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IMPORTANCE DU COMMERCE A FONTENAY,
LES SABLES, LA CHÂTAIGNERAIE, ETC
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Nous touchons à la fin du XVe siècle,
et avec elle l'horizon du Bas-Poitou s'étend. On sort
des limites étroites où se sont débattues
trop souvent les jalousies de métier. C'est comme un
grand rideau qui se déchire et découvre de nouvelles
terres, de nouveaux peuples, un immense théâtre
où nos aïeux vont porter leur activité et
leur industrie. La terre est plus vaste qu'on osait le penser
au moyen âge ; plus belle, plus riche qu'on ne l'avait
rêvée. Par delà l'Océan, par delà
cette ceinture de flots qui a si longtemps effrayé la
hardiesse ignorante des navigateurs les plus aventureux, Christophe
Colomb vient de découvrir l'Amérique, et tout
un continent s'offre à l'admiration et à l'avidité
des Européens. Placés sur le bord occidental de
la France, en vue du Canada, les marins des Sables se confient
à l'Océan, et vont chercher sous un autre ciel
des richesses plus grandes. Leur port contient plus de navires
que ceux de Nantes et de La Rochelle : on parle d'y créer
une école de langues vivantes, et leurs hardis flibustiers
font aux Espagnols une guerre sans trêve ni merci. Le
port de Saint-Gilles rivalise avec celui des Sables, et dès
1483, jouit d'un renom mérité dans le monde maritime,
par la publication du Grand Routier de mer de Pierre Garcie
Ferrande, l'un de ses marins, d'origine espagnole ou portugaise
(1). Fontenay-le-Comte, qui déjà fournissait de
draps et de pelleteries une partie du Poitou, qui avait des
relations de commerce avec l'Espagne, vit aussi dans cette révolution
économique résultant de la découverte de
l'Amérique la source de nouveaux profits (2).
Les boutiques de ses artisans furent les entrepôts
où affluèrent les étoffes fabriquées
depuis Sainte-Hermine, Mouchamps, Pouzauges et le Breuil-Barret,
jusqu'à Foussais et Saint-Hilaire-des-Loges. Le petit
bourg de Charzais était peuplé d'ouvriers à
leur gage, et le bruit des métiers remplissait la ville
et les faubourgs.
L'entrepôt principal de tous ces produits
était tenu par un nommé Rodolphe Lauvot, marchand
d'origine mayennçaise, qui était venu se fixer
à Fontenay.
A partir du XVe siècle, La Châtaigneraie
devenait aussi le centre d'un très grand commerce de
grosses draperies fabriquées dans tout le pays circonscrit
entre le Grand Lay, les collines de Pouzauges, la Sèvre,
la forêt de Chantemerle, celle de Mervent et l'Arkanson.
Des relations ouvertes avec le Nouveau-Monde l'agrandirent
encore si bien, que sous Colbert, tel marchand de ce bourg avait
entrepôt à La Rochelle, deux ou trois navires à
lui et comptoir à Québec (3)
Le révocation de l'Edit de Nantes (1685),
et la perte du Canada en 1763, portèrent un coup terrible
à une industrie alors si prospère, qui s'exerçait
dans plus de 50 paroisses (4).
Les drapiers et les tanneurs formaient aussi des
corporations puissantes, d'où sortirent la plupart d'hommes
remarquables, ou qui occupèrent dans la robe, les finances
et l'armée, les plus hautes fonctions sociales du royaume.
Dans plusieurs actes de l'état civil du
XVIIe siècle, les marchamps de drap et de soie de Fontenay-le-Comte,
dont les chefs occupèrent le premier rang dans les cérémonies,
sont qualifiés de sire.
Sous Louis XI, les tanneurs en possession de la
maîtrise étaient au nombre de 36 ; vingt autres
étaient "requérans" total 56.
Les guerres de religion n'avaient pu ruiner cette
grande industrie des tanneurs qui, pendant 300 ans fournit une
partie du Poitou.
Lors de la prise de Fontenay par Henri IV, en
1587, un tanneur de la rue des Loges, Gilles Cardin, se vit
enlever à lui ses magasins pour deux milles écus
d'or, de cuirs ; ce qui représentait une somme d'au moins
130.000 francs de notre monnaie.
Des fabriques de parchemin et la petite papeterie
de Mérité, furent établies peu après
la création de la commune de Fontenay. C'est à
Mérité qu'habitait, à la fin du XVe siècle,
Girard Quinefauld, maître-parcheminier, ainsi qu'en témoigne
une quittance donnée par lui au nom de François
Gerbaud, prêtre, demeurant à Fontenay. Cette quittance
se trouve aux archives de la cille, qui possèdent aussi
deux feuilles de parchemin aux filigranes de 1484 et 1541.
La papeterie de Mérité, fermée
sous Henri IV, recommença à fonctionner pendant
quelques années sous Louis XIV. Sa marque était,
en dernier lieu, un chat et les deux lettres M. R.
La confrérie de la Fête-Dieu, de
l'église des Querroi, à Limoges, venait s'approvisionner
de parchemin à la foire de la Grand Saint-Jean à
Fontenay, ainsi qu'il appert de ce curieux passage cité
par Allou, dans les antiquités du Limouzin.
" Le parchemin achepté à la
foire de la Grand Saint-Jean à Fontenay : 25 douzaines
de grand velin de Bretagne, qui a coûté 30 sols
tournois la douzaine. "
Les foires de la Saint-Jean dont nous venons de
parler (5) ainsi que celles de la Saint-Venant, attiraient déjà
un grand concours d'étrangers : c'était le rendez-vous
du beau monde du Bas-Poitou. On y venait de vingt lieues à
la ronde. De nombreux marchands basques fréquentaient
ces foires. Ils descendaient de préférence à
l'hôtel Fontarabie, mentionné dès
1523, et des lettres de change des XVIe et XVIIe siècles,
souscrits à Pampelune et Vittoria, dont le payement devait
s'effectuer dans la capitale du Bas-Poitou portent : "
Fontarabie-les-Fontenay-le-Comte, province du Poictou, du royaume
de France. "
Principale passage pour se rendre du midi dans
les régions éloignées du Bas-Poitou et
de l'embouchure de la Loire, Fontenay voyait chaque jour les
voyageurs affluer dans son sein.
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NOTES:
(1) Au catalogue Clouzot (novembre
1897), un exemplaire petit in-4° de cet ouvrage, extrêmement
rare, était coté 120 francs. - Edition de 1613.
- Dans le Bulletin de la Société des antiquaires
de l'Ouest, année 1899, Tome XXIII de la 2° série,
pages 64 et 65, M. de la Bouralière donne, en même
temps qu'une description fort intéressante d'un exemplaire
de cet ouvrage imprimé en 1520 à Poitiers, par
Enguilbert et de Maruef, un fort joli frontispice. Sous le titre,
une gravure sur bois représente un navire dans lequel
sont assis un roi et une reine ; le roir porte dans ses bras
un petit cercueil ou coffret qu'il dispose à jeter dans
les flots. Les 2 ff. prélim. contiennent le titre, une
espèce de sommaire du livre, puis une épitre de
"Pierre Garcie alias Ferrâde à Pierre Ymbert
mon filleul et chier ami", dans laquelle il expose les
motifs qui l'ont poussé à composer cet ouvrage.
Cette épitre est datée de Saint-Gilles-sur-Vie,
dernier mai 1483. Une figure grossièrement gravée
sur bois occupe le V° du 2° f. et représente
la rose des vents. Dans le texte sont intercalées un
grand nombre de figures représentant les îles,
caps, écueils, etc, décrits dans le Routier.
(2) Dès le XIIIe siècle,
Fontenay avait, dans la rue des Lombards, des changeurs, espèce
d'usuriers italiens faisant, d'après une chanson populaire,
regretter les juifs.
(3) Fondé par un français
en 1608.
(4) Une Françoise Arouet,
décédée à La Châtaigneraie
le 7 juillet, et veuve d'un riche fabricant de ce bourg, était
la sur de l'aïeule de Voltaire, fille elle-même
d'un tanneur de Saint-Loup, près de Parthenay.
(5) La fin de la guerre de cent ans,
dit M. Boissonnade, dans son remarquable travail de l'organisation
du travail en Poitou, coïncide avec le relèvement
économique de cette province, qui, pendant un siècle,
jouira d'une paix profonde qui permettra à son agriculture
et à son industrie de recouvrer leur prospérité...
Sur la côte Charles VII fait établir les achenaux
de Maillezais, de Marans et de Velluire. - A Fontenay, le commerce
des chevaux et des mules, des cuirs et des fers, fait dès
lors, le succès des foires du 2 août, du 11 octobre
et du 24 juin dont la première dure jusqu'à huit
jours et la seconde trois. - Pendant les cent années
qui précèdent les guerres de religion, le Poitou
apparaît comme un pays relativement prospère. -
L'agriculture y tient toujours la première place. A côté
des anciens métiers, des nouveaux se forment, répondant
aux nécessités d'une vie sociale plus raffinée.
Les marchands de draps et de soie et draps de laine, les merceries,
les épiciers, les pelletiers, forment une classe de plus
en plus nombreuse parmi les commerçants.
Tout autre est la valeur économique
de l'industrie exercée sur les côtes depuis de
longs siècles par les paludiers... Le marais bas-poitevin
qui, depuis longtemps approvisionne de sel l'étranger
et la France centrale, devient au XVe siècle, le grand
entrepôt où se fournit presque tout le royaume.
