Nous venons d'examiner dans ce simple et court aperçu, la
physionomie générale de la Vendée. Nous allons
maintenant traiter sommairement la constitution géologique,
de ses terrains.
Tous les géologues sont d'accord pour reconnaître
que les premIères terres formées sont, en France,
la Vendée et une partie, de la Bretagne.
Du sein de l'Océan universel qui entourait notre globe,
de tous côtés, ont émergé les premières
éminences qui, commençant à Montournais, occupent
une partie des cantons de Pouzauges, les Herbiers, Mortagne et Montaigu.
Les points les plus élevés en sont la butte des Alouettes
(231), qui pendant les guerres de la Vendée, servait d'observatoire
aux armées royalistes, le Bois de, la Folie, près
de Pouzauges (278), et le sol de l'église de Saint-Michel-Mont-Mercure
(285), dont le nom vient sans nul doute de l'ancien dieu Mercure,
auquel la colline était consacrée.
A côté de ces premiers reliefs du sol vendéen,
les rides de la terre 's'accentuent davantage : l'émersion
se continue avec une lenteur qui échappe à notre chronologie,
et bientôt une seconde chaîne de collines prend naissance'
sur les deux rives du Lay, en se dirigeant du sud au nord, jusqu'à
Saint-Pierre-du-Chemin, d'où elle s'incline vers le nord-ouest
par Réaumur, la Meilleraye, le Boupère. Les points
les plus élevés de ce groupe secondaire, sont les
collines de Puy-de-Serre, de la Chàtaigneraie, de SaintPierre-du-Chemin
ou Butte-des-Pelochères, de Cheffois, de Mouilleron et bien
d'autres encore, d'une formation relativement plus récente
: telles sont celles qui bordent le Lay dans la région de
Saint-Philbert-du-Pont-Charrault, Chantonnay et Saint-Vincent-Puymaufrais.
Mais bientôt les terrains de transition commencent à
se déposer entre les deux branches principales de collines
que nous venons de décrire, et forment le sous-sol d'une
partie des cantons des Essarts, Chantonnay, Sainte-Hermine et la
Châtaigneraie, où gisent ensevelis à de grandes
profondeurs, ces dépôts de houille, produits de la
première végétation du globe (1)
.
Ce bassin dut être sous les eaux de la mer longtemps après
qu'elle eut laissé à découvert les collines
qui le circonscrivent.
Il est impossible de dire et peut être inutile de savoir
combien de temps ce grand lac a subsisté ; mais selon toute
probabilité, les eaux ont dû s'écouler à
la mer par l'effet d'une débâcle, dont le centre paraît
être vraisemblablement le point qu'on appelle le Déluge
et qui se trouve dans la forêt de Vouvent, sur le ruisseau
des Houillères, au milieu d'un site extrêmement curieux
et sauvage.
Le Déluge dans la Forêt de Vouvent (d'après
une eau-forte de M. de Rochebrune).
Cependant une seconde série de sédiments se dépose
et forme, dans les cantons de Palluau, Challans, Saint-Gilles et
les Sables-d'Olonne des calcaires crétacés.
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« Du hameau de Vaines, commune de la Garnache, au manoir de l'Essart,
derrière le bourg de Bois-de-Céné, une, immense
feuille de schiste paraît avoir été rompue d'un
seul trait dans le cataclysme diluvien. Le diluvium a recouvert
la plaine jurassique de Challans, l'a inondée de sable et
de cailloux, puis il a dirigé un filon d'argile, qui, partant
de la rive droite du Ligneron, devant le bourg de Soullans, s'est
élancé à travers le marais, sur une longueur
de six kilomètres, avec une largeur, moyenne de 7 à
800 mètres : aucun banc de rocher n'existe dans cet espace
que recouvre une couche sableuse. C'est ce que l'on nomme la presqu'île
de Soullandeau.
