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CHAPITRE XXIV
LES PROTESTANTS DU BAS-POITOU DEPUIS LA PRISE DE LA
ROCHELLE (1628) JUSQU'A LA RÉVOCATION DE L' ÉDIT DE NANTES
(17 Octobre 1685)
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Le culte protestant
interdit à Montaigu, La Chaume, Bessay, Bournezeau, etc (1632-1635-1641)
Déclaration
de 1656
Synodes nationaux
interdits (1662)
Colbert de Croissy
et La Noue, commissaires en Bas-Poitou
Production de titres
par les églises réformées
L'exercice du culte
protestant est maintenu à Fontenay et à Saint-Hilaires-des-Loges.
- Interdit à Saint-Benoît, Puybelliard, Luçon, Chantonnay,
etc. - Ordre de démolir les temples condamnés (6 août
1665)
Députation
protestante à Paris. - Mesures prises pour l'exécution
de l'arrêt du 6 août 1665
PROCES-VERBAL DE DÉMOLITION
DE 17 TEMPLES PROTESTANTS EN BAS-POITOU
Règlement
restrictif de l'exercice du culte protestant (2 avril 1666). - Exode
des réformés
Ere d'apaisement,
1669 à 1674
Vexations isolées
à l'occasion du synode de Niort (Novembre 1672). - Députés
admis
Nouveaux arrêts
coercitifs (1674-1675-1676 et 1677). - Fondation du séminaire
de L'Union-Chrétienne à Luçon
Persécutions
organisées par de Marillac. - Les soldats missionnaires ou les
missions bottées (Mars 1681)
Conversions forcées
à Foussais (Août 1681)
Protestation énergique
de Ruvigny. - Le Marquis de Venours et Lestortière à Paris
(1681)
Protestants partant
pour l'éxil, arrêtés à La Rochelle (1er novembre
1681) et mis en prison
L'émigration
continue et aussi les persécutions. - Saint-Hilaire-sur-l'Autise
(Février 1683)
Démolition
du Temple de Mouchamps et tranfert de celui de Pouzauges (1683). - Interdiction
contre les ministres
Synode provincial
de Fontenay (9-15 juin 1683)
Démolition
du temple de Pouzauges (Août 1685)
Nomination d'office
de pasteurs. - Les protestants exclus des fonctions publiques. - Edit
de révocation (17 Octobre 1685)
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LE CULTE PROTESTANT ; INTERDIT A MONTAIGU,
LA CHAUME, BESSAY, BOURNEZEAU, ETC. (1632-9635-1641)
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Pendant plusieurs années, à partir du, siège
de la Rochelle, le protestantisme, dégagé de toutes
ses préoccupations politiques, entre dans une ère plus
calme et revient à soi, et sous Richelieu, bien que les principes
du gouvernement fussent moins explicites que sous Henri IV, la conduite
du pouvoir public vis-à-vis des réformés ne fut
plus que tracassière.
Beaucoup d'églises, dont le sort dépendait de quelque
famille noble, virent leurs droits reconnus ou méprisés,
selon que le seigneur était de l'une ou de l'autre religion.
Or, c'était le temps des apostasies : comme au sortir de toutes
les époques d'agitation, un affaissement moral succédait
à une période de surexcitation. Les chefs des maisons
de la Trémouille, de Saint-Gelais, de Bessay renonçaient
au protestantisme, en même temps qu'à leurs impuissantes
tentatives d'indépendance féodale, et en 1632, le culte
réformé était interdit à Montaigu, dont
le seigneur était le duc de la Trémouille. Le 27 mars
1635, le comte d'Olonne, Philippe de la Trémouille, grand sénéchal
du Poitou, obtenait du Parlement un arrêt qui défendait
de célébrer le culte réformé dans le comté
d'Olonne, et particulièrement à la Chaume, où
il était établi depuis 1592.
L'Eglise de Benet. D'après un cliché
de M. H.Turpault.
La petite noblesse, moins engagée dans la politique, restait,
en général, comme le peuple, attachée à
sa foi, et plusieurs de ses membres, tels que Louis de Chasteigner
et le sieur Marleray de la Socelière, faisaient leur possible
pour assurer le prêche dans les fiefs de Bessay, Mareuil et
Foussay.
Le Synode national de 1637 demanda le rétablissement du culte
interrompu. aux Herbiers et à Montaigu. - Luçon, Benet.
Coulonges, Belleville figurent toujours sur les listes des lieux où
il n'avait pas été possible de le rétablir.
Le 15 mars 1641, le culte protestant était, à l'instigation
de l'évêque de Luçon, supprimé à
Bessay ; le 13 août de la même année, la même
mesure était appliquée à Bournezeau, avec défense
de célébrer le culte dans toute la baronnie.
En 1638, Gabriel de la Lande de Machecoul déclara faire élection
de domicile à Montaigu, dont il était devenu seigneur
et voulut, en même temqs, y laisser pratiquer librement le culte
réformé. Puis rendant vexation. pour vexation, il commença
à faire démolir l'église collégiale de
Saint-Maurice, bâtie dans l'enceinte du château. Le clergé
s'y opposa et prétendant que l'élection de domicile
était illusoire, obtint le 7 septembre un arrêt du Parlement
portant défense de faire le prêche au château de
Montaigu ainsi qu'à Vieillevigne, autrement qu'en présence
du seigneur ou de sa famille. Une requête faite par les protestants
de Luçon fut considérée, le 1er juillet 1642,
comme inopportune. En 1645, le culte réformé était
interdit au château et dans le bourg de Mareuil, mais on autorisait
les protestants à continuer leurs assemblées ailleurs
que dans la maison de la Boulaye, et à transporter leur temple
dans un autre lieu.
Chaque jour on arrachait ainsi quelque lambeau de l'Édit de
Nantes, et les adversaires les plus ardents de l'hérésie
pouvaient espérer en venir à bout par cette lente résistance
; mais cette confiance fut contrariée par les événements.