Une curieuse requête adressée à Charles
VII vers 1451, décrit cette côtière "infertile
de blés, vins et autres habondamment." "Les
pauvres habitants et laboureurs de la mer", répartis
dans 8 à 10 000 feux, y vivent en gardiens de la côte
"contre la malice de l'Océan moult impétueux,
enflé et orgueilleux." Les habitants de l'intérieur
du Poitou apportent à ces pauvres gens, leurs blés,
leurs vins, leurs bois et leur bétail, et reçoivent
en échange leur sel... Les paysans du Bas-Poitou, surtout
ceux de La Roche-sur-Yon et de Montaigu, sont constamment occupés
à charger le sel de la côté aux entrepôts
de l'interieur. L'usage des viandes salées, dont usaient
communément "les pauvres gens de labeur et art mécanique"
rendait la consommation très active et le négoce
lucratif. La charge de sel (a) se vendait sur le marais 60 sols
a 4 l., et se revendait, en 1454, à raison de 15 deniers
le boisseau. En dépit des règlements de Louis
XI, qui limitèrent à Niort, Fontenay et Poitiers,
la faculté de posséder des entrepôts, le
commerce du sel continua à se faire partout clandestinement
et resta, au XVIe siècle, le plus actif élément
de transactions entre le Poitou et les provinces de l'ouest
et du centre (b).
(a) La Charge de sel " est de
80 chevaux chargés".
(b) Boissonnade, pages 25, 27, 30,
31, 32, 33 et 34.
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ARCHITECTURE ET BEAUX-ARTS EN BAS-POITOU
CHATEAUX ET MONUMENTS DIVERS
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Pendant que le commerce de Fontenay atteignait
à un si haut degré de prospérité,
les arts n'étaient pas oubliés dans les autres
régions du Bas-Poitou.
Dans les cathédrales de Maillezais et de
Luçon, sous l'impulsion de leurs évêques,
l'architecture ogivale remplace aussi l'architecture romane.
Elle se développe hardie et riche en même temps
; elle substitue à la ligne géométrique
courbe, l'ogive, la variété des lignes ; elle
dépasse les monuments romains pour la masse, qui n'ôte
rien à l'élégance. Elle nous donne, au
moins dans leurs grandes lignes, ces édifices qui, à
quatre siècles et demi de distance, étonnent notre
imagination, écrasant nos chétives demeures et
montrent en même temps que le genre des architectes inconnus
de ces époques de foi, la patience et la force des générations
qui ont élevé ces magnifiques monuments.
Liénard, de la Réau, architecte
et principal ouvrier construisait alors la grande fontaine
(1) de Fontenay, sur laquelle sont sculptées les
armoiries concédées par François Ier. En
1543, il réédifiait la maison commune, le palais
de justice et sa chapelle. A la même époque, le
sculpteur Jacques Coiraud de Montaigu décorait les chapelles
placées derrière le grand autel de Notre-Darne,
pendant que s'élevait le bel hôtel de la Pérate,et
la maison Billaud, situés dans la Grande Rue (2). Les
caissons du plafond du corridor ressemblent tellement à
ceux du vestibule du château de Coulonges, transportés
à Terre-Neuve, qu'on est forcé de les attribuer
aux ouvriers qui ont couvert d'ornements d'une si noble tournure,
cette belle résidence. La façade, détruite
en 1712 par un incendie, devait être charmante.
La banlieue de la ville suivait le mouvement.
En 1545, Lucas Bienvenu construisait pour Michel Tiraqueau,
une magnifique maison de campagne dans Belesbat, et en 1595,
Nicolas Papin, maire de Fontenay, chargeait Jean Morisson, dont
on voit encore la maison sur la place Belliard, d'édifier
le gracieux castel de Terre-Neuve.
Noël Gasnier, né à Fontenay,
embellissait par la peinture les salles poudreuses des châteaux
gothiques de l'lle de France, et secondait puissamment le Primatice
dans ses travaux d'édification des palais de Saint-Germain,
de Chambord et de Fontainebleau. Il serait aussi injuste de
ne pas mentionner parmi les architectes poitevins de la fin
du XVe siècle, Pierre La Noue, des Herbiers, auteur du
manuscrit « La cité de Dieu », conservé
à la Bibliothèque nationale (1519), de style purement
Renaissance, et mentionné dans le chapitre précédent.
Le mouvement artistique que le moine Glaber avait
pu constater lorsque la France revêtait la blanche parure
de ses églises, existait avec autant d'entrain en Bas-Poitou,
au XVIe siècle, après les guerres d'Italie, mais
le mobile n'était pas le même ; la foi religieuse
était remplacée presque partout par le sentiment
personnel du bien-être. C'était la robe blanche
des châteaux qui venait égayer le paysage.
Ce mouvement artistique, encouragé surtout par les d'Estissac,
dont l'un occupa le siège de Maillezais, et possédait
Coulonges, fut considérable (3), ainsi qu'en témoigne
l'ouvrage d'architecture du poitevin Julien Mauclerc (4). «
Il existait, dit le savant M. de Rochebrune, aussi bien dans
la main que dans les jambes; les sculpteurs, les peintres, les
graveurs, les architectes, les maîtres d'oeuvre, tout
cela taillait, peignait, dessinait, gravait, voyageait à
l'envi ; d'innombrables modèles couraient les ateliers,
et les architectes, et les graveurs et les tailleurs de pierres
couraient comme eux, portant sous leur bras le recueil qui les
contenait. » Parmi les vieux châteaux aménagés
suivant un goût nouveau. par les riches seigneurs de l'époque,
on peut citer :
Le Puy-Greffier, situé à
quelque distance de Saint-Fulgent, au milieu, d'un site délicieux,évoque
le souvenir du fameux Tanneguy du Bouchet, célèbre
chef protestant tué à Moncontour en 1569. Les
restes superbes de ce manoir, restauré sous Louis XII,
sont encore imposants. Chaque porte est ogivale et couronnée
d'un fronton ; les chapiteaux sont agrémentés
de feuilles frisées et les fenêtres, ornées
de torsades comme à Blois, sont divisées par des
meaux.
Apremont. - Les deux tours du château
d'Apremont, qui restent encore, et où l'on retrouve un
souvenir très amoindri de celles du donjon de Chambord,
ont été édifiées par les soins de
l'amiral de Chabot, c'est-à-dire vers 1530.
La grande et belle façade qui les reliait
n'existe plus ; elle a été détruite en
1793 ; mais Jehan-Baptiste Florentin, dans un curieux dessin
à la plume, nous en a conservé les principales
lignes architecturales, reproduites dans le dessin ci-dessous.
D'après une eau-forte de M. de Rochebrune.
Le Puy-du-Fou, près Les Epesses,
commencé sous Charles VIII, remanié sous Henri
II, par François du Fou et Catherine de Laval, ne fut
achevé qu'en 1578. Cette habitation princière
qui d'après la tradition, eut l'honneur de recevoir François
Ier et la jeune reine Eléonore, offre encore, malgré
les injures du temps, des lignes magistrales et puissantes qui
ont conservé à ce qui nous reste de cette construction
un caractère réellement monumental, malgré
l'emploi de la brique, fait avec assez de discernement pour
ne pas nuire à la beauté générale
de l'édifice.
Il convient de citer encore Le Prieuré
de Mouzeuil (1524), La Popelinière, près Sainte-Gemme-la-Plaine,
Bessay, La Cantaudière des Moutiers, La Guignardière
d'Avrillé, Goulaine, les cloîtres de Luçon,
Les Granges-Cathus, etc.
Château de la Cantaudière (d'après
une eau-forte de M. de Rochebrune).
Le château des Granges-Cathus, ancienne
propriété du regretté Léon Audé,
s'élève à 1 kil. 1/2 de Talmont, sur un
plateau boisé, d'où la vue descend jusqu'aux plages
sablonneuses de l'Ile de Ré, à peine dessinée
comme un léger nuage à l'horizon. Les détails
qui restent de ce château, en partie réédifié,
suffisent encore à lui rendre une partie de sa physionomie
d'antan, qui faisait de ce vieux manoir une des plus belles
créations de la Renaissance dans notre pays. L'escalier,
reproduit par notre photogravure, est la morceau captal du château.
Les deux fenêtres ont des pilastres dont les consoles
et les chapiteaux sont gracieusement sculptés ; entre
elles, un joli médaillon renferme deux têtes sortant
des casques ailés ; au-dessus de la seconde se voient
les armoiries du seigneur ; un lion passant sur champ serré
d'étoiles. Au-dessus du cintre surbaissé, se lit
au milieu d'arabesques, la date de la construction, 1525. Les
bustes mutilés de Lucrèce et de Cléopâtre,
en grand relief, et les armes des Cathus achèvent la
décoration de l'entrée. «Mais rien n'égale
la richesse de l'intérieur. L'artiste y a semé
à profusion toutes les capricieuses créations
de la Renaissance : animaux fantastiques ou réels, instruments
de guerre ou de science, de musique et de chasse, des armures,
des fleurs, des armoiries et des allusions d'amour.
Tout cela forme au plafond une seule page qui
va s'enroulant jusqu'au second étage, enfermant dans
des médaillons l'histoire du seigneur des Granges,
sa naissance et sa jeunesse, ses deux mariages et ses chagrins
domestiques. Pas une pierre n'a été oubliée
du ciseau, etc. »
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NOTES:
(1) Restaurée en 1899, sur
les plans et les données de l'illustre aquafortiste M.
de Rochebrune. En voir l'élévation sur le frontispice
dû au burin du même artiste.
(2) On peut citer encore les fenêtres
étagées surmontant la porte de la prévoté
de M. D., habitée aujourd'hui par le docteur Phellipon.
(3) Il convient aussi de citer dans
cet ordre d'idée, les Gouffier, notamment Arthus Gouffier,
gouverneur de François Ier , les La Trérnouille,
le vidame de Chartres à Tiffauges, les Chabot d'Apremont,
etc.