Mais le plus remarquable effet du diluvium paraît être
sur la rive gauche de la Vie. Là, à moins d'un kilomètre
d'Apremont, les tranchées de la route allant à Coëx
ont mis à découvert le lit d'un courant, qui, sur
un banc de schiste, a roulé des' blocs de grès, dont
les uns, détachés à la surface du sol, méritent
lé nom de blocs erratiques les autres, en plus grand nombre,
sont enfouis sous terre et remplissent le lit aujourd'hui comblé
du torrent diluvien
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En allant de Maint-Gilles vers Bourgneuf, on rencontre d'abord
l'ancienne île de Rié (1) qui, appuyée à
la rivière de Vie, forme un massif de schiste, duquel se
détachent trois appendices sablonneux, dont l'uni le seul
que nous mentionnions pour le moment, suit le rivage actuel de la
mer. Un cours d'eau nommé liesse, où remontait la
marée, sépara l'île de Rié de l'île
de Monts jusque vers la fin du XVIIe siècle. Il est aujourd'hui
comblé et ne se laisse plus reconnaître qu'à
une large et profonde dépression au milieu des dunes. L'île
de Monts venait après l'embouchure de. Besse.
Après l'île de Monts ( insula de montibus ) l'histoire
nous montre, au IXe siècle, un simple banc d'alluvion coquillière
et argileuse ou était assis un groupe habité nommé
Ampennum et plus tard désigné sous le nom de fief
d'Ampan, de forteresse d'Ampan (à l'est de la Barre-de-Monts) (2).»
Durant la longue suite de siècles dont se compose la période
jurassique, la lisière méridionale du bocage, qu'on
appelle la grande plaine de la Vendée, était la limite
de notre continent. Tout ce qui existe aujourd'hui de terre depuis
cette limite jusqu'à la Sèvre-Niortaise et la mer
était couvert parles eaux de l'Océan. Un de ces phénomènes
qui étonnent l'imagination, mais qui ne sont qu'un jeu pour
la nature, mit tout à' coup à découvert une
superficie de trente-sept lieues.
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Du reste, le séjour de la mer sur la plaine est constaté
par des témoins irrécusables, c'est-à-dire
par des coquillages marins entiers, par des empreintes et des pétrifications
de cornes d'ammon, de cames, de pèlerines, etc.
En 1834, on a découvert, dans une carrière de la
commune de Xanton-Chassenon, divers ossements d'une proportion gigantesque.
Ces ossements étaient enfouis à 30 ou 40 centimètres,
dans une argile jaunâtre reposant immédiatement sur
le calcaire crétacé. Les principaux consistent 10
en une sorte de mâchoire de baleine d'environ 1 m. 30 de longueur;
2° en un fragment paraissant appartenir à l'épine
dorsale d'un cétacé, et ayant une longueur de 1 mètre.
Nous avons vu, dans l'ancienne abbaye de Saint-Michel-en-l'Herm,
un fanon de baleine, trouvé sous le bri de la cour, à
environ 4 mètres de profondeur (3).
Lorsque la retraite des eaux eut laissé la plaine à
découvert, il est probable que le marais méridional
s'avançait jusqu'au Pertuis-Breton. Peut-être, même,
l'île de Ré en faisait-elle alors partie?
Du reste, à une époque qu'il est impossible d'assigner,
-très reculée sans doute, -quoique postérieure
d'un grand nombre de siècles à la première,
la mer, agissant en sens contraire, envahit une seconde fois une
partie du sol qu'elle avait abandonné, le déchira,
le creusa très profondément, et laissa ainsi à
découvert une grande partie des cantons de Luçon,
Maillezais, Fontenay et Chaillé-les-Marais.
Quelques parties du sol se trouvèrent assez élevées
pour être à l'abri de l'inondation, ou assez solides
pour résister à l'érosion. Il en résulta
deux promontoires, assez avancés dans la nouvelle mer : l'un
à la pointe de Saint-Denis-du-Payré, l'autre à
celle du Gué-de-Velluire, et aussi un grand nombre de petites
îles dont le sol, absolument semblable à celui de la
plaine, atteste l'identité d'origine. Ces îles, au
nombre de seize, que l'on distingue encore aujourd'hui facilement,
sont : 1° l'île de la Bretonnière ; - 2° de
la Dive, sur la côte du golfe de l'Aiguillon; - 3° de
Grues ; - 4° de Saint-Michel-en-l'Herm ; - 5° de Triaize
; - 6° de la Dune; - 7° du Vignaud (ces trois dernières
dans la commune de Triaize) ; - 8° de Champagné, Puyravault
et Sainte-Radégonde-des-Noyers ; - 9° de Moreilles; -
10° de Chaillé-les-Marais; - 11 du-Sableau; - 12°
d'Aisne (ces trois dernières dans la commune de Chaillé-les-Marais)
; - 13° de Vouillé; - 14° de Vix; - 15° de Maillerais
- 16° de l'Ile-d'Elle.