Sous Mazarin, il n'y eut pour ainsi dire point de déviation
tant que l'autorité ministérielle fut contestée,
et les protestants furent traités avec beaucoup d'égard
pendant la Fronde ; ils obtinrent même, au mois de mai 1652,
récompense de leur « affection et fidélité
» et en dépit des remontrances de l'assemblée
du clergé, une déclaration par laquelle semblaient révoqués
tous arrêts du conseil du roi et des cours souveraines qui auraient
pu porter quelque atteinte soit à l'Édit de Nantes,
soit aux autres édits, arrêts, règlements, etc.
- expédiés en leur faveur. - Le gouvernement une fois
raffermi, on commença de les moins ménager, et on laissa
voir une certaine disposition à restreindre leurs libertés,
et le 23 janvier 1653, l'évêque de Luçon faisait
rendre par le sénéchal du Poitou une ordonnance qui
défendait de célébrer le culte dans la forêt
de la Lande-Blanche, ou la dame du Vergier de Buchignon avait, l'année
précédente, fait bâtir un oratoire ; des mesures
analogues étaient prises en 1655 contre une annexe du temple
de Bazoges-en-Pareds et contre celui de Saint-Hilaire-des-Loges ;
mais, pour ce dernier, le culte y fut rétabli peu de temps
après, avec le consentement du seigneur de la Baugisière,
dans le fief duquel il avait été construit.
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|
DÉCLARATION DE 1656
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En 1656, une nouvelle déclaration annula de fait celle de
1652 sous prétexte de l'interpréter, et chargea deux
commissaires, un de chaque religion, de visiter chaque province pour
prendre connaissance des différends relatifs â l'Édit
de Nantes. En décembre 1656, le culte réformé
fut interdit dans les villes épiscopales et dans les localités
appartenant à des ecclésiastiques ; il fut défendu
aux ministres de prêcher ailleurs que dans le lieu de leur résidence.
En janvier 1657, un arrêt du conseil décida que les temples
bâtis par des seigneurs protestants seraient démolis
quand le fief passerait à un seigneur catholique et qu'on ne
pourrait les relever si la terre était revendue à un
protestant.
Le bourg du Boupère étant passé entre les mains
du marquis de Pouzauges, le présidial y défendit aussitôt
l'exercice de la religion et ordonna la démolition du temple
bâti depuis quelques années. A Mareuil, la conversion
du maître eut les mêmes conséquences.
Les progrès de la puissance et le l'unité monarchique
tournaient contre eux, quoiqu'ils eussent depuis longtemps oublié
les vieilles prétentions à faire un état dans
l'état. La plus grande part toutefois, dans ces mesures malveillantes,
devait être attribuée, non point à l'initiative
du gouvernement, mais à la pression qu'exerçait le clergé
sur les dispositions de l'autorité royale.
Mazarin était mort en mai 1661 ; l'avènement de Louis
XIV amena de nouveaux principes plus élevés, plus systématiques,
mais en même temps plus défavorables encore à
la Réforme.
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SYNODES NATIONAUX INTERDITS (1662)
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Depuis l'Édit de Nantes, les réformés avaient,
tenu des synodes nationaux tous les trois ans. En 1662, l'époque
triennale arrivée, le roi ne les autorisa pas à se réunir,
et on leur fit entendre qu'ils devaient se contenter dorénavant
de synodes provinciaux. L'année précédente, les
colloques avaient déjà été interdits,
c'est-à-dire qu'on supprimait à la fois les assemblées
générales et les assemblées particulières,
en laissant subsister provisoirement le degré intermédiaire,
les assemblées provinciales.
Le synode provincial, qui se tenait assez régulièrement
chaque année, se réunit à Châtellerault
du. 27 juin au 5 juillet. Quarante-sept églises, dont la plupart
avec des annexes, figurent sur la liste de cette assemblée,
où presque toutes se firent représenter, les circonstances
difficiles dans lesquelles on se trouvait lui donnant une importance
particulière (1).
Attaquées jusque là séparément, elles
allaient avoir toutes à la fois de nouvelles vexations à
essuyer. L'assemblée, sur le poids de cette pensée,
prit quelques mesures de prudence et se remit à la volonté
de Dieu.
Attaquées jusque là séparément, elles
allaient avoir toutes à la fois de nouvelles vexations à
essuyer. L'assemblée, sur le poids de cette pensée,
prit quelques mesures de prudence et se remit à la volonté
de Dieu.
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|
NOTES:
(1) Les églises protestantes les plus éprouvées
alors étaient pour le Bas-Poitou, celles de Chantonnay, Puybelliard,
Saint-Hilaire-sur-l'Autise, le Breuil-Barret, Mareuil et Frosse, Sainte-Hermine
et enfin la Jaudonnière.
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COLBERT DE CROISSY ET LA NOUE, COMMISSAIRES
EN BAS-POITOU
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Les deux derniers synodes tenus à Pouzauges en 1661, et à
Saint-Maixent, à la fin du mois d'août de l'année
suivante, s'étaient déjà préoccupés
de la venue des commissaires, Colbert de Croissy et la Noue, seigneurs
de Montreuil-Bonnin (1), et avaient ordonné aux églises
de faire faire des copies ou des extraits de leurs titres, pour justifier
leurs droits, et de les envoyer au ministre Gilbert de Melle, chargé
de les mettre en ordre.
Le clergé catholique triomphait sur presque tous les points.
En avril 1663, une déclaration royale interdit à tout
protestant devenu catholique, de retourner àla religion prétendue
réformée, et, à tout prêtre ou religieux
d'embrasser la Réforme : c'était enlever de l'Édit
de Nantes son principe et sa base : désormais, le libre choix
entre les principales formes du christianisme n'était plus
le droit commun des Français.
La magistrature, presque toujours d'accord avec le clergé
quand il s'agissait de la Réforme, se déchaina aussitôt
contre les apostats et les relaps : il fallut que le conseil du roi
intervint pour défendre de donner à la déclaration
un effet rétroactif ; puis pour terminer quelle peine on infligerait
dorénavant aux apostats et aux relaps ; la peine décrétée
fut le bannissement perpétuel (juin 1665).
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|
NOTES:
(1) Avaient été nommés dès
le mois d'octobre 1661.