(4) Né en 1523, d'une
famille protestante, Julien Mauclerc se rangea sous la bannière
du roi de Navarre. La paix faite, il abandonna le métier
des armes et se retira au Ligneron. où il écrivit
le Traité d'architecture, suivant Vitruve, ouvrage qui,
au juste dire de l'éditeur, a n'est pas moins glorieux
pour les Français qu'il l'est pour son auteur. »
Les exemplaires de ce curieux volume sont rarissimes. M. O.
de Rochebrune en possède trois, dont l'un parait avoir
appartenu à Mauclerc lui-même. Il en existe un
quatrième dans la bibliothèque de M. le baron
de Mesnard.-Maucler avait aussi établi au Ligneron une
fabrique de bouteillages en terre blanche, ce qui ne l'empêchait
pas de s'adonner à l'étude de la botanique et
de taquiner les muses.
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LES SEIGNEURS OU PROPRIÉTAIRES
DES GRANGES-CATHUS. - COMBAT DES TRENTE
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La famille noble et très ancienne des Cathus,
aujourd'hui éteinte, était originaire des environs
de la Garnache et de Beauvoir, d'où elle s'étendit
dans le pays de Retz au moyen âge. Le chevalier Hugues
Cathus faisait partie des trente Bretons qui, le 27 mars 1350,
sous la conduite du maréchal de Beaumanoir, vainquirent
trente Anglais en combat singulier, sur la lande de Mi-Voie,
entre Josselin et Ploërmel.
Escalier des Granges-Cathus.
Jean Cathus, seigneur des Granges, capitaine de
Talmont, fit les guerres d'Italie sous le célèbre
Louis II de la Trémouille, vicomte de Thouars, prince
de Talmont, qui trouva une mort glorieuse à la bataille
de Pavie, en 1525. Rentré en France, il fit commencer
les travaux dont nous admirons les restes. Marié en premières
noces avec Marie du Verger, dont l'écusson se voit sur
l'escalier, il épousa en secondes noces Marie de Nuchèze,
veuve d'Antoine du Fouilloux et belle-mère du célèbre
auteur de la Vénerie, Jacques du Fouilloux.
Il est à remarquer que toutes les sculptures
des Granges sont consacrées à l'amour malheureux.
Cette terre passa ensuite, par acquisition, le 1er avril 1776
à la famille de Vaugiraud, qui a fourni un vice-amiral.
Vendue en 1828, par Mme Henriette de Senneville, marquise de
Vaugiraud, à la famille Audé, le château
des Granges-Cathus, restauré partiellement par M. Léon
Audé, fut acheté en 1876, par le comte Lascases.
En 1878-1879, il le fit reconstruire presque complètement
sous la direction de M. Clair, architecte, tout en respectant
le plus possible toutes les parties des entablements, des cordons,
des baies et des sculptures qu'il a été possible
de conserver. Parmi les parties demeurées intactes, il
convient de citer l'escalier monumental, dont nous donnons une
vue. Sur la façade du château qui appartient aujourd'hui
à la comtesse de La Rochetulon, née Cécile
de Lascases, se lit l'inscription suivante :
ANNO MDCCCLXXVIII
Hocce castellum
redicavit
comte Gabriel de Lascases
V. Clair, architecte (1).
Parmi les noms des étrangers qui ont laissé
leur carte de visite burinée au couteau, sur l'escalier
des Cathus, on lit ceux-ci : « Gosmao, Grande et Parseval,
aspirants sur l'Italienne 1809 » l'une des trois frégates
qui livrèrent, dans la rade des Sables, le 24 février
1809, un combat naval dont nous parlerons en temps et lieu.
Ce navire portait bonheur à ses officiers
; Cosrnao-Dumanoir est devenu contre-amiral; l'amiral Parseval-Deschênes
a commandé, la flotte de la Baltique (2).
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NOTES:
(1) Inscription relevée par
M. Braud, agent-voyer à Talmont.
(2) Extrait du vrai guide aux Sables,
par un Sablais, 1874.
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CHEMINÉES MONUMENTALES
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Les cheminées, pendant tout le XVIe siècle,
prennent dans les édifices une importance qu'il est utile
de signaler. Il n'est pas une construction de quelque intérêt
qui n'ait une ou plusieurs de ces cheminées monumentales.
Parmi les types les plus anciens, nous citerons les deux jolies
cheminées du prieuré de Mouzeuil, avec leurs frises
délicates et leurs cadres formés de pilastres.
L'une de ces cheminées orne aujourd'hui la grande salle
à manger du château de la Pellisonnière
du Boupère. - La jolie cheminée de la maison Billaud,
de Fontenay (1), achetée à beaux deniers par l'ancien
sénateur et directeur de l'Évènement,
Edmond Magnier, et transportée dans sa villa d'Hyères,
dans le Var. - Celle de la Lyère, dans la commune de
Sainte-Flaive-des-Loups, et transportée à La Court
de Saint-Cyr-en-Talmondais. - Celle de Bonnefond, dans la commune
d'Aizenay. - Les jolies cheminnées des Granges-Cathus,
dont nous avons déjà parlé, avec leurs
médaillons de Pyrame et de Thisbé. - La cheminée
de la Popelinière, de Sainte-Gemme, avec ses écussons
de France et de Voisin. Celle de Coulonges, transportée
dans la superbe habitation de l'artiste fontenaisien M. de Rochebrune,
ainsi que celle du gouverneur de Fontenay, si chargée
de sculptures de toutes sortes, et reproduite si souvent par
la gravure et la lithographie. Les cheminées de Cantaudière,
de la tour de Bessay, de la Popelinière, de la Girardière,
de la Court de Saint-Cyr-en-Tamondais (2), des Voureuils, du
Givre, du Chatellier-Barlot, etc.
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NOTES:
(1) Hôtel de la Pérate.
(2) Sortie des mains de Jehan Logeay
et Jacques Robert, deux scuplteurs locaux, provenant de l'ancienne
hôtellerie du Palais Royal à Fontenay.
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IMITATEURS DE PALISSY EN POITOU
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En poitou, les imitations des poteries de Palissy
furent aussi nombreuses qu'en Saintonge. La première
qu'il faille mentionner après la faïencerie d'Oiron
est celle de Fontenay-le-Comte. Palissy vint à
Fontenay au moment de la foire de la Saint-Jean en 1555, probablement
pour y débiter ses faïences, quoiqu'on ne puisse
l'affirmer. Ce qui est certain, c'est qu'il fut alors caution
d'un certain Pierre Reynaud, marchand à Saintes (1).
En 1558, une fabrique de vaisselle de terre fut fondé
à Fontenay, par Sébastien Collin, médecin-naturaliste,
aidé des conseils de Palissy. Les terres étaient
prises à Faymoreau et à la Roche, de la même
paroisse.
Une liquidation eut lieu en 1566 mais tout fait
supposer que la famille de Valloyre, associée à
Collin, en aurait rallumé le four, car en effet on trouve
Abraham Valloyre qualifié potier de terre dans
un acte du 8 juillet 1581, relatif à la vente d'une maison
située dans la rue Sainte-Catherine des Loges ou de la
Caillère, c'est à dire près de l'église
Saint-Jean de Fontenay. Un certain Nicolas Valloyre était
encore potier dans cette ville en 1609. Il figure dans un acte
d'assemblée de gens de métiers réunis cette
année-là pour mettre obstacle à une mesure
fiscale. Presque en même temps, en 1560, une autre fabrique
de poterie était établie à Apremont,
avec privilège du roi François II, par le sieur
de la Brossardière, et Benoît Georget, à
la requête d'Anne Chabot, dame de Piennes, et dame d'honneur
de Marie Stuart. (Ce sieur de la Brossardière n'était
autre que Julien Mauclerc, seigneur du Ligneron en Apremont,
et de la Brossardière en Coëx.)
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NOTES:
(1) La ville de Saintes a élevé,
en 1868, à Bernard Palissy, une très belle statue
placée non loin de la Charente, en bordure du cours National.
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LE MOUVEMENT LITTÉRAIRE ET SCIENTIFIQUE
EN BAS-POITOU AU XVIe SIÈCLE
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L'IMPRIMERIE
Mais ce n'était pas seulement vers le commerce,
l'industrie et les arts que devaient se porter, aux XVe et XVIe
siècles, l'activité et l'intelligence des Bas-Poitevins.
La prise de Constantinople chassant jusqu'à
nous les héritiers de l'antiquité classique, et
l'imprimerie (1) s'offrant au moment propice pour multiplier
ces chefs-d'oeuvre retrouvés, inaugurèrent le
début de l'ère moderne que nous voyons grandir,
et qui sous le nom de Renaissance, a pris sa place à
côté des périodes les plus glorieuses pour
l'esprit humain.
Le droit, la justice, la liberté humaine,
se relevaient au nom de l'Évangile, et le monde, échappé
au cercle de fer, renaissait réellement; les rois prenaient
souci du peuple ; l'esprit de saint Louis semblait revivre avec
sa sainte et féconde influence. Un pape illustre, Léon
X, ami des arts, occupait le siège pontifical, et sous
toutes ces influences, l'homme retrouvait toutes ses énergies,
faisait des merveilles dans les arts, les sciences et les lettres.
Cette époque fut grande, surtout pour Fontenay,
et une petite ville cachée au fond d'une province éloignée,
fut un véritable foyer de lumière, d'où
sortirent de grands caractères et de nobles esprits,
qui suffiraient seuls à l'illustration d'une époque.
L'étude du droit et de la médecine,
portes ouvertes à la roture sur le chemin des privilèges,
attirait les fils de certaines familles enrichies dans le commerce
des draps et des cuirs.
