Histoire de Vendée

Histoire de la Vendée
du Bas Poitou en France

Chapitre Précédent Table des matières Chapitre Suivant

CHAPITRE XXXI

Le Grand soulèvement de mars 1793. - Causes et débuts de l'insurrection

Premières nouvelles de l'insurection de 1793 dans le département de la Vendée


LE GRAND SOULÈVEMENT DE MARS 1793

CAUSES ET DÉBUTS DE L'INSURRECTION

 

INTRODUCTION AUX GUERRES DE VENDÉE

 

En 1793, la France faisait front
à l'Europe, la Vendée tenait tête à la
France. La France était plus grande
que l'Europe ; la Vendée était plus
grande que la France.

Victor Hugo.

 

Il n'y a rien de plus connu et de moins bien connu que l'insurrection vendéenne de 1793, la grande guerre, comme l'appellent encore aujourd'hui nos anciens. Cette formidable lutte de deux principes éminemment opposés, que Napoléon a qualifiée de guerre de géants, est peut-être l'événement de notre histoire contemporaine qui a soulevé les enthousiasmes les plus passionnés comme aussi les polémiques les plus ardentes. « C'est qu'elle ne ressemble à aucune de nos campagnes classiques, cette guerre, qui a emprunté un caractère étrange et grandiose de sauvagerie, au milieu où se sont déroulés les événements, et au tempérament de fer des paysans exaltés par leurs croyances. Elle offre surtout un côté romanesque bien fait pour séduire les imaginations populaires, et, pour qui connaît la Vendée, avec ses coteaux boisés, ses sentiers couverts, bordés de buissons de houx, ses vastes champs de genêts et ses fourrés d'ajoncs, il est facile de reconstituer par la pensée ces luttes d'homme à homme, où une poignée de gars résolus, embusqués au tournant d'un chemin creux, guettait le passage d'une patrouille ennemie...  Les Bleus s'avancent en colonne, le cri de la chouette (1) retentit au loin : c'est le signal de l'attaque. Des coups de feu partent à l'improviste derrière les talus à pic, et quand les républicains, revenus de leur surprise veulent riposter, les autres sont déjà loin, égaillés comme une volée de perdreaux dans les genêts (2) ».

Voilà comment se battaient ces hommes, précurseurs des Boërs (3), dont ils eurent l'âme et le courage. Voilà comment ils défendirent pied à pied leur territoire. On leur donna pour cri de ralliement : Dieu et le Roi ! Ce cri leur allait ; ils s'y reconnaissaient : c'était la Vendée ! Ils étaient très forts parce qu'ils combattaient pour une idée : là du reste est leur absolution sinon leur gloire. Armés de leurs convictions, ces soldats improvisés ne regardaient la mort que comme in accident de peu d'importance, et lorsqu'une balle républicaine venait pour jamais les coucher au fond d'un hallier, ils s'en allaient de ce monde ensanglanté avec le grand sentiment du devoir rempli et l'espérance d'une vie meilleure.

Jamais plus de courage et de désintéressement ne furent unis à plus de gloire et de malheurs : et lorsqu'on compare les divers événements qui ont tour à tour agité les empires et fourni ces combats fameux qu'un enseignement traditionnel a légués à notre admiration, on se demande comment cette grande croisade vendéenne n'a pas servi de thème à quelque Homère moderne, dont la lyre eut célébré tant de prodiges de valeur qui ont étonné l'Univers et fait de la Vendée une pépinière de héros (4).

Sans doute en s'insurgeant contre la Révolution, les Vendéens ont combattu la France. Ce n'est pas à dire cependant qu'ils manquaient de patriotisme : seulement la patrie pour eux, c'était le pays qui les avait vu naître, le berceau de leurs familles, la terre que depuis dix-huit siècles ils avaient arrosée de leur sang, fécondée de leurs sueurs. Au delà, tout territoire leur était inconnu, étranger. Aussi lorsque la France envahie proclama ce mot magique qui mit tous ses enfants sur pied : la Patrie est en danger ! - ils ne comprirent pas. Ces mots n'avaient pas de sens pour eux, et ne firent pas vibrer leurs âmes. Pays ! Patrie ; ces deux mots, a dit Victor, résument toute la guerre de Vendée.

 

Retour haut de page

De plus, la Révolution, dans son œuvre, était essentiellement agressive. La réforme du clergé dans son radicalisme leur parut être un attentat à la liberté du culte. On avait dispersé les moines, les religieuses, chassé les prêtres de leurs presbytères. C'était la mort à toutes leurs traditions, à tous les vieux usages et aux coutumes de leurs pères, la mort au passé que l'on proclamait. Ils ne purent admettre que leurs prêtres se soumissent à ces lois nouvelles. Le clergé résista au nom des droits sacrés de la conscience et sa résistance provoqua des persécutions. Ces persécutions à leur tour enfantèrent des martyrs et le sang de ces martyrs fit germer la révolte. La religion attaquée, c'était la seule cause qui pût remuer ce peuple. Un écrivain moderne, Jules Sandeau, l'a fort bien compris quand il a dit que « si les Bourbons avaient osé toucher à la religion de la Vendée, la Vendée se serait armée contre les Bourbons ».