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PRODUCTION DE TITRES PAR LES ÉGLISES
RÉFORMÉES
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Le 29 novembre 1663, les deux commissaires envoyés en Bas-Poitou
avaient ordonné aux églises et aux seigneurs de produire
dans la quinzaine, les titres en vertu desquels ils jouissaient du
culte, avaient des temples, des collèges ou des écoles
et des cimetières. Les opérations furent longues par
suite des enquêtes et contre-enquêtes, et du rappel momentané
de Colbert de Croissy. Enfin le 17 janvier 1665 et jours suivants,
les commissaires ouvrirent leurs audiences. Mauclerc de la Muzanchère
(1) et Gilbert, ministre de Melle, députés généraux
des protestants du Poitou (2), Boursault, leur avocat, avec les délégués
particuliers des églises et les syndics des diocèses
de Poitiers, Luçon et la Rochelle au détroit de Maillezais,
comparurent à Poitiers.
Les commissaires n'ayant pu se mettre d'accord sur les conclusions
à donner à leurs enquêtes, la difficulté
fut portée au conseil, qui donna un arrêt conforme à
l'avis du commissaire catholique, très conforme lui-même
à la requête du clergé.
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|
NOTES:
(1) Mauclerc était seigneur de la Muzanchère
et baron de Beaussais, et ancien de l'église de la Jaudonnière,
député du Poitou au syndic d'Alençon en 1637.
(2) Gilbert devint plus tard pasteur à Paris
; après la révocation, il se retira en Suisse.
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L'EXERCICE DU CULTE PROTESTANT EST
MAINTENU A FONTENAY ET A SAINT-HILAIRE-DES-LOGES.-INTERDIT A. SAINT-BENOIT,PUYBELLIARD,
LUCON, CHANTONNAY, etc. - ORDRE DE DÉMOLIR LES TEMPLES CONDAMNÉS
(6 Août 1665)
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Le 6 août 1665, les partages furent vidés. L'exercice
du culte était, pour le Bas-Poitou, maintenu à Fontenay
et à Saint-
Hilaire-sur-l'Autise. Le jugement sur Mouchamps et Pouzauges était
ajourné. L'arrêté prononçait ou maintenait
l'interdiction de Saint-Benoît, de Puybelliard, Luçon,
La Chaume, Belleville, Le Poiré, Ste-Hermine, le Boupère,
Chantonnay, St-Gilles-sur-Vie, Talmont, Mareuil, la Jaudonnière,
Mouilleron, St-Fulgent, Benet, la Brossardière et la Châtaigneraie,
Foussais, la Buardière, Cezay et le Givre.
Quant à l'exercice dit de fief, de château ou de haute
justice, on le conservait aux seigneurs de Montaigu, Chavagnes, les
Touches, Aizenay et le Breuil-Barret « à la charge d'y
résider actuellement, de bonne foi et sans fraude, et sans
qu'ils y puissent bâtir un temple ». La Lande-Blanche,
la Chapelle-Thémer où Bodet et la Moriniére étaient
interdits, le conseil ne prononçait pas sur Nesmy, La Mothe
de Frosse et Château-Guibert.
On donnait deux mois aux réformés du Poitou pour démolir
les édifices condamnés. Ce délai expiré
les syndics diocésains étaient autorisés à
les faires abattre aux frais des protestants.
L'arrêt fut signifié le 12 du même mois à
M. de la Muzanchère, en son domicile à Paris, par Pierre
Fournier, huissier-sergent à cheval au Châtelet de Paris.
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DÉPUTATION PROTESTANTE À
PARIS. - MESURES PRISES POUR L'EXÉCUTION DE L'ARRÊT DU
6 AOUT 1665.
(13 Novembre 1665)
|
Cependant les protestants, dans l'espoir de faire atténuer
la sentence, députèrent à la cour trois gentilshommes
chargés d'un mémoire, où l'on exposait les embarras
qui résulteraient de l'exécution de l'arrêt non
seulement pour les fidèles, mais aussi pour les pasteurs obligés
souvent par leurs fonctions de se transporter à plus de vingt
lieues de leur résidence par des chemins presque impraticables.
Ils demandaient en conséquence qu'on conservât dans le
Bas-Poitou les églises de St-Gilles, Talmont, St-Benoît,
Mareuil, le Puybelliard, la Châtaigneraie, St-Jouin (?) Belleville
et St-Fulgent.
Les députés furent bien reçus : le chancelier
se fit présenter la carte de la province pour juger des incommodités
allégués par eux. Mais le roi n'accorda rien d'une manière
positive. Il permit seulement aux seigneurs d'avoir des ministres
après avoir justifié devant La Noue et Barentin, successeur
de Colbert, que leurs fiefs avaient titre de haute justice à
l'époque de l'Édit de Nantes (1).
Le délai de deux mois, fixé par l'arrêt du 6
août 1665 pour la démolition des temples expirait donc
le 12 octobre, mais ce ne fut que le 3 novembre que l'on devait s'occuper
de l'exécution intégrale des ordres du roi. A cette
date, M. Jacques Micheau, prêtre, prieur de Saint-Sulpice, syndic
du diocèse de la Rochelle au détroit de Maillezais,
au nom et ayant charge de docteur en Sorbonne ; M. Antoine Froment,
aussi prêtre doyen et syndic de Luçon, comparaissaient
devant Pierre de Maurienne, conseiller du roi et vice-sénéchal
de Fontenay-le-Comte, et Julien Collaideau, procureur, pour les requérir
d'avoir à faire exécuter l'arrêt royal du 6 août
1665. Il invitait Maurienne et Collardeau de se transporter avec lui
Micheau, Froment, le greffier et tel nombre d'archers qu'il était
nécessaire dans les divers lieux où étaient situés
les temples dont la démolition était ordonnée.
Le procureur du roi ayant pris des conclusions conformes, le transport
de la commission sus-indiquée fut décidé avec
l'assistance de Roc-Jourdain, archer, remplaçant comme greffier
le greffier ordinaire Pierre Boulin, appartenant à la R. P.
R., d'un exempt, Pierre Cheuredant, et des cinq archers, Nicolas Bisson,
René Beau, Jean Pignol, François Guesdon, Pierre Bonnet.
La commission exerça, ses fonctions du 4 au 25 novembre, avec
un zèle qui dut satisfaire le roi. Le procès-verbal
détaillé de ses opérations a été
publié par MM. Puichaud, d'après le manuscrit original
communiqué par M. Georges Treuttel, ancien traire de Sérigné
(s2) : nous n'en donnerons ici qu'une courte analyse.