L'exemple de Jean Rabateau qui, de simple juge
prévotal, était devenu président au Parlement
de Paris, et garde par intérim, des sceaux de France,
et celui de Jean Button, seigneur de Jarnigande, médecin
de Louis XI, les encouragèrent à entrer dans ces
deux voies, que nous verrons illustrées par des hommes
de premier ordre, dont les ancêtres, Jean Brissot (2),
Artus Cailler, beau-frère d'André Tiraqueau, Pierre
Goguet, Jean Brisson et Jacques Fouschier (3), portèrent
jusqu'à Paris la réputation des légistes
bas-poitevins.
Mais on peut dire que ce fut de la cellule d'un cordelier que,
pour le Bas-Poitou, jaillit vraiment le premier éclair.
On sait de quels doutes terribles était
depuis longtemps assiégée la conscience humaine.
Sous Louis XII, les esprits étaient entraînés
par une force irrésistible qui se faisait sentir jusqu'en
Poitou. « La terre, la conscience et les clefs du ciel
n'appartiennent qu'aux élus, et les élus ne sont
trop souvent que les barons de la royauté ou les barons
de l'Église. »
Le savant pape Pie II, en. 1456, trouve la situation
si désolée par les luttes où les maîtres
de la terre usent les forces des nations au service de leur
haine et de leurs vanités qu'il s'écrie : «
L'indignation ne me permet pas de me taire, ni la douleur de
parler, il est honteux de vivre encore. » Dante avait
dit avant lui : « Votre avidité fait le deuil
de la terre, foulant aux pieds les bons, élevant les
pervers. » Les saints, depuis Salvien jusqu'à
saint Bernard n'avaient pas tenu un langage moins sévère.
Dès 1448, le 7 mai, un moine cordelier,
Philippe Bertin (4), avait été brûlé
vif à Fontenay, pour avoir attaqué la hiérarchie
catholique.
Parmi ses compagnons, les uns ne voulaient en
rien pactiser avec ses théories; mais d'autres, notamment
le savant Lamy (5), le correspondant et l'ami du célèbre
Guillaume Budé (6), s'associaient aux idées de
ceux qui prétendaient apporter la réforme dans
la discipline ecclésiastique.
Ce fut dans ce milieu enflammé par les
passions religieuses, que devait se trouver Rabelais, en arrivant
comme novice au couvent des Cordeliers.
Rabelais. - Né à Chinon vers
1483, et fils d'un apothicaire, Rabelais, avec sa merveilleuse
facilité d'apprendre, ne tarda pas à capitaliser
ce prodigieux savoir qui, dépassant les murs de son couvent
où il s'était lié avec le savant Lamy,
le mit en rapport avec ceux qui, en Europe, dirigeaient la renaissance
des lettres et des idées, comme Erasme et Budé.
Jalousé par ses confrères, Rabelais,
un peu surpris peut-être de se voir vêtu du froc,
passa, en 1523, à Maillezais, où la vie était
plus douce et plus agréable. Puis s'accommodant peu de
la vie claustrale, il jeta le froc, et se mit à courir
le monde, se fit recevoir docteur à Montpellier, en 1531,
et exerça la médecine dans cette ville. Chargé
par la faculté de Montpellier de solliciter du chancelier
Duprat, le rétablissement de quelques-uns de ses privilèges,
il réussit dans cette négociation, et la Faculté
reconnaissante décida qu'à l'avenir tout médecin
qui prendrait ses degrés, revêtirait en passant
sa thèse, la robe de Rabelais. Son souvenir s'est tellement
bien conservé dans cette vieille université, qu'à
l'occasion des fêtes qui y furent données à
la fin de mai 1890 pour célébrer son sixième
centenaire, le sujet choisi pour le cortège historique
portait : La soutenance des thèses doctorales de Rabelais,
en 1537.
Le cardinal du Belley, ambassadeur auprès
du Saint-Siège, et qui l'avait connu au collège,
l'emmena comme médecin à Rome, où il se
fit remettre les peines canoniques qu'il avait encourues. Néanmoins,
il n'épargna dans ses railleries, ni le sacré-collège,
ni le pape lui-même. A son retour, il obtint une prébende
à l'abbaye de Saint-Maur et fut, en 1545, curé
de Meudon ; il mourut en 1553, à Paris, où il
s'était rendu, dit-on, parce qu'il était à
la veille d'être nommé curé de Saint-Paul.
Rabelais était de l'humeur la plus gaie
et la plus bouffonne. Il composa entre autres ouvrages, la Vie
horrifique du Grand Gargantua, et l'Histoire de Pantagruel.
On déplore que dans ces étranges ouvrages, Rabelais
ait mêlé aux idées les plus saines, les
plus sublimes et les plus religieuses, le langage le plus cynique.
« Où Rabelais est mauvais, dit La Bruyère,
il passe bien loin au-delà du pire; où il est
bon, il va jusqu'à l'exquis et à l'excellence.
»
On s'est donné beaucoup de peine pour saisir
le véritable sens de l'histoire de Gargantua et de Pantagruel.
La plupart des commentateurs y ont vu une allégorie continuelle
; pour eux, Gargantua est François Ier, Grangousier Louis
XII, Pantagruel Henri II, la Grande Jument Diane de Poitiers,
etc.
Quoi qu'il en soit, Rabelais eut de bonne heure
la réputation méritée d'un lettré
qui a droit de cité parmi nous, car il a bu à
la source fécondante nommée par lui Fontaine
des beaux esprits, et que c'est à sa sollicitation
pressante que François Ier avait, en 1542, donné
à Fontenay les armes et la devise célébrée
si souvent par les poètes du XVIe siècle : Félicium
ingeniorum fons et scaturigo (7).
Le dernier acte de Rabelais aurait été,
paraît-il, ce testament-ci. « Je n'ai rien, je dois
beaucoup, je donne le reste aux pauvres. » D'autres prétendent
qu'il finit au milieu de facéties et de bons mots, et
qu'il se serait fait affubler d'un domino, pour parodier la
parole de l'Évangile. Beati qui in Domino moriuntur.
Selon d'autres il serait mort en athée ou au moins
en sceptique, et aurait dit avant d'expirer. « Je m'en
vais chercher un grand peut-être » et comme Néron
: « Tire le rideau, la farce est jouée.»
D'autres grands génies, formés pour
la plupart à son école, portaient haut la renommée
de Fontenay, et payaient à la France un tribut de génie
et vertus ! C'est nommer Pierre Brissot, Tiraqueau, Barnabé
Brisson, Nicolas Rapin, Viéte et Rivaudeau.
Esquissons un instant la physionomie de ces hommes
illustres qu'on a appelés avec beaucoup d'à-propos
les grands hommes d'une petite ville.
Brissot (Pierre) (8). - Chirurgien en chef
du roi d'Espagne, né à Fontenay en 1478, probablement
dans la maison occupée aujourd'hui par la Chambre des
notaires, mourut à Lisbonne en 1522, après avoir
contribué puissamment à faire substituer à
l'empirisme arabe, les doctrines d'Hippocrate et de Gallien.
Ses études sur la saignée dans la pleurésie,
le rangent parmi les précurseurs du célèbre
médecin anglais Harvey, qui découvrit la circulation
du sang. Brissot fut à juste titre nommé par ses
contemporains la splendeur de la médecine (9).
Tiraqueau (André). - Illustre jurisconsulte
dont le nom est universellement connu, né à Fontenay
en 1480, mort en 1558, fut surnommé pour son savoir le
Varron de son siècle. Occupa successivement les charges
de sénéchal à Fontenay, de conseiller au
Parlement de Bordeaux, et de conseiller au Parlement de Paris.
Il a écrit de nombreux ouvrages qui révèlent
une science prodigieuse.
Éclairant le droit par la littérature
et l'histoire, Tiraqueau est avec Cujas l'un des fondateurs
de l'École française. Doué d'une vaste
intelligence et d'une profonde érudition, il a longtemps
partagé avec son noble émule Cujas, l'insigne
honneur de ne jamais voir son. nom prononcé dans les
écoles, sans que le professeur ne se découvrît,
et n'employât la formule sacramentelle « Tiraquellus
poster. »
Encore aujourd'hui, le nom de Tiraqueau est placé
avec respect à côté de celui de Cujas.
Son fils aîné Michel, sénéchal
de Fontenay, collectionneur émérite « d'antiquités,
d'objets d'arts et d'histoire naturelle », fut lui-même
un homme de grand talent. Il épousa Suzanne Gobin, grand'tante
du maréchal Catinat. Sa statue, que reproduit notre dessin,
d'après un cliché de B. Fillon, fait partie de
la collection de M. Raoul de Rochebrune, propriétaire
à la Court de Saint-Cyr-en-Talmondais.
Le père de Tiraqueau était venu
de la Barbinière de Saint-Philbert-du-Pont-Charrault.
En 1840, on trouvait encore à la Barbinière, d'où
les Tiraqueau étaient sortis, les derniers héritiers
du plus jeune frère d'André, dans une pauvre maison
habitée par un vieux paysan et ses trois filles, et nous
croyons savoir qu'un des descendants de cette illustre lignée
est aujourd'hui instituteur dans une petite commune de la Vendée
(10).
Brisson Barnabé. - Tiraqueau avait
à peine disparu de la scène du monde qu'un jeune
légiste, fontenaisien comme lui, et qui devait être
mêlé à tous les orages de la vie politique,
débutait comme avocat au Parlement de Paris. Doué
d'une élocution brillante et d'un savoir éminent,
il s'éleva bientôt au premier rang des orateurs
et des jurisconsultes. Puis il passa des rangs du barreau dans
ceux de la magistrature, devint conseiller d'Etat et ambassadeur
en Angleterre. Rentré en France il publia sous le titre
de Basiliques ou de Code Henri III, le fruit de
longues et pénibles recherches, pour réunir en
un seul corps d'ouvrage les ordonnances royales.