« Oui, ce fut une véritable Jacquerie des temps modernes, ce soulèvement de paysans accourus par bandes du fond de leur Bocage, insurgés contre les lois de la Convention nationale, et, par un-bizarre retour des choses d'ici-bas, allant chercher dans leurs châteaux pour les mettre à leur tête leurs seigneurs (5), tandis que, quatre-cents ans plus tôt, c'est contre ces seigneurs mêmes que leurs ancêtres de la Jacquerie féodale levèrent leurs bâtons ferrés » (6).

S'il est certes un fléau, qu'il faille redouter avant tous les autres, un crime qu'il faille flétrir de toute l'énergie de son cœur, c'est la guerre civile, guerre implacable entre toutes. « Mais comment nos sympathies n'iraient-elles pas tout naturellement à ces hommes simples et résolus, qui, seuls dans toute la France, osèrent s'attaquer à la puissance formidable de la Convention, quand le pays tout entier, terrorisé par les exécutions en masse, courbait la tête sous le couteau de la guillotine ». Leurs chefs étaient bien grands : Cathelineau, d'Elbée, Bonchamps, La Rochejaquelein, Lescure, Charette, Stofflet, Marigny, tous des cœurs de chêne, des héros. Mais je ne sais s'il ne faut pas plus admirer encore ces paysans qui les entouraient, ces dévoués, ces désintéressés, ces intrépides ; obscurs dans la mort comme ils l'ont été dans la vie ; serviteurs de la foi, non de la gloire.

Aussi bien, notre admiration et notre enthousiasme pour l'héroïque résistance de ces paysans guerriers ne doivent pas nous empêcher de rendre un légitime hommage au courage et à l'énergie des adversaires avec lesquels ils eurent à se mesurer. Il nous faut en effet faire une large part de gloire à ces pauvres soldats de la République, à ces sans-culottes de l'armée du Rhin, héros futurs des guerres de l'Empire qui, jetés au milieu d'un bocage presque inaccessible, souvent mal dirigés, donnaient tête baissée dans ce labyrinthe inextricable et profond (7) où les attendait un ennemi insaisissable et une mort presque certaine. Les crimes de quelques-uns de leurs généraux ont pu jeter sur ces troupes patriotes un discrédit immérité ; ils n'ont pas porté atteinte à leur bravoure de soldats.

Trois générations nous séparent de ces événements, qui eurent pour acteurs nos grands-pères et qui nous ont été racontés par nos pères. Ce fut entre les hommes de 1793 et les derniers défenseurs de la féodalité expirante un duel à mort, où de rudes coups furent portés de part et d'autre.

Aujourd'hui que l'apaisement est fait, après un siècle écoulé entre la Vendée et la France, on peut affirmer que, quelles qu'en aient été les suites désastreuses au point de vue national, cette guerre est et restera une page glorieuse de l'histoire de notre épopée révolutionnaire. « Glorieuse pour les vaincus, glorieuse aussi pour les vainqueurs : car, dans les deux camps. il y avait d'honnêtes gens, tous Français, qui se battaient avec un égal courage, pour le triomphe de leurs principes ».

 

 

Retour haut de page

(1) Le cri par-lequel les Vendéens s'appelaient et se répondaient d'une colline à l'autre en houpant d'une façon mystérieuse et parfois sinistre, comme les hôtements de Jean des Bois, c'est-à-dire du chat-huant, à fait appeler quelquefois les Vendéens insurgés : Les Chouans, Or, rien n'est moins vrai. - Les Chouans furent les insurgés du Maine et de la Basse-Normandie et d'une partie de la Bretagne, qui, sous la direction de chefs se dissimulant pour la plupart sous des pseudonymes, comme ceux de Tranche-Montagne, de Jambe-d'Argent, etc., ne firent qu'une guerre de surprise, d'embuscades et de coups de mains. Or, la Vendée n'a jamais chouanné, même dans son agonie ; c'est au jour, à visage découvert, en regardant bien l'ennemi en face qu'elle a toujours combattu.

(2) Préface du journal d'un conventionnel, par Leroux-Cesbron, page 1.

(3) Plus on compare la guerre des Vendéens et celle des Boërs et plus se révèlent de multiples et saisissantes analogies. Si l'on fait abstraction des différences de cause et de but, dans cette lutte de deux populations de laboureurs et de bergers contre des armées puissamment organisées, les mêmes péripéties, presque les mêmes épisodes se représentent et se succèdent avec une exactitude vraiment étonnante. D'abord une période de grande guerre et d'invraisemblables victoires que stérilisait l'indiscipline et le manque de cohésion de ces levées en masse. Victorieux en rase campagne, Vendéens et Boërs échouent fatalement, sitôt que le succès exige plus d'obéissance passive que d'enthousiasme et plus de méthode que de courage. Ils ne sont capables ni de venir à bout d'un siège ni de poursuivre un plan de campagne. Les uns sont repoussés de Nantes et perdent l'occasion de pénétrer en Bretagne, les autres ne peuvent s'emparer de Ladismith et laissent passer le moment d'insurger la colonie du Cap, etc. - René Blachez, Bonchamps et l'insurrection Vendéenne, page 5.