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|
NOTES:
(1) Décisions catholiques de Filleau, page 141.
(2) Ce manuscrit, de trente centimètres de limiteur
sur vingt de largeur, comprend trente-deux pages et demie d'écriture,
de la main de Julien Collardeau. Cette écriture est médiocre
et offre certains points de réelles difficultés de lecture.
- Note des auteurs, page 3.
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PROCES-VERBAL DE DÉMOLITION
DE 17 TEMPLES PROTESTANTS EN BAS-POITOU
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Noms des localités
ou se trouvent les temples à démolir
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Date et heure
d'arrivée
des commissaires
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Nom de l'Hotel
ou sont descendus
les commissaires
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Jours et heures
de départ
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Observations
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SAINTE-HERMINE
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Mercredi 4 novembre
9 h. du matin
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M. Hilleret, hôtelier
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Midi
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Ordonnace signifiée à M. Louis
Dartrois, ministre de Ste-Hermine
|
MAREUIL
|
D. 3 heures du soir
|
Écu de France
|
Jeudi 5 novembre
à 3 heures
|
Logement du ministre était au-dessus
du temple et se composait de 2 chambres. 25 ouvriers furent
occupés à la démolition qui coûta
31 livres.
|
LA JAUDONNIERE
|
Vendredi 7 novembre
|
|
5 heures, couché à la Caillère
et rentré le lendemain à Fontenay
|
Zaquarie Bart, ministre
|
LANDEBLANCHE
Seigneurie
|
16 nov. couché à Ste-Hermine
arrivée à Bournezeau, hôtel Haide, le lendemain
17 à 10 heures
|
Arrivée à Bournezeau, hôtel
Haide, le 17 nov.,
à 10 heures.
|
17 nov. à 6 heures, couché aux
Essarts, Hôtel St-Michel, tenu par Teiral
|
Opposition de Joachim de Patars, sieur de
Teiral, pour Pierre du Patras, sgr de Landeblanche et du Buchignon,
ancien de Bournezeau.
|
SAINT-FULGENT
|
18 novembre, 9 heures
|
Le Lion
|
4 heures
|
Couché à St-Denis-la-Chevasse,
arrivé à 5 h. et descendu à l'Hôtel
des Trois-Piliers. Départ le lendemain à 8 h.
du matin. Ce temple était la propriété
des Bertrand. Interdit en 1675, le culte y fut rétabli
avec simple exercice de fief ou de château.
|
BELLEVILLE
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19 novembre, 10 heures
|
|
4 heures du soir
|
Couché aux essarts. Le temple de Belleville
était desservi, en 1663, par Théodore Tireau,
qui alors desservait aussi ceux du Poiré et d'Aizenay.
|
SAINT-GILLES-SUR-VIE
|
20 novembre, 1 h. 1/2
|
La Croix-Blanche
|
5 heures
|
Charles Mallet, ministre. Couché à
Saint-Gilles.
|
LES SABLES D'OLONNE
(La Chaume)
|
21 novembre, 2 h. 1/2
|
La Coupe
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22 nov. 3 heures du soir
|
Employé 6 ouvriers à chacun
desquels on a donné 30 sous.
|
TALMONT
|
22 novembre, 1 h. du soir
|
Cheval blanc
|
23 nov. 3 heures
|
Pierre Bossatran, pasteur. Temple situé
dans la haute ville, touchant le cimetière.
|
SAINT-BENOIT
|
23 novembre, 5 h. du soir
|
Logis de Ivonne Robin, hôtelière
|
24 novembre
|
Le temple de St-Benoit était démoli
depuis 8 jours, à la réserve d'un pignon.
|
LE GIVRE
|
24 novembre, 9 heures
|
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Temple démoli depuis le 16 novembre.
Curé : Jacques Grelez.
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LUÇON
|
24 novembre, 4 heures
|
La Coupe
|
|
Temple entièrement démoli.
|
BOUPÈRE
MOUILLERON
PUYBELLAIRD
CHANTONNAY
|
|
|
|
Ces temples avaient été démolis
pendant le voyage des commissaires. La taxation fut appliquée
quand même.
|
Sur le procès-verbal signé de Maurienne, Froment, Collardeau,
se lit la mention suivante que nous reproduisons textuellement :
« Nous nous sommes taxez pour quinze journées de
vaccations et despens, à raison de dix-huict livres par jour,
la somme de deux-cent-soixante-dix livres, et s'est le procureur du
Roy taxé pour pareille cause la somme de deux-cens-vingt-ung
livres et avons taxé à nostre greffier et exampt, à
raison chascun de neuf livres par jour, la somme de deux-cens-soixante-dix
livres et à nos archers, au nombre de quatre, à chascun
d'eux pour leurs vaccations et despans trante-six livres, pour les
guides taxé pour nous avoir conduit sur les lieux. cy-dessus
mentionnez, la somme de vingt livres : avons aussy taxé aux
massons, charpentiers et manouvriers quy ont travaillé aux
démolitions, cent livres, y compris en icelles les taxes mentionnées
et spécifiées en ce présent procès-verbal.
Nous a ledit sieur sindicg déclaré avoir desbourcé
pour la despance de son bomme de chambre et un homme de pied, à
raison de sept livres dix sols par jour, cent-unze livres et dix sols.
« Toutes lesquelles despances cy-dessus ont estez paiées
et advancées par ledit sieur sindicg.
« DE MAURIENNE, J. COLLARDEAU. »
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|
REGLEMENT RESTRICTIF DE L'EXERCICE DU CULTE
PROTESTANT
(2 Avril 1666). - EXODE DES RÉFORMÉS
|
Quatre mois après l'exécution de l'arrêt du 6
août 1665, un règlement général du 2 avril
1666, sur l'exercice du culte prétendu réformé,
fut publié à la demande de l'assemblée du Clergé
c'est assez dire quel en fut malheureusement l'esprit. Il avait été
précédé de mesures restrictives contre les consistoires,
et fut accompagné d'une défense aux particuliers protestants,
de tenir académie (maisons d'instruction supérieure,
pour l'éducation de la jeune noblesse). Cette longue série
de vexations jeta l'effroi parmi les populations protestantes. Tandis
que les synodes provinciaux élevaient de toutes parts leurs
voix plaintives vers le roi, que celui de Lusignan arrêtait
que les ministres des églises interdites « presclieroient
à la campagne sous quelque arbre commode, où les peuples
pourroient s'assembler aux heures ordinaires », un assez grand
nombre de familles quittèrent la France, et les réformés
commencèrent d'apprendre cette route de l'exil, que tant de
milliers de Français étaient destinés à
suivre.