Il y eut, sans doute, dans la vie de Brisson,
quelques défaillances. L'ambition l'égara, et
il eut le tort d'accepter les fonctions de premier président
au Parlement de Paris, à la place d'Achille de Harlay,
son protecteur et son ami. Mais sa mort tragique n'at-elle pas
racheté les faiblesses de sa vie. Il a su en effet, dans
un des plus sombres jours de nos discordes civiles, rappeler
le justum ac tenacem dont parle Horace, et il est mort
pour avoir refusé de prendre et de déposer le
glaive de la justice au gré d'une populace aveugle en
ses fureurs (11). Grande et belle mort, bien faite pour émouvoir
le poète et désarmer l'historien.
Rapin (Nicolas). - Mais au XVIe siècle,
Fontenay n'a pas seulement produit des légistes, des
orateurs cette ville a encore donné le jour à
des poètes. Malgré les vers de Boileau :
Enfin Malherbe vint, et, le premier en France
Fit sentir dans les vers une juste cadence.
on peut dire avec assurance, qu'avant Malherbe
la poésie avait eu de dignes représentants. Parmi
les poètes du XVIe siècle, Nicolas Rapin, né
à Fontenay à la fin de 1535, n'est peut-être
pas un des plus célèbres, mais il est certainement
un des plus distingués. Contemporain et ami de Barnabé
Brisson il joue, lui aussi, un rôle important dans l'État,
et devient grand prévôt de la connétablie
de France. Adversaire infatigable de la Ligue, il gagna ses
titres de noblesse sur le champ de bataille d'Ivry et collabora
à la satire Menippée. Mais un plus grand
titre de gloire est dû à son génie poétique;
sans craindre d'être taxé d'exagération,
nous pouvons admirer le poète qui disait à Achille
de Harlay.
« Détourne tes pensées des
faveurs de la Cour
« Maintiens ton grave front, quoique le
temps qui court
« Désirerait des moeurs qui fussent
moins austères ;
« Aux grands maux comme sont les nôtres
d'a présent
« Le médecin perd tout qui se rend
complaisant,
« Les breuvages amers, sont les plus salutaires.
Qu'il nous soit encore permis d'exprimer chaleureusement
nos sympathies pour le poète qui, au milieu de la guerre
civile entretenue par les étrangers, faisait entendre
ces vers, où respire un ardent patriotisme.
« Espagnols, apprenez, que jamais
l'étranger
« N'attaqua le Français qu'avec
perte ou danger.
« Le Français ne se vainc que
par le Français même !
En lisant ces vers, on se demande si le poète,
par une mystérieuse intuition de l'avenir, avait entrevu
ces luttes tristes et terribles où nos pères,
combattant avec un égal héroïsme dans deux
camps opposés, ont arrosé de leur sang leur commune
patrie. Quoiqu'il en soit, félicitons-le, dans un temps
où les partis méconnaissaient trop souvent la
voix de la raison et du devoir, d'avoir glorifié le courage
des enfants de la France. Une des plus belles compositions poétiques
de Nicolas Rapin est certainement celle qui a pour titre : Les
Plaisirs du gentilhomme champêtre. Dans cette pièce
de vers, que nous regrettons de ne pouvoir reproduire ici, et
qui est la délicieuse paraphrase d'une ode d'Horace,
Nicolas Rapin décrit les distractions du propriétaire
campagnard qui vit sur ses terres, libre de tous les soucis
qu'enfante l'ambition. Il mourut à Poitiers le 13 février
1608.
Viète (François). - Â
côté de Tiraqueau, de Barnabé Brisson, de
Nicolas Rapin, et peut-être au-dessus d'eux, il faut placer
François Viète, l'un des plus grands mathématiciens
dont la France puisse s'honorer. François Viète,
né à Fontenay en 1540, peut en effet être
classé, au rang de ces hommes doués du génie
de l'invention, et qui par de grandes découvertes ont
contribué au progrès des sciences et au développement
de l'esprit humain. Il n'a manqué peut-être à
Viète, pour être rangé à côté
de Descartes que d'avoir écrit dans sa langue maternelle.
S'il eût été un écrivain français,
et si notre prose eût reçu l'empreinte de son vigoureux
génie, son nom, au lieu d'être ignoré de
la foule, se serait vu entouré d'une légitime
et immense popularité. Mais il a écrit sur les
mathématiques et dans la langue des érudits, et
alors combien d'hommes ignorent qu'il eut l'honneur d'inventer
les signes algébriques. Et pourtant, quelle admirable
et précieuse découverte! Au moyen de la simplification
des signes, les calculs les plus compliqués s'effectuent,
les problèmes les plus ardus se résolvent; l'induction,
qui semblait rivée au champ de la métaphysique,
passe dans celui des mathématiques, et l'homme peut connaître
les lois qui régissent les éléments, utiliser
les forces de la nature, explorer la vaste étendue des
mers et lire jusque dans le livre mystérieux du firmament,
où le Créateur a écrit en lettres d'or
le poème éclatant de sa gloire et de sa toute-puissance
(12).
Après avoir été successivement
avocat à Fontenay (13), conseiller au Parlement de Bretagne,
et conseiller d'État, il devint surtout l'émule
de Descartes et de Newton, entre lesquels le placent une foule
de découvertes mathématiques. Il eut du reste
un peu le sort de Newton : attaché à Henri IV
pendant les guerres de la Ligue, il apprit la langue espagnole
et parvint à déchiffrer toutes les lettres interceptées
par les soldats français. La cour d'Espagne, déconcertée,
crut qu'Henry IV avait le diable à son service, et s'en
plaignit amèrement à Rome, qui somma notre mathématicien
de comparaître à son tribunal comme sorcier et
nécromant. Celui-ci, en homme d'esprit, se moqua de la
sottise de ses prétendus juges et fit bien (14).
Il mourut à Paris en 1603. Sur l'initiative
de M. Fillon, la ville de Fontenay avait eu, en 1858, la bonne
pensée d'ouvrir une souscription pour élever une
statue en bronze à François Viète, sur
la place d'Armes (aujourd'hui place Viète).
Espérons que ce projet, malencontreusement
abandonné, sera repris. La mémoire de notre grand
Viète a tout droit à ce trop tardif hommage de
reconnaissance et de piété filiale.
De Rivaudeau (André). - Naquit à
Fontenay vers 1538 (15), de Robert Rivaudeau, originaire de
Beauvoir-sur-Mer et de Marie Tiraqueau. Après avoir fait
à Poitiers de brillantes études, il entreprit,
tout jeune encore, de composer une tragédie suivant le
plan de la scène grecque. Déjà il avait
commenté une pièce d'Euripide, bien étudié
les préceptes d'Aristote, reconnu sur l'indication d'Horace
les défauts de Plaute et de Térence ; il se croyait
en mesure de réussir. Son esprit religieux et sévère
lui fit choisir un sujet biblique. L'histoire touchante d'Esther
qui devait un siècle plus tard, produire un. chef d'uvre
sous la plume de Racine, fut disposée par Rivaudeau sur
le modèle du théâtre grec, en cinq actes
et des choeurs, et représentée à Poitiers
le 21 juillet 1561 sous le titre d'Aman, c'est-à-dire
dix ans après la représentation de la Cléopâtre
de Jodelle.
André de Rivaudeau semble avoir passé
la majeure partie de sa vie littéraire au manoir de la
Groizardière. La sévérité de cette
retraite, qu'il ne quitta pas assez souvent, a dù porter
un coup fatal à son talent comme à sa renommée.
Il fallait alors, comme aujourd'hui de la retraite pour poser
l'esprit, et du monde pour l'aiguillonner (16). »
Au-dessous ont gravité les Besly, les Collardeau,
les Dupin, les Pager et d'autres hommes distingués qui
n'ont guère obtenu qu'une célébrité
purement locale. Tous ces personnages, mais surtout les cinq
dont nous nous sommes entretenus, ont jeté un vif éclat,
non seulement suc Fontenay, mais sur la France entière.
En dehors de Fontenay, et sur d'autres points du Bas-Poitou,
deux hommes appartenant à la même famille, mais
dans des genres différents, cultivaient eux aussi les
lettres et les sciences. L'un, Jacques Berreau, poète
aimable et tendre, a écrit des chansons, des églogues,
des sonnets pleins d'aisance et de douceur, qui auraient assuré
de son vivant à leur auteur une juste célébrité,
si au lieu d'habiter au fond d'une campagne, il eut eu Paris
pour théâtre de ses talents.
L'autre, Lancelot Voisin de la Popelinière,
grand capitaine et homme d'État, se délassait
des fatigues de la guerre en écrivant, pour l'éducation
de ses contemporains et des générations à
venir, l'histoire des grands événements auxquels
il avait été mêlé, soit comme acteur,
soit comme temoin , et qui, pendant la seconde moitié
du XVIe siècle, mirent la France à deux doigts
de sa perte.
Jacques Berreau. - Jacques Berreau, licencié
ès-lois, sénéchal de Puybelliard et de
la Touche-Amblais, parent du fameux capitaine et écrivain
protestant Lancelot Voisin de la Popelinière dont nous
venons de parler, naquit très vraisemblablement à
Burbure, près le Boupère ; d'aucuns lui donnent
néanmoins Luçon comme lieu d'origine. Quoi qu'il
en soit, Berreau, dont la fortune était modeste, ne put
former un établissement à Paris, comme il semble
qu'il le souhaitait dans un sonnet adressé à Barnabé
Brisson.
