronnie
des Essarts, l'abbé dut venir des bords de la mer jusqu'au milieu,
du Bocage, compter au châtelain Robert Rennoul, la somme imposée
sur son domaine de Vairé, près la MotheAchard, à
l' occasion du mariage de Mlle Vivonne, l'aînée. Les 400
sous qu'il paya représentent environ 300 francs de notre monnaie.
L'arrière petit-fils du baron des Essarts,, Savary V du nom,
fut un vaillant chevalier. Il combattit les Infidèles et tomba,
entre leurs mains à la funeste bataille de Nicopolis, en l'année
1396 (1), mais ses vassaux poitevins n'eurent pas de rançon à
payer, parce que les Turcs massacrèrent impitoyablement 1 a,
plupart de leurs prisonniers, M. de Vivonne, entre autres.
(Annuaire de la Société d'émulation, 1858, page
226, Marchegay.)
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COMMERCE. - INDUSTRIE.
ÉTAT SOCIAL A
FONTENAY AU
COMMENCEMENT DU XIVe SIÈCLE.
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Deux industries, celles des draperies et des cuirs, qui s'exerçaient
depuis plusieurs siècles à Fontenay, prirent, à
cette époque, un développement considérable, et
contribuèrent à lui faire occuper un des premiers rangs
parmi les villes de la province. Sa bourgeoisie, devenue riche, reçut
une sorte d'orga-nisation municipale. Elle eut son conseil de prud'hommes,
sous la présidence du prévôt. Bientôt elle
se trouva en mesure de tenir le haut, bout, dans la circonscription
territoriale qui l'entourait, et les seigneurs des fiefs compris dans
l'enceinte fortifiée, furent obligés de lui abandonner
le soin de pourvoir elle-même à sa sûreté.
C'était enlever à la féodalité le pouvoir
de lui nuire. Les simples palissades qui reliaient les cinq portes,
les défenses des Mottes-de-la-Vau, du Château-Gaillard
et de la Grosse-Tour furent remplacées, aux frais des habitants
de la ville, par des fortifications solidement bâties, dont des
parties subsistent encore sur la rive gauche de la Vendée (1).
Le capitaine du château, nommé par le Roi, eut de la sorte
sous ses ordres une milice capable, sans qu'il fut besoin d'aucune autre
aide, de résister à un coup de main. Les bourgeois fontenaisiens
ne s'en tinrent pas à' cette première conquête.
Quels moyens employèrent quelques-uns d'entre eux pour acquérir
des biens nobles ? On l'ignore. Toujours est-il qu'en 1335, Guillaume
Bouin, Guillaume Goupil et Régnaud Morissonneau, le premier drapier;
les autres tanneurs, en possédaient autour de la ville. Bouin
paraît même avoir été anobli. L'aristocratie
vit ces empiétements d'un mauvais oeil mais ils finirent cependant
par passer à l'état de faits accomplis, puisque le fils
de Bouin épousa, en 1341, une Goulard, demoiselle de race chevaleresque,
et qu'il y eut ensuite plusieurs autres alliances entre les familles
nobles et celles de ces roturiers enrichis (2).
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NOTES:
(1) On a trouvé, en démolissant une
partie de a muraille de cette époque, qui défendait a
ville du côté de la rivière, un petit dépôt
d'une vingtaine de pièces de Philippe-le-Long et de Charles-le-Bel,
parmi lesquelles était ce rare denier de Robert d'Artois, frappé
te Mehun-sur-Yèvre, avec légendes françaises.
(2) Fillon. - Histoire de Fontenay, pages 30 et 31.
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ÉTAT SOCIAL GÉNÉRAL
EN BAS-POITOU. - LES
ROTURIERS EUX AUSSI PEUVENT ACQUÉRIR.
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Si maintenant nous résumons. l'étude que nous venons
de faire, nous voyons en Bas-Poitou, dès les premiers temps de
la féodalité, trois classes d'hommes vivant sur le même
sol, et régis par trois gouvernements différents : les
nobles par le gouvernement féodal, les clercs par le gouvernement
ecclésiastique, les serfs par le gouvernement domanial.
Les nobles, hauts et puissants justiciers, tels que les Chabot, les
Chasteigner, les vicomtes de Thouars et princes de Talmont, les de Châteaubriant,
etc., ne connaissent en fait de devoirs que ceux du vassal envers le
suzerain à part l'hommage, ils ne relèvent guère
que de leur conscience.
Les ordres religieux jouissant d'un crédit illimité,
possèdent des terres d'Église. Ces terres constituent
une masse compacte, un territoire assez arrondi, bien que les communautés
aient des dépendances dispersées un peu partout.
Le peuple compte dans son sein des vilains francs, descendants des
colons de l'époque romaine, qui avaient réussi à
garder leur demi-liberté, et dont les fils arriveront plus tard
aux premières charges de la cité, après s'être
enrichis par le commerce, tels que les Yver et les Regnaud.
Les premiers sont liés par un contrat, les seconds par les canons
de l'Église ou leur règle monastique, les troisièmes
par la volonté d'un maître. Mais au-dessus de ces trois
classes, et les dominant par son principe, se place la royauté.
Bien que, le prince soit souvent moins puissant que ses grands vassaux,
il a, pour lui le souvenir de l'idée romaine, de la monarchie
qui subsiste chez les clercs, le souvenir de l'Empire chez les vilains,
par le besoin d'un protecteur naturel qui puisse mettre un frein aux
guerres civiles et à la violence des seigneurs, aussi peu humains
quelquefois que le terrible Geoffroy la Grand'Dent.
La royauté n'ignore pas ces aspirations opposées à
la toute puissance des grands, divisés d'intérêts
et souvent sans esprit national ; elle saura entretenir fort adroitement
ces rivalités pour le triomphe de sa politique, et le temps n'est
pas éloigné où nous verrons en Bas-Poitou les plus
illustres magistrats du roi pris dans ce tiers-état, si effacé
d'abord, mais chez lequel, se développe et grandit avec le sentiment
de sa valeur et de ses droits, son amour passionné et réfléchi
de la liberté.
A l'exemple de la bourgeoisie, les serfs vont eux aussi devenir propriétaires
de biens seigneuriaux, et c'est ainsi que le 12 décembre 1416,.
Miles II, vicomte de Thouars, seigneur de Pouzauges, baille à
rente perpétuelle, moyennant 15 sous, à Georges Achard,
boucher à Pouzauges, des maisons, masureaux et vergers "
sis près la quéruelle de l'église de Saint-Jacques,
le grand chemin entre deux, par lequel l'on voit de la cohue dudit Pouzauges
à la chapellenie dudit lieu ". (Marchegay, - Recherches
sur les seigneurs de Tiffauges.)
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