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|
ÈRE D'APAISEMENT, 1669 à
1674
|
Mais Colbert jugea l'avenir de ses établissements et la fortune
de la France compromis, si l'on poussait au désespoir tant
d'hommes, qui par leur activité commerciale et industrielle,
étaient les plus solides appuis de ses desseins. Il employa
énergiquement pour leur défense, ce salutaire ascendant,
auquel Louis XIV n'avait point encore appris à se soustraire
: Il appela de la passion sacerdotale et parlementaire à l'intérêt
de l'état, à l'équité du roi. Il fut secondé
par des considérations de politique extérieure. L'électeur
de Brandebourg avait adressé au roi de respectueuses remontrances
en faveur des réformés français : Louis, qui
alors ménageait encore les puissances protestantes, répondit
gracieusement à l'électeur, l'assura qu'il entendait
faire vivre les protestants « dans une égalité
parfaite avec ses autres sujets », et s'arrêta quelque
temps sur la pente fatale où il était entraîné
(1). Le zèle des parlements, des intendants et du clergé
fut maintenu : on ne vit plus se succéder incessamment les
coups de foudre des arrêts et des déclarations royales
; le règlement général de 1666, sur ou plutôt
contre l'exercice du culte prétendu réformé,
fut même révoqué par une déclaration du
1er février 1669, qui défendit de contraindre
ou induire les enfants protestants à changer de religion.
Les réformés crurent voir s'ouvrir une ère de
réparation et revenir le temps de Henri IV. De 1666 à
1674 environ, ils respirèrent sous la protection de Colbert
: ils prirent les arrêts et les édits, qui parfois les
inquiétaient encore, pour les derniers grandements d'un orage
qui expirait.
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|
NOTES:
(1) Histoire de l'édit de Nantes, T. IV,
p. 42. - Henri Martin, T. XIII, p. 603.
|
VEXATIONS ISOLÉES A L'OCCASION
DU SYNODE DE NIORT (Novembre 1672). - DÉPUTÉS ADMIS
|
Cependant, quelques actes hostiles indiquaient par intervalles que
s'il y avait adoucissement, il n'y avait pas changement total de système.
Des mesures d'oppression locale étaient ratifiées par
le conseil du roi. Ainsi, au mois de novembre 1672, un synode ne put
se réunir à Niort, qu'à la condition expresse
que les ministres et les anciens des églises condamnées
ne viendraient même pas dans la ville. Le consistoire fut obligé
de faire connaître les logements des députés des
lieux suivants, seuls autorisés à comparaître
pour le Bas-Poitou : Fontenay, Saint-Hilaire-sur-l'Autise, le Breuil-Barret,
Pouzauges, Les Touches, Mouchamps, Montaigu, Aizenay, Nesmy, La Mothe-de-Frosse
et Château-Guibert.
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NOUVEAUX ARRÊTS COERCITIFS (1674-1675-1676
et 1677). - FONDATION DU SÉMINAIRE DE L'UNION-CHRÉTIENNE
A LUÇON
|
Mais la pensée qu'avait eue le roi de gagner les pasteurs
protestants par des concessions sur quelques points de discipline
et de culte, et de ramener par eux leurs ouailles à l'unité
de l'Eglise ayant échoué, les édits et arrêts
oppressifs recommencèrent à se succéder ; - 6
novembre 1674, défense aux ministres de s'établir ou
de prêcher hors de leur résidence ; - 27 décembre
1675, 15 avril 1676, défense aux synodes de donner des ministres
aux seigneurs de fiefs qui n'en avaient point encore eu ; - 23 juillet
1677, défense aux réformés de suborner
les catholiques à peine de 1.000 livres d'amende.
L'appât de l'argent allait aussi venir en aide à l'intolérence,
et dans beaucoup d'endroits, sans attendre l'âge de 14 ans pour
les garçons qui désiraient se faire catholiques et celui
de 12 pour les filles, on enlevait souvent avant cet âge les
enfants aux parents, afin de les élever dans des couvents.
Une maison avait été fondée dans ce but à
Luçon, et cet établissement, connu sous le nom de Séminaire
de l'Union-chrétienne, ne tarda pas à se remplir lorsqu'on
reçut les abjurations à sept ans.
Distrait par la guerre du salut de ses sujets, que les évêques
ne cessaient de lui présenter comme une uvre plus importante
et plus glorieuse que ses autres conquêtes, Louis XIV y donna
toute son attention dès que la paix de Nimègue (1678)
fut signée. « Le roi, dit madame de Maintenon, pense
sérieusement à la conversion des hérétiques,
et dans peu il y travaillera tout de bon. »
Tout ce qu'on avait fait jusque-là dans ce but était
donc peu de chose auprès de ce qu'on projetait. Mais par quels
moyens allait-on travailler tout d'abord ? en Bas-Boitou, notamment
?
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PERSÉCUTIONS ORGANISÉES
PAR DE MARILLAC. - LES SOLDATS MISSIONNAIRES OU LES MISSIONS BOTTÉES
(Mars 1681)
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Louvois était alors ministre de la guerre : le Poitou faisait
partie de son département, et il y avait pour représentant
l'intendant Marillac, d'une famille disgraciée sous Louis XIII,
et qui cherchait alors à relever sa fortune. « A l'exemple
de Louvois, Marillac eut du zèle dès que le roi fut
dévot. Vers la fin de l'année 1680, il se mit à
faire des prosélytes : l'argent, l'injustice et enfin la violence
furent ses moyens. La pensée qui se présenta à
son esprit pour agir sur la conscience des hérétiques
poitevins fut la levée des impôts. Il restait des termes
arriérés qu'il voulait faire rentrer : les archers et
les huissiers parcoururent les paroisses et engagèrent les
protestants à se convertir, en annonçant qu'on devrait
exiger des huguenots seulement ces vieux arrérages. Dans plusieurs
endroits, on. notifia aux protestants que l'intention de S. M. était
qu'ils changeassent de religion.