Brisson en cependant que l'occupation
De ton esprit heureux et ta longue facunde
S'exerce en ce palais le plus fameux du monde,
Où jeune tu t'aquiers grand réputation.
Cependant qu'à Paris où
toute nation,
Meue de sa grandeur confusément abonde
Tu vas augmentant de science profonde
|
Et de vertus espris de saincte affection.
Ici je chante, assis sur le bois aquatique
De mon Loy doux coulant main sonnet poétique
Selon la passion qui m'en vient émouvoir.
Et que ferais-je mieux? mon désastre
me force
Désastre sans renom, n'ayant moyen ne force
De me faire aux barreaux ainsi comme toy voir.
|
Très souvent Berreau séjournait
au Grand-Launay et au Plessis-Houtelin de Sigournais, chez son
frère Pierre, et c'est là surtout qu'il trompa
l'ennui en taquinant les Muses, et c'est sur les rives du Lay,
alors Loy ou Loi qu'il les promenait lorsqu'il écrivit
dans le goût de Ronsard le sonnet ci-dessus.
Jacques Berreau est notamment l'auteur de la chanson
pleine de grâce et de fraîcheur que l'on chante
encore au bocage vendéen, le soir, au crépuscule,
ou le matin, alors que tout s'éveille dans la nature
: elle gagne alors en poésie tout ce que le paysage y
ajoute de couleur locale.
Gentil Rossignolet,
Honneur du vert bocage,
Qui, dans ce ruisselet,
Mirer son beau visage
Vois mon amie souvent
Dès le soleil levant ;
Dis-luy qu'un temps choisir
Meilleur ne pourrait-elle
Pour l'amoureux plaisir
Qu'ore que jeune est et belle,
Car nully n'en voudra
Quand l'âge la prendra.
Et qui souvent la vois
Venir toute seulette
Ici près dans ses bois,
Cueillir la violette
Et des nids nouvellez
Chercher les oiselletz.
Dis-luy en ma faveur
Que le beau de sa face
Est semblable à la fleur
Qu'au-matin elle amasse ;
Ore en est beau le teint,
Qui sera tost éteint.
|
Dis-luy qu'elle ne soit,
Pour estre ore jolie
Fière, et que sce decoit
Qui en cela se fie :
Qu'il ne faut espérer
Pouvoir guères durer.
Dis-luy que désormais
Ses rigueurs et outrages
Ell' quitte pour jamais
Aux animaux sauvages
Et que la cruauté
Sied mal à sa beauté.
Dis-luy le grand tourment
Que supporte et endure
Mon las cur en l'aimant :
Au moins par adventure,
Quand de toi ell' l'oira (ouïr)
Pitié elle en aura.
Dis-luy donc tout cecy,
Et pour t'en, reconnoistre
Je la prieray aussi
De laisser au nid croistre
Tes petits, sans chercher
A te les dénicher (17).
|
Les uvres poétiques de Berreau, dédiées
à Monseigneur Tiercelin, évêque de Luçon,
furent éditées à Poitiers en 1565 ; elles
l'ont été à nouveau, il y a quelques années,
par les soins de MM. Hovyn de la Tanchère et Guyet, à
l'aide de l'exemplaire qui jadis était la propriété
de Charles Nodier.
Voisin de la Popelinière. - La Popelinière
naquit à la Popelinière de Sainte-Gemme-la-Plaine,
près Luçon, en 1541, du mariage de Joachim Voysin
et. de Marie Le Tourneur. La gentilhommière où
il naquit se voit encore. Une partie des constructions remonte
au XVe siècle ; le reste a été rebâti
par ses soins.
Ses parents sortaient de la classe intermédiaire
des propriétaires, qui se confondait alors avec la petite
noblesse, et s'étaient enrichis dans les fermes, particulièrement
dans celle de l'abbaye de Moreilles, quoiqu'ils eussent embrassé
les idées de la réforme ; mais avant d'être
agriculteur, son père avait porté les armes et
fait les guerres d'Italie. Il eut pour parrain Lancelot du Bouchet,
ce terrible baron de Sainte-Gemme qui incendia, à la
tête des huguenots, les églises de Poitiers.
Élevé dans les meilleures universités,
le jeune Voisin de la Popelinière se fit de bonne heure
estimer des hommes de son parti, qu'il servit bravement de sa
plume et de son épée (18). Tous les historiens
impartiaux reconnaissent que notre illustre compatriote est
l'un de ces rares et recommandables écrivains qui ont
pris la plume pour la défense de la vérité.
S'élevant au-dessus des passions vulgaires des partis,
il a su rendre justice à tous, et n'a pas reculé
dans cette tâche périlleuse et devant les rancunes
et les menaces de vengeance des hommes puissants qu'il osait
démasquer. Il avait raison de choisir pour devise : «
Dieu Est Mon Rampart (19) ». Au moment où
parut l'édition de son Histoire de France, imprimée
à la Rochelle, en 1581, en deux volumes in-folio, il
fut tout bonnement question de se défaire de lui par
un coup d'arquebuse ou de poignard, et l'on vit à la
tête de ses ennemis déclarés le roi de Navarre
et le prince de Condé. En dehors de son Histoire de France,
où se reconnaît toujours le style d'un capitaine,
d'un homme de guerre et d'un homme d'état, La Popelinière
a publié notamment :
1° La vraie et entière Histoire
des Troubles et choses mémorables, advenues tant en France
qu'en Flandre et pays circonvoisins, depuis 1562, remplie
de détails historiques sur les troubles de la Guyenne
et du Poitou ; le fameux siège de Poitiers y est écrit
avec toute l'exactitude possible, et on peut dire que peu de
nos modernes ont si bien réussi.
2° L'Histoire des Histoires, livre
qui mérite encore d'être lu ; La Popelinière
y fait une critique souvent très judicieuse des auteurs
de toutes les nations ; on y trouve une infinité d'observations
excellentes, et l'on peut dire que c'est la première
méthode de l'histoire qui ait paru.
3° Une traduction sur l'Italien de Bernardin
de Roque de Plaisance. Dans cet ouvrage, traitant de questions
militaires, l'auteur y donne des leçons et des moyens
de se bien conduire à un général, soit
pour former le soldat à l'obéissance qu'il doit
à son capitaine, soit pour l'observation de la discipline
dans les marches et les campements, dans l'attaque et dans la
défense, et même dans le cas d'une surprise, d'une
rencontre, des détachements et des batailles rangées.
4° Les Trois Mondes ; 5° L'Amiral
de France ; 6° Premier langage usité entre
les Français ou Gaulois et les changements d'icelui,
etc.
Au moment de sa mort, arrivée à
Paris le 8 janvier 1608, l'année du grand hiver, La Popelinière
était réduit à la plus profonde détresse,
sort ordinaire des curs honnêtes et désintéressés.
Ayant toujours été touché de l'intérêt
et du juste durant toute sa vie, c'eût été
miracle que sa fin n'eut pas été telle. Il fut
enterré au cimetière des huguenots, faubourg SaintGermain,
par les soins du ministre du Moulin et aux frais de Scarron,
l'apôtre, son parent du côté de sa première
femme, Marie Bobineau « auquel il a coûté
cinq livres tournois. »
Jacques de Billy. - Un des contemporains
de la Popelinière, un abbé de Saint-Michel-en-l'Herm,
était alors considéré comme un des hommes
les plus savants de son temps. Nous avons nommé le latiniste,
l'helléniste, l'hébraïsant Jacques de Billy
(1576). Après avoir fait à Paris ses premières
études, étudié le droit à Orléans
et complété son éducation à Poitiers,
de Billy était devenu un homme très savant, surtout
dans les langues grecque et hébraïque, et un littérateur
distingué. On a de lui des traductions latines : 1°
Des uvres de saint Grégoire de Naziance
(20) ; - 2° Des lettres d'Isidore de Peluse (21)
; - 3° Des uvres de Jean Damascène (22)
; - et quelques ouvrages de saint Jean Chrysostôme
(23). De plus, il a publié six livres en vers, du second
avènement de Notre-Seigneur (24).
On doit encore à Jacques de Billy un dernier
ouvrage que ne mentionne pas la biographie universelle. Il a
pour titre : Antologia sacra ex probatissimus utriusque linguæ
partibus collecta, atque tastutris versibus comprehensa.
Si tous ces ouvrages ne prouvent pas que le goût
fut formé, ils montrent du moins que le souffle des discordes
civiles n'était pas assez puissant pour éteindre
le flambeau de la science, et pour empêcher les esprits
généreux de pousser le monde vers un avenir meilleur,
comme le fit Jacques de Billy.
Voici du reste ce que dit de lui un écrivain
peu suspect, La Popelinière, après avoir mentionné
sa présence au siège de Poitiers en 1569. - «
Là, dit-il, furent tués le capitaine Prunay et
son frère. Ils étaient de la noble famille de
Billy et maisons de Prunay, et laissèrent l'abbé
de Saint-Michel-en-l'Air et, de Saint-Vincent-de-Laon, frères,
desquels le premier est si bien pourvu de toute exquise littérature
qu'il en est recommandé par tous ceux qui le connaissent
: ce que la version de Grégoire Nazianze témoigne
et quelques autres docteurs grecs ecclésiastiques qu'il
a rendu latin depuis qu'il est abbé de Saint-Michel,
que son frère qui est aujourd'hui prieur de Gaillon;
quitta et autres biens de ce inonde, pour se rendre religieux
aux chartreux de Paris », août 1569. - Histoire
de France, tome II, folio 116.