(4) Un officier républicain a su clairement apprécier du reste la nature, la grandeur et l'importance de l'insurrection vendéenne. « J'ai contemplé de près, dit-il, cette guerre de la Vendée si pleine d'intérêts et d'images : j'y pense le jour, j'y rêve la nuit ; ce n'est pas une guerre froide et plate, une guerre d'ambition et de politique, une guerre de commerce et de calcul ; c'est une guerre profonde, qui a ses racines dans le sol, dans le culte, une guerre de famille et de patrie, une guerre à la manière antique et passionnée, une guerre homérique et qui montera un jour sur nos théâtres pour y porter l'effroi, l'admiration, la pitié et l'amour. »

« J'ai vu des peintres qui allaient en Syrie chercher des sujets de bataille ; j'ai vu des poètes qui allaient en Grèce ou en Pologne chercher des chants et des inspirations, mais l'Anjou, le Poitou, le Maine et la Bretagne ont des pages toutes prêtes, des odes toutes faites. C'est folie coupable d'aller si loin s'attendrir, s'égarer, quand tout appelle ici la palette et la lyre !» - L'abbé Deniau. - T. I, p. 237.

(5) Voir à ce propos, dans la Revue du Bas Poitou, Ve année, page 202-201, un remarquable article de M. Baguenier-Désormeaux, intitulé : La noblesse de l'Ouest au moment de la Révolution.

(6) Préface du journal d'un conventionnal, page 2.

(7)Expression de Kléber.

 

CONSIDÉRATIONS GÉNÉRALES SUR LA VENDÉE, SUR LES VENDÉENS ET SUR LES CAUSES DE LA GUERRE CIVILE

 

§ I - La topographie du pays.

 

Le théâtre de la Vendée militaire, c'est-à-dire de toute la contrée qui s'est soulevée contre la Convention en 1793, occupe un espace d'environ huit cent lieues carrées. Ses limites peuvent être tracées par une ligne conventionnelle tirée à l'est dans la direction des Ponts-de-Cé à Brissac, Doué, Thouars, Parthenay et Niort ; - au sud par la route de Niort à Fontenay, Luçon et les Sables-d'Olonne ; - à l'ouest par les côtes de la mer jusqu'à Paimbœuf ; - et au nord en remontant la rive gauche de la Loire jusqu'aux Ponts-de-Cé. Cette enceinte, renfermant au. moins huit cent mille âmes, comprend la majeure partie du département de la Vendée, une portion de celui des Deux-Sèvres, et tout ce qui appartient aux départements de Maine-et-Loire et de la Loire-Inférieure, sur la rive gauche du fleuve. Quoique la guerre civile n'ait point reçu sa première impulsion du département de la Vendée, il a cependant donné son nom à cette guerre, parce que ses habitants y ont pris la part la plus active, la plus générale et la plus opiniâtre. Sur 750 communes de ces quatre départements, 480 ont contribué à l'insurrection, dont 113 dans le département de la Vendée, 130 dans celui de Maine-et-Loire, 87 dans les Deux-Sèvres et 80 dans la Loire Inférieure.

Le département de la Vendée, en dehors de deux îles de peu d'étendue, comprend trois parties bien distinctes : le Bocage, la Plaine et le Marais. Nous en avons fait la description actuelle dans notre premier volume ; nous allons donner ici un simple aperçu de ce qu'était le pays au moment de la Révolution.

Le Bocage, couvert de hautes futaies et de bois-taillis plus nombreux qu'aujourd'hui et, très peu étendus, arrosé par de nombreux cours d'eau, formait les deux tiers du pays insurgé et présentait dans son ensemble l'aspect d'une forêt sauvage et touffue. Les propriétés y étaient partagées en petits enclos de, deux ou trois hectares au maximum, entourés de larges fossés, bordés de fortes haies de deux ou trois mètres de hauteur, parsemés d'arbres faisant l'effet de palissades autour d'un ouvrage fortifié ; c'était ordinairement sur la lisière de ces haies que les Vendéens préparaient leurs embuscades.