Grâce à cette pression éhontée, un assez
grand nombre de huguenots abjurèrent, et la cour, trompée
par le nombre de ces prétendues conversions et leur apparente
facilité, crut qu'un peu de contrainte ramènerait tous
les réformés au giron de l'Eglise. Louvois, félicitant
l'intendant, l'autorisa à employer les soldats comme missionnaires
(18 mars 1681).
Telle fut l'origine de ces missions armées, qu'on appelé
Les missions bottées ou les dragonnades, lorsque quelques
années plus tard, elles se répandirent dans tout le
royaume.
Les troupes étaient logées indifférement chez
les riches et chez les pauvres, mais toujours chez les protestants.
Les troupes s'établissaient dans les maisons, vivant à
discrétion, brisant les meubles, frappant et torturant les
personnes, et ne délogeant qu'après avoir converti ou
ruiné leurs hôtes. Pour empêcher qu'on échappât
à cette alternative, Marrillac défendit, sous peine
de quatre-cents livres d'amende, de rien enlever des maisons et de
les abandonner lorsque les soldats y arrivaient.
Les personnes elles-mêmes, à la discrétion de
cette soldatesque sans frein, étaient l'objet de mauvais traitements
et de violences inouies ; tantôt on les trainait à l'autel
par les cheveux ou le corde au cou ; tantôt on arrachait le
laboureur à sa charrue et le conduisait à l'église,
en le pressant de son aiguillon. La privation continue de sommeil
était aussi l'un des tourments employés pour lasser
le courage des plus inflexibles.
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CONVERSIONS FORCÉES A FOUSSAIS
(Août 1681)
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Ces maux duraient depuis plusieurs mois, lorsque le duc de la Vieuville
fut nommé gouverneur du Poitou, en remplacement de Marillac,
le principal auteur de la persécution. On pensa que le nouveau
gouverneur, qui arrivait de Paris, serait moins hostile et écouterait
les plaintes. On s'adressa à lui. Il répondit qu'ayant
entretenu le roi des affaires de la province, Sa Majesté lui
avait témoigné le désir de voir ramener sans
violence ses sujets au giron de l'Église : mais la Vieuville
prétendait que les logements des gens de guerre ne devaient
pas passer pour de la contrainte, et le 12 août 1681, il envoya
à Foussais ses gardes, qui convertirent trois-cents personnes
en cinq jours. Quand on alla s'en plaindre et qu'on lui demanda ce
qu'il appelait donc violence, il répondit « que ce mot
devait s'appliquer à la conduite des soldats qui brûlaient
les pieds de leurs hôtes (1) ».
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NOTES:
(1) Benoist. Hist. de l'Edit de Nantes, t. IV,
livre XVII. - Lièvre, t. II, p. 1680.
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PROTESTATION ÉNERGIQUE DE RUVIGNY.
- LE MARQUIS DE VENOURS ET LESTORTIÈRE A PARIS (1681)
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Cependant la protestation énergique du marquis de Ruvigny,
député général, arrêta un peu les
tortionnaires, et le 19 mai 1689. le conseil fit « très
expresses défenses à toutes personnes, de rnéfaire
ni médire contre ceux de la R. P. R. sur les peines portées
par les édits. » Ce ne fut qu'une lueur d'espérance,
et le 4 juillet paraissait un nouvel arrêt pour détruire
le premier.. Il y était dit que « les ministres interprétant
sinistrement celui du. 19 niai étaient si osés que de
prêcher publiquement, que S. M. désavouait les exhortations
qui étaient faites de sa part au peuple d'embrasser la religion
catholique, apostolique et romaine (1). »
Peu de temps après, les églises du Poitou députèrent
à Paris le marquis de Venours et Lestortière, qui remirent
à Louvois une requête dans laquelle ils exposaient toutes
les tortures morales et souvent physiques de leurs coreligionnaires,
les dénis de justice commis à leur endroit, les grosses
amendes qu'on leur infligeait quand ils refusaient d'aller à
la messe ou d'écouter les sermons des capucins logés
chez eux, les violences commises à l'endroit des femmes traînées
par les cheveux et la corde au cou, ou mises à la torture,
etc. (2)
Louvois reçut ces plaintes en plaisantant, et quelques jours
après répondit aux députés « qu'il
avait rougi de honte d'avoir rapporté leur requête au
roi, parce que Sa Majesté lui avait dit être bien informée
que cette requête était pleine de faits supposés
». Le lendemain, les députés reçurent l'ordre
de se retirer.
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NOTES:
(1) Estat des réformez en France, Cologne,
1684.
(2) Voir Histoire des protestants, par Lièvre,
T.II, pages 119 et 112. - La suite de la Politique du clergé
de France, 4e éd., page 146.
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PROTESTANTS PARTANT POUR L'EXIL, ARRÊTÉS
A LA ROCHELLE (1er Novembre 1681) ET MIS EN PRISON
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Les persécutions continuaient; beaucoup de réformés
se décidèrent à prendre le chemin de l'exil.
Un grand nombre furent arrêtés avant même d'être
sortis de la province. Cent-cinquante autres furent pris sur un vaisseau,
dans la rade de la Rochelle, au moment du départ. Le jour de
la Toussaint 1681, trente-trois d'entre eux, qui étaient demeurés
dans la ville avec l'espoir de trouver un nouveau moyen de passer
à l'étranger, furent appréhendés par la
police et renfermés dans la tour de la Lanterne et les autres
prisons de la ville. D'autres fugitifs, en grand nombre, furent trouvés
sur les chemins ou attendant sur la côte. Quelques catholiques,
pris de pitié, ne pouvaient retenir leurs larmes, et leur apportèrent
du pain.
Quelques-uns des émigrants, au risque d'éveiller l'attention
de la police, avaient demandé un abri dans leurs maisons ou
leurs granges ; mais la plupart de ceux qui les avaient reçus
furent poursuivis ou jetés en prison.