Jacques de Billy mourut à Paris le 25 décembre
1581 (25) chez son ami le bénédictin Génébrard,
professeur d'hébreu, renommé par sa vaste érudition,
la publication d'un grand nombre d'ouvrages et son exagération
comme Ligueur.
Jacques du Fouilloux. - A côté
des Nicolas Rapin, des Rivaudeau, il convient de placer encore,
mais dans un cadre différent, un autre bas-poitevin,
écrivain de talent et veneur émérite, dont
la réputation fut presque européenne. Jacques
du Fouilloux, auteur du célèbre traité
de la Vénerie, naquit vraisemblablement au château
de Bouillé-Courdault, vers le mois de septembre 1519,
et mourut le 5 août 1580 (26).
Nous ne dirons, rien de son existence orageuse,
de ses démêlés conjugaux, du rôle
qu'il joua pendant les guerres de religion. Sa renommée
de veneur émérite lui servit en quelque sorte
de sauvegarde au milieu des discordes civiles, et les partis
qui se disputèrent la possession du Bas-Poitou respectèrent
en lui le précepteur de la gentilhommerie.
Du Fouilloux doit sa célébrité
au livre de la Vénerie, « ouvrage écrit
avec beaucoup de goût, de verve et d'originalité,
et rempli d'observations curieuses, dont les travaux des naturalistes
modernes ont démontré l'exactitude. La première
réédition parut à Poitiers en 1561, chez
les Marnef et les Bouchet, frères. Le privilège
est daté d'Orléans, le 23 décembre 1560.
En tête de ce volume, de format petit in-folio,
et orné de nombreuses gravures en bois, est une dédicace
adressée à Charles IX, qui est l'expression de
la philosophie de l'auteur. « Il est certain et notoire
à chacun, y dit-il au Roi, que, de tout temps, les hommes
se sont adonnés à plusieurs hautes et occultes
sciences : les uns à la philosophie pour contenter leur
esprit, les autres aux arts mécaniques pour acquérir
des richesses. Les inventions desquels ont cri tant de manières
esté éparses, que de les desduire et nombrer par
le menu, seroit quasi chose impossible. De façon qu'après
avoir le tout bien examiné et considéré,
enfin je me suis arresté à ce qu'à dit
ce grand et sage roy Salomon : que toutes choses qui sont souz
le soleil ne sont que frivole vanité; d'autant q'il n'y
a science ny art qui puisse, allonger la vie plus que ne le
permet le cours de nature. Pour ce m'a-t-il semblé, Sire,
que la meilleure science que nous pouvons apprendre (après
la crainte de Dieu) est de nous tenir et entretenir joyeux,
en usant d'honnestes exercices, entre lesquels je n'ay trouvé
aucun plus noble et plus recommandable que l'art de la vénerie.
»
On ne peut rien ajouter à ces quelques
lignes ; elles peignent l'homme tout entier. Sceptique, ou plutôt
indifférent en matière de religion, à une
époque de fanatisme, il sut vivre presque en paix, au
milieu des troubles qui bouleversèrent la province où
il vécut. Il fit en sorte de « s'entretenir joyeux
» et de se renfermer dans un voluptueux égoïsme.
La Vénerie a été réimprimée
vingt-deux fois en France (27), trois ou quatre fois en Allemagne
et une à Milan. On a joint à quelques-unes de
ces nombreuses éditions la Fauconnerie de Jean de Franchières,
la Chasse aux Loups de Clamorgand et le Miroir de
fauconnerie de Pierre Harmont. - Le livre de du Fouilloux
dut sa grande vogue à la passion de la noblesse pour
la chasse ; pendant un siècle et demi on le trouve dans
tous les châteaux. Malgré le nombre considérable
des exemplaires répandus, il est devenu fort rare aujourd'hui,
par cela même qu'il a été beaucoup lu, beaucoup
étudié, et les bibliophiles se le disputent à
des prix très élevés, surtout lorsqu'il
apparaît en éditions primitives. - Le poème
de l'Adolescence est d'une versification simple et facile.
Comme dans tout ce que composa l'auteur, on y trouve trace du
vieux esprit railleur et graveleux de nos pères. Il fait
suite à la Vénerie(28).
Les vignettes en bois qui décorent la première
édition sont fort intéressantes. Dessinées
avec liberté, par un artiste de quelque talent, elles
ont été gravées par des ouvriers inhabiles;
mais elles ont néanmoins conservé le cachet de
leur origine poitevine, qui se révèle surtout
dans le costume des gens de la campagne. La première
planche représente du Fouilloux offrait son uvre
à François II, auquel elle avait été
d'abord dédiée. Les gravures des réimpressions
n'ont plus la même naiveté. Celles de l'édition
allemande de Strasbourg (1590) ont été exécutées
par Guillaume Swanenborg, Daniel Meyer, Christophe Maurer et
Christophe Stimmer, d'après les dessins de Jost Amman
et de Tohie Stimmer (29)
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NOTES:
(1) La première imprimerie du Poitou fut
établie en 1508, aux Moutiers-sur-le-Lay, résidence
d'été des évêques de Luçon.
par Jehan Clémenceau, qui y avait
été appelé par Pierre de Sacierges. - La
seconde en date apparut à Poitiers en 1519, par une édition
du Breviarum historiale, puis les Coutumes du Poitou,
in-folio. Vers 1550, une imprimerie était fondée
à Fontenay, par Antoine d'Angicourt, fils de Pierre d'Angicourt,
le premier libraire venu à Fontenay, au commencement
du règne de François Ier. Dans le siècle
suivant, on vit briller comme imprimeurs à Poitiers,
jean et Engilbert Marnef, les frères Bouchet, fils ou
neveux de l'annaliste, et d'autres dont les travaux rivalisent
avec les plus belles éditions, par la correction du texte
et l'élégance de l'impression.
(2) Le 6 août 1492, André
de Vivonne, sénéchal du Poitou, lui faisait don
d'un morceau de terre situé au terroir du Reclus (quartier
du Bedouard). - Archives de Fontenay, T. I, page 403.
(3) L'avocat Fouschier s'attacha
de bonne heure à la fortune du fameux chancelier Duprat,
auprès duquel il se trouvait, à Bologne, en 1516,
lorsque celui-ci régla avec Léon X, les articles
du Concordat qui abolit la Pragmatique-sanction de Bourges,
et gouverna l'église gallicane jusqu'à la Révolution.
L'année suivante, il était à Rome, où
le pape lui donna un bénéfice considérable.
Fouschior entra dans les ordres à la fin de sa vie, et
mourut en septembre 1527, laissant la réputation d'un
homme lettré et fort habile au maniement des affaires.
(4) Il était le frère
de Méry Bertin, époux de Catherine Teroille, fondatrice
du couvent des sueurs du tiers-ordre de saint François
ou de sainte Claire, établi au Puy-Saint-Martin en 1459,
à côté de celui des Cordeliers.
(5) Probablement fils d'un tanneur
de Fontenay. - Les Archives de Fontenay,T.II, page 27
bis, possèdent, portant la date du 30 juin 1509, une
quittance du prix de divers livres, donnée parun commis
d'Henry Estienne, imprimeur à Paris, au Cordelier Pierre
Lamy, mandataire de Geoffroy d'Estissac, évêque
de Maillezais.
(6) Les Archives de Fontenay possèdent
plusieurs lettres de Guillaume Budé : l'une datée
d'Autun (14 août 1523), est adressée à Pierre
Lamy, T, u, pages 37 et 39, une seconde du 26 janvier 1524,
est adressée à Rabelais, après que Budé
eut appris les premières persécutions que Pierre
Lamy et le futur curé de Meudon avaient essuyées
de la part des Cordeliers, T. II, pages 41 et 46, une troisième
de 1524, à Pierre Lamy, relative aux persécutions
que les Cordeliers de Fontenay avaient fait éprouver
à Rabelais, T. II, pages 49 et 53. Pierre Budé,
savant français, né à Paris en 1467, mort
en 1540, surnommé par Erasme, le Prodige de la France.
Ce fut à son instigation que François Ier fonda
le collège de France. Il fut nommé maître
des requêtes sous ce règne, et devint prévôt
des marchands.
(7) Deux ans après, au mois
de novembre 1544, paraissait un édit royal, portant érection
du siège particulier de Fontenay-le-Comte en sénéchaussée,
et création de l'office de sénéchal de
robe longue au dit siège (Archives de Fontenay,
T. III, pages 147 à 154).
(8) Françoise Brissot, sur
du père de Pierre, avocat de talent et grand homme de
bien, se maria avec un certain Denis Ballard, fils d'un fermier
de Mervent, qui, après avoir voulu se faire prêtre,
renonça à ce projet, et entra en qualité
de musicien dans la maison de Dunois, seigneur de son lieu de
naissance, puis ensuite dans celle de Louis XI. Le prince, satisfait
sans doute de ses services, lui assigna des gages de vingt-et-un
écus d'or sur la seigneurie de Fontenay, et l'autorisa,
en 1477, à lever boutique de librairie près du
collège de Beauvais, à Paris. Françoise
Brissot étant morte, il épousa en secondes noces
Nicole Bruneau, qui lui donna plusieurs enfants. Robert Ballard,
l'un de ses petits-fils, obtint de Henri II le seul privilège
d'imprimeur de musique du royaume, privilège exercé
jusqu'à la Révolution par ses descendants, qui
continuèrent à habiter la rue Saint-Jean-de-Beauvais,
tout près de l'imprimerie des célèbres
Estienne. Robert Ballard possédait encore, en 1549, une
borderie proche du Cul-de-Bray, paroisse de Mervent. Les membres
de la famille Ballard, restés dans le pays, eurent nombreuse
postérité. L'un d'eux vint se fixer à Fontenay
vers la fin du XVIe siècle. De lui, est issu David Ballard,
curé du Poiré-de-Velluire, député
du clergé de Poitou aux états généraux
de 1789 ; l'un des trois premiers prêtres qui se réunirent
aux tiers-état.