Le pays n'était traversé que par les routes royales passant l'une par Mortagne, Les Herbiers, les Quatre-Chemins de l'Oie, les Essarts, la Roche-sur-Yon et les Sables-d'Olonne ; l'autre par Chaillé-les-Marais, Sainte-Gemme-la-Plaine, Sainte-Hermine, Chantonnay, les Quatre-Chemins, Saint-Fulgent et Montaigu. Ces deux routes étaient reliées entre elles ou plutôt coupées par de nombreux chemins communaux raboteux, remplis souvent de fondrières, et auxquels venaient s'enchevêtrer des milliers de sentiers étroits, tortueux, sorte de défilés constituant dans leur ensemble un labyrinthe obscur, inextricable et profond, dans lequel une armée ne pouvait en quelque sorte marcher qu'à tâtons et sans se déployer. De là l'impossibilité de disposer d'avance un ordre de bataille, d'exécuter des manœuvres, d'établir une correspondance et des communications, de régulariser, de coordonner les mouvements d'une armée. On conçoit qu'un pareil pays, partout enveloppé d'ombre, de silence et de mystère, devait déconcerter toutes les combinaisons, tous les principes de la tactique militaire. Plein de ressources pour la défense, il opposait les plus grands obstacles à la guerre offensive.

Le Marais de Challans, de Machecoul, de Saint-Jean-de-Monts, présentait des obstacles d'un autre genre. C'est un terrain plat et découvert, coupé de canaux ou de marais salants, avec, pour chemins, des sentiers pratiqués entre deux canaux. On ne peut guère voyager dans ce pays sans avoir sur l'épaule la longue perche appelée ningle, avec laquelle le soldat maraîchin, son fusil en bandoulière, franchissait facilement des fossés de 10 à 12 pieds de largeur. Poursuivi par l'ennemi, il se jetait dans sa niole, bateau plat et léger, se cachait dans les hautes herbes du talus, et au moment où l'ennemi y comptait le moins, il déchargeait sur lui sa carabine, et disparaissait encore avec la même rapidité pour recommencer sur un autre point de marais.

La Plaine, d'une composition géologique différente, et aux aspects absolument dissemblables, ne tient à la Vendée que parce qu'elle est enclavée dans ses limites. Pays plat et presque complètement dépourvu d'eaux vives, cette région est habitée par une population dont les caractères, les tendances, les goûts ne ressemblent guère à ceux des autres parties du département et qui, dans son ensemble, ne prit qu'une faible part au soulèvement de 93.

 

Retour haut de page


§ II - Caractères des Vendéens.

État politique et religieux de la Vendée avant la Révolution.

 

La Vendée, au moment de la Révolution, formait un étrange contraste avec le reste de la France. Confinés dans leur bocage ou dans leur marais, par suite des difficultés de communication avec les pays voisins, les Vendéens vivaient dans une solitude profonde, où n'avaient guère pénétré ni les premières lumières de la Renaissance, ni le génie littéraire du grand siècle, ni les maximes philosophiques du XVIIIe siècle.

Immobiles pour ainsi dire au milieu du mouvement général, esclaves trop souvent de leurs habitudes et de leurs préjugés, quand tout changeait autour d'eux, ils étaient presque partout restés en dehors du mouvement qui emportait la société civile vers une ère meilleure.

Profondément religieux, les Vendéens avaient entière et absolue confiance dans leurs prêtres, et aucun événement important de la vie ne s'accomplissait sans que le curé eut le premier rôle et la place d'honneur avec le seigneur. On conçoit quelle influence devaient exercer les prêtres sur un pareil peuple : influence d'autant plus grande que dans ce pays la richesse n'avait point corrompu les mœurs et qu' ils exerçaient un ministère tout paternel. Le curé avait un empire absolu sur ses paroissiens : c'était pour eux le dispensateur des grâces célestes, la première puissance de l'état, et en quelque sorte le représentant de Dieu sur la terre.

Sous le rapport politique, la Vendée ne ressemblait pas non plus au reste de la France. Dans ce pays de mœurs patriarcales, les servitudes féodales étaient douces, et ces mêmes hommes qui acceptaient docilement l'autorité des prêtres, savaient au besoin résister à leurs seigneurs, et ne se seraient pas soumis à un ordre tyrannique ou à un usage avilissant. Dès qu'il s'agissait de leur propriété ou de leur indépendance, ils reprenaient le sentiment de leur force et de leur dignité, et l'on voyait alors se manifester en eux cet instinct de l'égalité, qui se conserve toujours dans les âmes, que la corruption et l'habitude de l'esclavage n'ont point énervées. Travailleurs, économes, probes, fidèles à la parole donnée, pleins de désintéressement, méprisant les plaisirs et la mort, les Vendéens rappelaient par plus d'un côté les républicains de l'ancienne Rome. Ils avaient comme eux toutes les vertus qui font les citoyens libres.

Aussi tous les écrivains qui ont parlé de la Vendée ont remarqué comme une singularité que dans l'armée catholique royale, il y avait plus d'esprit d'égalité et des formes plus républicaines que dans l'armée de la République. Les guerres de Vendée amenèrent en effet ce résultat singulier : deux armées se trouvèrent en présence : l'une avec l'étiquette républicaine servait un gouvernement despotique ; l'autre, sous le drapeau de l'insurrection luttait pour son indépendance, pour sa liberté et pour sa foi religieuse.