« L'arrestation des fugitifs entraîna de même celle
de beaucoup de ministres dont ils portaient des attestations, et que
le gouvernement feignit de rendre responsables de l'émigration,
afin de les interdire et de rencontrer ensuite moins de difficultés
dans les conversions. Bossatran de Niort et sept anciens, Pain et
Du Soul, de Fontenay, avec quelques-uns des membres du Consistoire,
Paumier, Chaufepié, Champion, pasteur de Saint-Maixent, la
Mothe et Mougon, furent emprisonnés, décrétés
ou exilés dans des provinces éloignées.
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L'ÉMIGRATION CONTINUE ET AUSSI-LES
PERSÉCUTIONS. SAINT-HILAIRE-SUR-L'AUTISE (Février 1683)
|
L'émigration n'en continuait pas moins en Angleterre, en.
Danemark, en Hollande, où les protestants recevaient l'accueil
le plus sympathique. Cette fuite ruinait le pays et faisait tomber
les propriétés à vil prix. Le conseil ouvrit
enfin les yeux et, put voir ce que coûtaient à l'État
quelques milliers de mauvaises conversions. Dans les premiers jours
de décembre 1681, au moment où les troupes allaient
entrer dans le Bas-Poitou, elles furent tout à coup rappelées
« au grand regret et au regret non déguisé d'une
infinité de gens qui n'avaient pas encore achevé de
monter leurs maisons en meubles et leurs fermes en bestiaux (1) ».
Mais les menaces, les vexations de toutes sortes n'en continuèrent
pas moins, et le 27 décembre 1682, trois prétendus convertis
ayant assisté au prêche à Saint-Hilaire-sur-l'Autise,
furent condamnés, le 23 février suivant, à faire
amende honorable en chemise, la corde au cou, et bannis à perpétuité
du royaume. Le ministre Coupé fut interdit et le temple démoli
(2).
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NOTES:
(1) Journal de Jean Migault, édit. de
1854, page 74.
(2) Lièvre, T. II, page 135.
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DÉMOLITION DU TEMPLE DE MOUCHAMPS
ET TRANSFERT DE CELUI DE POUZAUGES (1683). - INTERDICTION CONTRE LES
MINISTRES.
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Le 15 janvier 1683, l'évêque de Luçon obtenait
la démolition du temple de Mouchamps, l'église la plus
importante du Bas-Poitou, et la seule avec Pouzauges dans tout le
diocèse, qui jouissait encore de l'exercice public du culte.
La translation du temple de Pouzauges fut ensuite décrétée,
et l'évêque obtenait que le culte qui se célébrait
aux Touches de Chavagnes-les-Redoux ne fut autorisé que pour
les habitants de cette seigneurie. On lui donnait en même temps
l'assurance que de semblables arrêts seraient rendus pour les
autres exercices de fiefs.
Au mois de mars, la peine d'interdiction décrétée
contre les ministres qui laisseraient entrer des relaps dans les temples
fut aggravée de l'amende honorable, du bannissement perpétuel
et de la confiscation des biens. La présence d'un ancien catholique
au prêche devait entraîner les mêmes conséquences
que celle d'un nouveau converti. Aussi, l'on eut d'autant plus sujet
de s'étonner de voir paraître, peu de temps après
cet édit, une déclaration portant que, dans les temples,
il y aurait un lieu marqué où se pourraient mettre les
catholiques qui, portés d'un saint zèle pour le bien
et l'accroissement de la religion désireraient assister aux
prêches... afin, est-il dit dans le préambule, non seulement
de pouvoir réfuter les ministres s'il est besoin, mais aussi
de les empêcher, par leur présence d'avancer aucune chose
contraire au respect dû à la religion, catholique, apostolique
et romaine, préjudiciable à l'Etat.
Les consistoires soumis à deux lois contradictoires étaient
dans le plus grand embarras, et il ne manquait pas de gens disposés
à profiter d'une législation absurde pour commettre
des iniquités.
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SYNODE PROVINCIAL DE FONTENAY (9-15
juin 1683).
ÉGLISES EXISTANT ENCORE A CETTE DATE
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« On ne savait quel parti prendre : quelques-uns proposaient
de fermer provisoirement tous les temples : la plupart, au contraire,
étaient d'avis de ne plus en garder les portes et de laisser
entrer tout le monde indistinctement. Mais, avant d'en venir à
cette extrémité, le synode provincial, réuni
à Fontenay depuis le 9 juin jusqu'au 15 du même, mois,
résolut de faire encore une tentative auprès du Conseil.
Il donna charge aux sieurs de Chavernay et de Payré, de se
rendre auprès du marquis de Ruvigny, pour qu'il tachât
de faire abroger la loi, et suppliât le roi de ne pas mettre
ses sujets de la religion réformée dans la nécessité
de lui désobéir, « ce qu'ils regardaient comme
le plus grand de tous les malheurs, après celui d'offenser
Dieu et de trahir les mouvements de leurs consciences ». Le
commissaire catholique voulut s'opposer à la délibération
et à cette démarche, votée à l'unanimité,
mais son adjoint réformé ne put s'empêcher d'en
reconnaître la légitimité. La cour, sans renoncer
à l'ancien usage de se faire représenter aux synodes
par un protestant, avait chargé en même temps un catholique
d'assister à celui de Fontenay. Les deux commissaires désignés
par le duc de la Vieuville étaient Jean-Baptiste de Loynes,
seigneur de Nalliers, et François-Hélie de Boisroux.
Cette assemblée a été la dernière légalement
autorisée. Le nombre des églises était alors
réduit à vingt-six, dont quatorze seulement avec droit
de culte public : Thouars, Châtellerault, Poitiers, Rochechouart,
Sauzé, Chef-Boutonne, Melle, Aulnay, Mougon, Niort, Cherveux,
Coulonges, Fontenay et Pouzauges. Les douze ayant exercice de fiefs
étaient : la Gastevine, la Millière, Ordière,
Couhé, Saint-Christophe-du-Roc, Payzay-le-Chapt, la Forest-sur-Sèvre,
le Breuil-Barret, Montaigu, Aizenay, Les Touches et Nesmy (1).
Le commissaire catholique refusa le droit de séance aux ministres
et aux anciens des églises de fiefs de Bourdevère, Saint-Fulgent,
Saint-Christophe-du-Ligneron, La Forêt-sur-Sèvre, la
Ferté, où le culte avait été suspendu
par ordonnance de Marillac (2).