(9) Il avait reçu le bonnet
de docteur en médecine en 1514, et fut obligé
de quitter la chaire de philosophie de l'Université de
paris, où en 1512 il avait remplacé son ami et
ancien professeur Villemor.
(10) Marié en 1512 à
Marie Cailler, dont il eut dit-on 30 enfants. Cette union féconde
fut si bien assortie, que jamais dit un de ses biographes, le
moindre désaccord n'en troubla la bonne harmonie. Les
années passèrent sur la tête des époux,
sans que cet heureux couple s'aperçut qu'il vieillissait
autrement qu'à la blancheur des cheveux. La tendresse
conjugale n'eut point à souffrir des injures du temps,
et Jacques Spifame a raison de dire que dans ses relations intimes
avec Marie Cailler,' Tiraqueau aurait pu répéter
les vers d'Ausone : « Chère compagne, vivons comme
nous avons toujours vécu, et ne nous parlons pas autrement
que la première nuit de notre mariage. Que le soleil,
en nous éclairant de ses rayons, ne vienne pas nous dire
que nous avons changé avec l'âge, puisque, à
tes yeux, je suis toujours un jeune homme, et que tu me sembles
toujours être une jeune fille. » Merland, T. V,
page 357.
(11) Victime des violences de la
Ligue, et surtout de la faction des Seize, il fut pendu le 16
novembre 1591, à une poutre de la chambre du Conseil.
(12) Extrait du remarquable rapport
lu par M. Giraud, au congrès archéologique de
France, XXXIe session, à Fontenay (année 1864).
(13) Le 11 juin 1561, François
de Sallenove, fermier du domaine de Fontenay, qui faisait partie
du douaire de la feue reine Eléonore, femme de François
1er, était invité à rendre ses comptes
à Viète. Archives de Fontenay, T.II, page
255.
(14) En 1631, le mathématicien
Anglais Harriot, le cite comme l'homme qui, par son admirable
habileté en mathématiques, a fait le plus grand
honneur à la France, et plus de cent ans après,
un autre anglais, Edmond Halley, le proclame le restaurateur
et le promoteur de l'algèbre moderne.
(15) M. Merland, dans ses Biographies
vendéennes, dit 1540: Le consulter pour plus de détails.
- M. Mourain de Sourdeval a publié, en 1869, les oeuvres
poétiques d'André de Rivaudeau, à Paris,
chez Auguste Aubry.
(16) Extrait de l'A. E. 1858, page
1934.
(17) Profils vendéens,
par Sylvanecte, pages 21 et 22.
(18) Dans le chapitre consacré
aux Guerres de religion, nous aurons l'occasion de parler de
la Popelinière, capitaine.
(19) Cette devise a dû être
tirée de la traduction XVII « Dieu est mon roc,
mon rempart haut et seur, « C'est ma rançon, c'est
mon fort défenseur, » Clément Marot.
(20) 1576, in-fol. - En 4582, Génébrard
et Chatard en donnèrent une nouvelle édition en
deux volumes, en y joignant la vie de l'auteur.
(21) 1585, in-fol.-A la fin se trouve
un travail intitulé : Sacrarum observationum libris
duo, qui fait connaître Jacques de Billy, comme un
des premiers critiques de son temps.
(22) 1577, in-fol.
(23) 1581, Ibid.
(24) 1576, Ibid.
(25) Nicolas Rapin a composé
un poème sur la mort de Jacques de Billy.
(26) En 1565, nous le trouvons garde
général des chasses royales en Poitou, ainsi que
l'établit une commission de garde des forêts, bois
et buissons. appartenant au Roi, en Bas-Poitou, donné
le 8 novembre de cette année par du Fouilloux a Jacques
Buor, seigneur de la Mothe-Freslon, paroisse du Champ-Saint-Père.
- Le 22 novembre 1572, Charles IX confirmait du Fouilloux dans
ses fonctions (Archives de Fontenay), T.II, page 283.
(27) La dernière êdition
a été, croyons-nous, publiée à Angers,
en 1844. L'exemplaire de cette édition est coté
30 francs à la librairie Cheronnet (Paris 1902).
(28) Un autre Bas-Poitevin, Robert
Salnove, né à Luçon vers la fin du xvI·
siècle et mort en 1670, écrivit aussi un traité
sur la Vénerie.- Il est divisé en quatre parties
qui contiennent les chasses du Cerf, du Lièvre, du Chevreuil,
du Sanglier, du Loup et du Renard, avec le dénombrement
des forêts et grands buissons de France, où se
doivent placer les logements, quetes et relais, - M. II. Bourgeois
a consacré à Robert Salnove un fort intéressant
article dans l'Indépendant Vendéen du 25
mars 1901.
(29) Pour plus de détails,
voir Bouillé-Courdault et du Fouilloux, par B. Fillon,
et aussi notre ouvrage sur le canton de Maillezais.
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ÉCLAT DE L'UNIVERSITÉ DE POITIERS
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Vers 1517, l'Université de Poitiers créée
par Charles VII, fut menacée dans son avenir par la création
d'un semblable établissement dans la cité d'Angoulême.
Mais sur les représentations énergiques de la
commune, François Ier retira ses lettres patentes de
fondation et donna ainsi gain de cause aux Poitevins dans leur
rivalité avec leurs voisins d'Angoulême.
Les temps étaient favorables au développement
des Universités : de toutes parts éclataient de
nobles et puissantes tentatives d'émancipation intellectuelle...
L'invention de l'imprimerie et la création
des universités, voilà les deux événements
les plus saillants du XVe siècle ; la science s'échappe
du sanctuaire des cloîtres, pénètre dans
toutes les classes de la société...
Alors, au sein des cités, dans les parlements,
dans les assemblées de l'échevinage, se presse
une multitude d'hommes remarquables par leur érudition
et leur goût pour les lettres.
L'étude du droit devient dans l'université
de Poitiers la science de prédilection. Parmi tous ces
jeunes écoliers, qui durant les premières années
du XVIe siècle, assistaient aux doctes leçons
des professeurs poitevins, plusieurs sont appelés à
jouer un rôle immense dans l'avenir, et à faire
rejaillir quelques étincelles de leur propre gloire sur
la cité dans laquelle se sont écoulées
leurs années de labeur et d'études. Tiraqueau,
Barnabé Brisson, Rapin, Besly, Julien Collardeau, Cailler,
presque tous les juristes et magistrats illustres du XVIe siècle
viennent s'y préparer aux luttes de leur orageuse existence.
Nous voudrions pouvoir anticiper en ce moment
sur les événements de l'avenir, et rappeler la
mémoire de tous ces hommes dont les noms s'associent
aux destinées de la science, aux gloires de la Patrie,
afin de rehausser l'éclat de l'institution que Charles
VII a placée au sein de la capitale de notre province.
L'illustration des Universités n'existe que par celle
de leurs disciples; et même souvent par une injuste prévention,
éblouis que nous sommes par leurs triomphes, nous laissons
dans l'oubli les noms des professeurs qui ont formé leur
intelligence, cultivé leur esprit, et développé
en eux le germe de la science. Ils nous sont presque tous inconnus,
ces savants docteurs dont les leçons ont illustré
l'enseignement de notre Université ; semblables pour
ainsi dire aux augures invisibles de l'antiquité, ils
ne se révèlent à nous que par leurs disciples,
manifestation glorieuse des mystères de leur érudition.
Cependant le souvenir de quelques-uns d'entre
eux s'est perpétué jusqu'à nous à
travers les siècles, et nous avons hâte de raviver
la mémoire de ces hommes qui se sont dévoués
dès les premiers temps au culte de la science et des
lettres. Parmi eux brille au premier rang, Pierre Garnier,
né à Luçon, « le plus savant homme
de son temps (1) et qui se fit beaucoup de réputation
dans la profession du droit civil. Il réunissait tous
les talents d'un professeur ; son esprit était vif, son
geste agréable, sa voix sonore. Personne ne se tirait
avec plus d'adresse de l'embarras où jette quelquefois
la contradiction réelle ou apparente des textes du droit.
Il illustra le Poitou, sa patrie, et toute la France. L'auteur
des additions aux écrivains ecclésiastiques de
Tri thème va jusqu'à lui donner les noms de Solon
et de Lycurgue. »
Plus tard, dans les commencements du XVIe siècle,
Élie Reynier occupa dignement la chaire que la
mort de ce dernier avait laissée vacante : « C'était
un jurisconsulte célèbre et un homme aussi profond
dans l'intelligence de l'écriture sainte que dans les
sciences profanes. Il avait l'esprit vif et parlait avec éloquence
et facilité. Il professa longtemps avec distinction le
droit dans l'Université de Poitiers. On a de lui quelques
ouvrages excellents. » Tels étaient les hommes
dont les laborieuses études répandaient parmi
les habitants de notre province l'amour pour la science et pour
les lettres, propageant de la sorte les germes de la civilisation
moderne.
C'est ainsi que l'ensemble du XVe siècle
nous a apparu sous toutes ses faces, dans tous ses incidents.
Le peuple, la noblesse, l'Église, l'Université,
nous ont initiés aux mystères de leurs propres
destinées. Ne pouvant rallier dans une synthèse
chronologique des événements isolés, indépendants
les uns des autres, nous avons été contraints
à les diviser, à les morceler et à métamorphoser
en épisodes les éléments de l'histoire
générale... (2)
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NOTES:
(1) Dreux-Duradier.
(2) Guérinière, T.
II, page 233.
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