Si d'un côté les brillantes armées de la République avaient pour chefs Augereau, maître d'armes ; Rossignol, orfèvre ; Moreau, prévot d'une école de droit ; Jourdan, marchand mercier ; Brune, imprimeur, etc., de l'autre, dans les armées vendéennes, le commandement fut d'abord aux mains de Cathelineau, colporteur ; Stofflet, garde-chasse ; Gaston, perruquier ; Esigny, ancien gendarme ; Forest, paysan ; Pajot, marchand de volailles, etc.

Un autre trait distinctif du caractère des Vendéens, c'était leur répugnance pour le service militaire ; non par lâcheté, mais par amour pour leur pays natal, par attachement à leurs habitudes.

En Vendée, la position des paysans vis-à-vis des nobles ne fut jamais celle des serfs vis-à-vis des seigneurs. En dehors des villes de Fontenay, Les Sables, Luçon et de quelques gros bourgs habités par de petits propriétaires, des artisans et des marchands, le reste du département était partagé en une multitude de petites métairies, affermées souvent 5 ou 600 francs, exploitées de père en fils par la même famille, qui partageait le produit des bestiaux avec le maître de la terre auquel incombaient presque toutes les rentes et redevances féodales. De là naissaient des rapports continuels et affectueux entre les nobles et les paysans. Il y avait même dans ces relations une familiarité de bon aloi qui excluait toute idée de servitude, et l'on peut dire que les nobles vendéens, vrais campagnards pour la plupart, n'avaient des seigneurs de l'ancien régime que le nom.

 

 

Retour haut de page

 

§ III - Origine et causes de la guerre de Vendée

 

On a cherché les vraies causes de la guerre de Vendée et l'on n'a donné le plus souvent que des prétextes. Quand un homme s'est élevé par de grandes actions, on demande quels moyens il a employés. La cause initiale c'est son génie. Il faut chercher les causes de la guerre civile de la Vendée, surtout dans le caractère de ses habitants, ou plutôt dans le caractère particulier des habitants du bocage et du marais occidental chez lesquels elle a pris naissance et qui, aux jours des victoires comme aux jours des défaites, y eurent la part la plus grande et la plus active.

Lorsque la convocation des Etats-Généraux réveilla le sentiment de la liberté et fit naître dans tous les cœurs français l'espoir d'une organisation politique et civile plus conforme à la dignité de l'espèce humaine, les habitants de la Vendée ne prirent en général aucune part à l'enthousiasme universel. Ils accueillirent même avec indifférence les premiers événements de la Révolution. Sans désirs comme sans besoins, ils ne pouvaient se former une juste idée de l'égalité à laquelle on les appelait, et ils ne virent dans la suppression de la féodalité qui leur était particulièrement douce, ainsi que nous l'avons dit, qu'une innovation dont ils n'appréciaient pas le but, et qui dès lors répugnait à la constance de leurs habitudes.

Aux institutions anciennes succédèrent tout à coup des institutions nouvelles qui leur déplurent par leur nouveauté même. Comme le dit excellemment quelque part Jules Simon, « ces têtes de granit ne voulaient pas du nouveau. »

Cependant, cette indifférence pour les bienfaits de la Révolution ne fut pas universelle dans la Vendée. Dès le début, la majorité des habitants des villes, de la plaine et du marais méridional, où la civilisation avait fait plus de progrès se déclara nettement pour la cause de la liberté ; et dans le bocage même, certaines nouveautés révolutionnaires, telles que la suppression de l'impôt sur le sel, le droit de chasse, la suppression des justices seigneuriales, furent loin de déplaire aux paysans. A Maulévrier notamment, le parquet seigneurial avait été renversé par les habitants avant que la loi ne l'eût aboli.

Les paysans conservaient toujours, il est vrai, pour la personne de leurs seigneurs le respect et l'affection que ceux-ci avaient su se concilier depuis des siècles par leur douceur et leur affabilité, et dans les élections qui eurent lieu dans les premières années de la Révolution, ce furent encore les seigneurs qui furent élus aux premiers postes. Mais l'abolition des titres nobiliaires ne leur inspira pas le plus léger regret et ne les aurait pas un instant détournés de leur famille et de leur charrue.

La suppression des ordres religieux ne souleva même presque aucune émotion ; beaucoup de monastères étaient dépeuplés, les mœurs de certains moines étaient décriées, et il faut savoir le dire, leur piété s'était presque partout singulièrement attiédie. L'engagement formel pris par la Constituante de subvenir aux besoins du culte, semblait légitimer l'expropriation de leurs biens, et beaucoup de famille très orthodoxes et très attachées à la royauté ne se firent point scrupule d'en acheter.

Mais ces changements matériels dans la situation de l'Église ne satisfaisaient pas les idées philosophiques et voltairiennes de la majorité des constituants. Il fallait saper par la base cette grande institution dix-huit fois séculaire, l'Église catholique toujours debout, et pendant les mois de juillet, d'août et de novembre 1790, l'Assemblée essaya de la renverser en votant la fameuse Constitution civile du clergé.