Le nombre déjà bien réduit des églises
allait diminuer encore, et les dernières devaient finir par
disparaître dans l'espace d'une année.
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|
NOTES:
(1) Les localités dont les noms sont écrits
en italique appartenaient au Bas-Poitou.
(2) Actes du synode de Fontenay et Histoire
des protestants. - Lièvre, T. II, page 141.
|
DÉMOLITION DU TEMPLE DE POUZAUGES
(Août 1685)
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En 1684, on célébrait encore le culte dans le temple
de Pouzauges, mais dès le mois d'août 1685, il ne trouvait
pas grâce devant la pioche des démolisseurs. Celui du
Boupère ayant été démoli dès 1665,
c'était le dernier du diocèse, aussi cherchait-on tous
les prétextes pour le détruire. Le 1er mars 1684, on
y surprit une femme nouvellement convertie qui y faisait la cène,
malgré l'édit sur les relaps. La contravention fut aussitôt
poursuivie devant M. de Baville, intendant de la province, qui ordonna
la démolition du temple. On pensa généralement
que l'affaire avait été concertée avec cette
femme qui s'était prêtée au rôle qu'on lui
fit jouer.
Le 26 septembre 1685, l'intendant du Poitou, Foucault, de néfaste
mémoire, écrivait : « J'ai mandé à
M. de Louvois qu'il y avait 250 familles de religionnaires dans la
ville de Pouzauges, dont le temple a été démoli
depuis un mois, que ces familles ont été presque toutes
converties, à quoi ont beaucoup contribué les soins
de M. le marquis de Toucheprés, qui en est seigneur et qui
a même voulu que l'on mit des dragons chez ses métayers
(1) ». Joignant la cruauté et l'infamie au grotesque,
le lieutenant de la maréchaussée de Fontenay, Jean Ganacheau,
faisait, au mois d'avril 1685, traîner sur la claie, dans les
rues de Pouzauges, le cadavre d'une pauvre vieille femme de 78 ans,
qui, à son heure dernière, avait refusé de recevoir
les sacrements, après avoir abjuré, par force, ses croyances
(2).
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|
NOTES:
(1) Mémoires de l'intendant du Poitou,
à la suite des Mémoires des Fourches, p. 294.
(2) Louis Brochet. - Huit Jours dans la région
de la Châtaigneraie et de Pouzauges, pp. 76 et 77.
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NOMINATION D'OFFICE DE PASTEURS. -
LES PROTESTANTS EXCLUS DES FONCTIONS PUBLIQUES. -- ÉDIT DE
RÉVOCATION (17 Octobre 1685)
|
Toutes les églises réformées de la province
ou à peu près, étaient ainsi frappées
d'interdiction et les temples démolis ; mais comme Louis XIV
n'avait pas encore décrété qu'il n'y aurait plus
de protestants dans ses États, le Conseil nomma d'office des
ministres pour faire les baptêmes dans les vastes circonscriptions
privées de tout autre exercice du culte. Ainsi Betoule avait
à desservir le Puybelliard et le Boupère, outre Saint-Fulgent
où il demeurait ; Guitton devait s'établir aux Moutiers-les-Mauxfaits,
et aller à Saint-Hilaire-de-Talmont et Fenouiller (1).
Les protestants étaient exclus des emplois publics, des charges
municipales, des fonctions uniques de judicature, des places de greffiers,
des maisons consulaires, etc., de celles de procureurs, notaires,
avocats, etc., des professions de médecins, apothicaires, chirurgiens,
imprimeurs, libraires, etc. Le Poitou se dépeuplait, car partout
l'on voyait se renouveler les scènes affreuses des premières
missions bottées. « Les protestants, épouvantés
à l'approche des soldats, prenaient la fuite. Séparés
de leurs familles, ils erraient au hasard, restant à peine
un jour ou deux sous le même toit, et n'osant frapper que la
nuit à la porte de leurs amis. Les dragons allaient à
la chasse de ces malheureux qui désertaient ainsi leurs foyers.
A Coulonges, ils couraient après les femmes cachées
dans la campagne et les ramenaient à l'église. Toutes
les prisons regorgeaient, et l'on entassait les fidèles dans
les lieux les plus incommodes, ou leurs forces s'épuisaient
sans que leur constance défaillit. Non loin de Pouzauges, on
les jetait dans une basse fosse de l'abbaye de la Flocellière,
réceptacle infect de toutes les immondices du couvent, où
on les laissait croupir pendant plusieurs semaines (2).
Depuis que Louvois avait lâché ses dragons dans toutes
les provinces, on recevait à la cour des nouvelles incroyables,
des résultats prodigieux. Le soir, au coucher du roi, on apprenait
qu'une ville s'était convertie, le matin c'était une
province. Le 13 septembre c'est le Poitou, puis la Bretagne, etc.
« Je crois bien, disait Mme de Maintenon (3), que toutes ces
conversions ne sont pas sincères, mais Dieu se sert de toutes
voies pour ramener à lui les hérétiques. Les
enfants seront du moins catholiques, si les pères sont hypocrites.
»
Louis, ébloui par les fastueuses relations de ses ministres,
de son confesseur, des évêques et des intendants, crut
l'hérésie mourante, et se persuada qu'il ne s'agissait
plus que de frapper le dernier coup, en signant, le 17 octobre
1685, l'édit de révocation de la charte de liberté
octroyée par son grand-père.
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NOTES:
(1) Arrêt du Conseil, 16 juin 1685.
(2) Lièvre, T. u, page 15.
(3) Dans le courant de 1684 (la date précise
est inconnue), une messe de mariage fut célébrée
de nuit, dans un oratoire de Versailles ; les témoins étaient
un gentilhomme appelé Montchevreuil et un des valets de chambre
du roi Bontemps, l'officiant était le père La Chaise,
la bénédiction nuptiale fut donnée par le diocésain,
l'archevêque de Paris, Harlay, les mariés étaient
le roi de France et la veuve de Scarron ! Telle fut l'issue des singulières
relations de Louis XIV avec Mme de Maintenon. - Noailles. Histoire
de Mme de Maintenon, T. II chap. II-III.
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