Telle est l'origine de cette vaste étendue de marais que
nous voyons sur les deux rives de la Sèvre-Niortaise, sur
celles du Lay, sur les côtes du golfe de l'Aiguillon et du
Pertuis-Breton, depuis Saint-Liguaire, près de Niort, jusqu'à
Longeville. La longueur de cette plage marécageuse, qui appartient
aux départements de la Vendée, des Deux-Sèvres
et de la Charente-Inférieure, est de plus de vingt lieues,
et sa largeur moyenne de quatre lieues.
Cette plage gagne en étendue de jour en jour, et les accroissements
de la terre ferme, évalués pour le seul golfe de l'Aiguillon
à 30 hectares par an, ne peuvent s'expliquer uniquement parle
dépôt des alluvions d'origine marine et fluviale; la
plupart des géologues admettent que d'autres forces ont pris
part à l'exhaussement du sol; ainsi, divers indices paraissent
établir que l'anse de l'Aiguillon, de nos jours assez peu
étendue, était, il y a 2000 ans, un golfe s'avançant
au loin dans l'intérieur des terres, et que la Sèvre-Niortaise
se jetait dans la mer immédiatement à l'issue de sa
vallée de collines.
D'ailleurs, les anciens îlots dont nous avons parlé
plus haut portent des traces d'érosion à un niveau
plus élevé que celui de la mer actuelle ; nous pourrions
citer à l'appui de notre assertion, les fameux bancs d'huîtres
de Saint-Michel-en-l'Herm, dont l'origine fait la désolation
des savants, et qui, élevés aujourd'hui à douze
mètres en moyenne au-dessus du niveau de l'Océan,
ont été, paraît-il, utilisés aux IX et
Xe siècles pour la construction d'une jetée, abritant
un port maintenant éloigné de la mer de plus de 6
kilomètres. Au moyen âge, Talmont était un port
de mer, et plus tard Henri IV y envoya de l'artillerie par eau :
on voit encore- au pied du château des anneaux _qui servaient
à attacher des navires. Dans la carte de Jean Jollivet, qui
est du XVIe siècle, Luçon est représenté
sur le bord de la mer, et le golfe s'avance jusqu'à Marans,
qui est aujourd'hui à 11 kilomètres au fond de l'anse
de l'Aiguillon. En 1.216, Maillezais est, dans une charte, qualifié
de port de mer, et à la même époque, Agnès
de Bourgogne donne à l'abbaye de Saintes, l'île de
Vix, en Poitou, aujourd'hui à, 22 kilomètres de la
mer.
A une époque très reculée, la baie de Bourgneuf
s'avançait dans le continent de 10000 mètres de plus
qu'aujourd'hui, et la mer couvrait tous les marais des' communes
de Bois-de-Céné, Châteauneuf et Saint-Gervais.
Entre Beauvoir et l'île de Bouin se trouvait un détroit
dont la largeur devait être au moins de 4000 mètres,
et par lequel le bras de mer qui sépare l'île de Noirmoutier
du continent communiquait avec le golfe. Ce détroit, qui
existait lorsque le château de Beauvoir fut assiégé
et pris par Henri IV, au mois d'octobre 1588, n'est plus aujourd'hui
qu'un simple fossé. Le château de Beauvoir, maintenant
démoli, était bâti sur un banc de coquilles
d'huîtres, à cent mètres en avant d'un promontoire
schisteux et de la petite ville de même nom.
A l'entrée du golfe était-placée l'île
de Bouin, qui s'est accrue considérablement depuis des siècles
et qui s'accroît chaque jour des atterrissements qui se forment
sur nos `côtes. Toute la partie du continent située
à l'ouest de Beauvoir était couverte par les eaux,
et les cartes du XVIe siècle (4), les plus anciennes que
nous connaissions, indiquent le cours du Ligneron comme se prolongeant
à travers les marais et s'embouchant à la Barre-de-Monts.Dans
le même temps, le bras de mer qui sépare Noirmoutier
du continent s'enfonçait également dans les terres
du côté du sud-est et formait un second golfe plus
étendu que le premier.
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