Jusque-là la Vendée était pour ainsi dire demeurée indifférente aux réformes accomplies ; mais lorsque fut décrétée la Constitution civile du clergé, son exaspération ne connut plus de bornes, et l'on peut dire que cette révolte de la conscience catholique contre la tyrannie de l'impiété révolutionnaire fut la véritable : on peut dire presque l'unique cause des soulèvements qui vont se produire bientôt.

La Constituante avait décrété que dorénavant évêques et curés devaient être nommés par le peuple, à l'élection, comme aux premiers siècles de l'Église ; assimilés à tous les fonctionnaires, ils devaient prêter le serment civique à la nation et à la loi. Le lien qui unissait l'Église au Saint-Siège se rompait ; le pape était déchu de toute autorité et de tout contrôle : la nomination du clergé n'appartenait plus à l'Église de France ; elle se trouvait livrée aux intrigues d'assemblées électorales, où les adversaires de la foi catholique, les incrédules, les protestants et les juifs siégeaient à côté des fidèles. Par là le principe de la souveraineté du peuple devenait un des dogmes du nouveau culte : l'orthodoxie du ministre dépendait des caprices de la foule.

Or, le paysan vendéen, ainsi que nous l'avons dit, vénérait son curé institué canoniquement pasteur des âmes, et ce fut, consterné et avec la rage dans le cœur qu'il accueillit la publication de la Constitution civile, qui eut lieu vers la fin de janvier et au commencement de février 1791.

Aussi l'installation des intrus (c'est-à-dire des prêtres assermentés ou constitutionnels), éprouva-t-elle une opposition presque universelle. Ils étaient dépeints aux habitants par les insermentés comme des païens et des ennemis de Dieu. L'église, là où on les souffrait, restait déserte ; un crèpe funèbre enveloppait la croix, et le presbytère était délaissé. Les enfants mêmes fuyaient à la vue du nouveau curé en criant : c'est le jureur !

« Il ne trouvait, dit Émile Souvestre, personne qui voulut lui parler, lui vendre et le servir. On le fuyait comme un sacrilège et un apostat, et il se trouva de populeuses communes où la messe ne put être célébrée parce que l'intrus ne rencontra pas une maison qui voulut lui fournir le charbon pour l'encensoir et le feu pour allumer les cierges. » - Les révolutionnaires avaient bien décrété un culte : ils ne pouvaient le faire pénétrer dans les consciences. Ils avaient vidé les églises et ne pouvaient les remplir. Ils avaient un clergé, des cathédrales, toute la magnificence extérieure du culte, des cérémonies et pas de fidèles. La foi, qui seule vivifie les religions, ne pouvait être imposée par mesure législative.

 

Retour haut de page

Quant aux insermentés, la déportation décrétée contre eux leur donna une sainteté nouvelle et une invincible puissance : de prêtres ils étaient passés martyrs. Chaque paroisse comptait au moins un de ces proscrits qui, du fond de leurs retraites, exerçaient un empire absolu sur les âmes. On leur amenait de plusieurs lieues et au milieu de la nuit des enfants à baptiser, des mourants à bénir. Chassés des églises, ils dressaient un autel dans quelque clairière perdue au fond des bois, au milieu des champs de genêt et des landes (1), ou quelquefois même sur un ilôt battu par la tempête. « Une voix surgissait tout à coup des ténèbres, proclamait l'introït, l'évangile, la communion : la foule muette frissonnait, s'agenouillait, se relevait pour se prosterner encore. Le grêle tintement de la sonnette du clerc, la silhouette vague de l'officiant qui se dressait au-dessus de l'assistance comme une apparition fantastique ; cette obscurité pleine d'ombres silencieuses, le souffle étouffé de la multitude invisible, ces voix soudaines qui semblaient les clameurs de la nuit, engendraient des émotions surnaturelles. Les fidèles revivaient les mystères des premiers âges : les cœurs s'enfiévraient, les têtes s'exaltaient jusqu'à l'extase : des bruits de miracles se répandaient dans la contrée (2) ».

L'effervescence causée par cette scission religieuse arriva bientôt à son paroxysme. Tout présageait une crise prochaine. Il ne fallait plus qu'un motif décisif pour la faire éclater quand la révolte est dans tous les cœurs, l'occasion ne leur manque jamais.

Deux circonstances se prèsentèrent qui semblaient devoir allumer cet incendie. Le premier fut la catastrophe du 10 août, qui rejeta plusieurs nobles dans leurs terres, et les persécutions dirigées à cette époque contre les prêtres insermentés, et qui amenèrent dans les régions de Bressuire, de la Châtaigneraie, de Palluau, de Challans, des soulèvements partiels qu'on peut considérer comme un premier essai à la guerre civile.

Une nouvelle occasion de révolte vint bientôt s'offrir aux Vendéens, et celle-là semblait devoir être décisive. Le crime du 21 janvier indigna et consterna la Vendée. Toutefois, à cette époque, aucun mouvement n'y éclata. Mais l'exécution de la loi du 23 février 1793 fit, trois mois après, ce que n'avaient fait ni le 10 août, ni le 21 janvier. La grande mesure de la levée de 300.000 hommes, nécessitée par les dangers de la patrie, et exécutée avec enthousiasme dans le reste de la France, fut pour la Vendée l'une des causes déterminantes de l'insurrection. Le recrutement parut aux Vendéens d'autant plus oppressif que jusqu'alors ils en avaient été exempts. Les pères disaient à leurs enfants qu'en se faisant soldats de la République ils allaient combattre contre leur religion, et qu'ils ne pouvaient abandonner leurs prêtres proscrits pour se ranger sous les drapeaux de leurs persécuteurs.

Pour exécuter la levée en masse d'une population si originale et si profondément religieuse, il eut fallu chez les mandataires de la Convention, improvisés hommes d'État en quelque sorte à coups de hache, des notions ethnographiques qui leur manquaient absolument, et qui leur eussent permis peut-être d'amener sans secousse la Vendée autoritaire et autocratique à une évolution pacifique vers les libertés républicaines. Si, au lieu d'ériger le dogme en violence et de décréter la mort ou les arrestations, les chefs du gouvernement eussent pris le parti d'une sage temporisation, et offert aux rebelles amnistie pleine et entière, il est probable, sinon certain, que le premier mouvement de révolte se fut calmé de lui même, car en ce moment l'insurrection n'avait point de cadres.

Ce serait en effet une grave erreur de croire que la Vendée s'est révoltée pour les nobles, et que c'est par eux que le soulèvement a été préparé. Tous les gentilshommes qui devinrent plus tard les principaux chefs de l'armée vivaient alors dans la retraite et l'obscurité. MM. de Lescure et de la Rochejaquelein, très jeunes encore, étaient retirés au château de Clisson, dans la paroisse de Boismé, fort tranquille à cette époque, parce que le curé et te vicaire s'étaient soumis au serment. Démissionnaire de l'armée, Bonchamps était venu chercher le repos et l'oubli dans sa retraite de la Baronnière, et ne songeait point à souffler le feu de la guerre civile, de cette guerre qui, disait-il, ne donne point de gloire. D'Elbée, homme pieux et alors sans ambition, rentré de l'émigration, coulait des jours paisibles dans sa modeste habitation de la Loge. Sapinaud de la Verrie vivait en philosophe dans sa retraite, et Charette, après un court séjour à Coblentz, tenait sa petite cour de galanterie à Fonteclause, près la Garnache. Toute la noblesse était surveillée de près par les administrations, composées en général d'adversaires politiques qui, trop souvent, poursuivaient, dans leur dévouement à la Révolution, moins le triomphe d'une idée que la satisfaction de leurs préjugés et de leurs rancunes. Les gentilshommes vivant dans l'isolement, tout occupés de pourvoir à leur sûreté, ne se connaissaient même pas entre eux. Il n'y eut donc de leur part ni complots, ni secrètes intelligences, ni exhortations à la révolte. La guerre une fois commencée ils la soutinrent et la prolongèrent par leurs talents et par leur courage. Sans la force de leur exemple, elle n'aurait pas continué longtemps, c'est certain, mais elle avait commencé sans eux. Ce ne furent pas les nobles qui allèrent chercher les paysans : ce furent les paysans qui allèrent chercher les nobles dans leurs châteaux, les entraînèrent et les élurent pour chefs.

 

Retour haut de page

 

La question religieuse d'abord et la question militaire ensuite, furent pour ainsi dire les deux seules causes du terrible soulèvement de la Vendée. Elles ont été en peu de mots admirablement résumées dans une partie de la lettre que le 18 février 1785, c'est-à-dire le jour même de la signature du traité de pacification de la Jaunais, le major général de l'armée de Stofflet, Trotouin, écrivait à son chef et à son conseil, pour les engager à accepter les conditions de Charette.

« Les réflexions sages des représentants du peuple m'ont déterminé à faire la paix. Le peuple de Vendée a pris les armes pour deux raisons : La première, sa religion ; on la lui laisse, la seconde, pour s'exempter de tirer à la milice ; on le laisse tranquille dans ses foyers : jamais il ne s'est armé pour son roi (3), le genre de gouvernement lui importe peu, pourvu qu'on ne l'opprime pas, pourvu qu'il puisse s'occuper de ses intérêts (4).

Aux causes que nous venons d'indiquer, causes on le voit, beaucoup plus religieuses que politiques, les mesures violentes opposées par les administrations à la résistance générale, exaspérèrent bientôt un peuple depuis longtemps effervescent et décidèrent le moment de l'explosion. En quelques jours tout fut en armes, sur une superficie de quatre cents lieues carrées.

Alors commença devant l'Europe étonnée cette lutte épique, qui dans l'espace de quatre ans présente plus de 700 combats et 23 batailles rangées, - cette guerre d'extermination et de vengeance, qui, au dire de Chateaubriand et de plusieurs autres historiens, coûta à la République 400.000 hommes de troupes régulières, 700.000 gardes nationaux, 500 pièces de canon et 300.000 fusils (5), cette guerre de fanatisme, ou l'on vit figurer sur les champs de bataille, des femmes, des prêtres, des enfants de douze ans et des vieillards de soixante-quinze ans. - « Bien soutenue et conduite, dit Napoléon dans ses Mémoires, cette insurrection eut détruit quatre républiques ».

 

 

Retour haut de page

(1) Le grand-père de l'auteur lui a souvent raconté qu'il avait plusieurs fois assisté à ces messes célébrées la nuit, non loin de l'ancienne abbaye de Trizay (en Saint-Vincent-Puymaufrais), par M. Desplobains, qui n'avait pas voulu émigrer et qui, pendant la tourmente révolutionnaire, se cachait le plus souvent dans l'ancien prieuré de l'Angle, près Chantonnay, ou dans les caves du château de la Roche-Louherie, habitation du sénateur de Béjarry.

(2) René Blachez.- Bonchamps et l'insurrection vendéenne, page 79.

(3) Bien que la question politique ne soit venue qu'au second plan, il y a évidemment une erreur dans l'appréciation de Trotouin, en ce qui concerne le roi, dont les malheurs avaient touché profondément les Vendéens. Pour eux, le roi n'était pas seulement un prince injustement accusé, il était le symbole vivant de la patrie et de l'honneur; attenter à sa vie était plus qu'un crime ; c'était un sacrilège.

(4) Darmaing, page 344.

(5) Un autre historien s'exprime ainsi : « Du 12 mars 1793 au 19 novembre 1799, 600.000 vendéens ont. pris part à cette lutte de géants, ont livré 700 combats et 17 grandes batailles rangées, capturé 500 pièces de canon, 150.000 fusils et 80.000 prisonniers, qui presque tous furent renvoyés.

 

SOULÈVEMENT DE SAINT-FLORENT-LE-VIEIL

(12 Mars 1793)

 

On sait comment la guerre qui couvait sous la cendre commença. Ce qui se passa à Saint-Florent-le-Vieil donnera l'idée de toute l'insurrection vendéenne, et bientôt, au bruit du canon de cette petite ville, vont s'éveiller toutes les cloches de l'Anjou et de la Haute-Vendée.
C'était le 12 mars 1793 ; les commissaires du district étaient assemblés dans la chapelle des Bénédictins, à la porte de laquelle une couleuvrine chargée à mitraille menaçait les jeunes gens qui refuseraient de venir tirer, en exécution du fameux décret du 15 février 1793, qui rappelait trois cent mille hommes aux frontières (1). Ceux-ci arrivaient par, bandes sous la gueule du canon, avec leurs parents, leurs fiancées et leurs amis ; leurs rangs grossissaient d'heure en heure sur la place du Puit-Billot, mais pas un ne répondait à l'appel de son nom. Les têtes s'échauffèrent ainsi de part et d'autre. Un commissaire (2) s'avance et harangue les récalcitrants avec violence : - Venez tirer ou vous allez mourir ! « Mourons plutôt que de tirer ! s'écrie un jeune gars de Chanzeaux, René Forêt, revenu depuis peu de l'émigration. Un coup de canon part et laboure les rangs des conscrits. Mais déjà tous se sont rués sur la pièce, dispersent et assomment de leurs hâtons les artilleurs et les commissaires. De là ils courent au district, brûlent les papiers, distribuent la caisse, et maîtres ainsi du terrain, célèbrent leur victoire par un feu de joie et des libations (3).

 

 

Retour haut de page

(1) Ce fut seulement le 2 mars 1793 dans la soirée, que le directoire du département de la Vendée reçut par courrier extraordinaire l'expédition officielle des lois militaires des 20 et 24 février.

(2) Tessié du Cluseaux.

(3) Pitre-Chevalier, page 371.

 

CATHELINEAU ENTRE EN SCÈNE

 

Le soir, six d'entre eux, s'imaginant naïvement que tout était fini, rencontrèrent en traversant le bourg de Pin-en-Mauges un bel homme de trente-cinq ans (1), à l'œil vif et pur, à la démarche aisée, à la figure aimable et imposante. Cet homme était Jacques Cathelineau, pauvre marchand colporteur de laine, père de cinq enfants, vénéré du pays entier comme un saint.

 

Cathelineau

 

Au récit que les jeunes gens lui font des événements de la journée, Cathelineau s'anime, se rend compte de l'imprudence commise par les conscrits, et à cet instant, cet homme de génie en sabots, consciencieux et étranger à toute arrière-pensée d'intérêt personnel, cette complète incarnation de la Vendée, devine sa destinée et celle de son pays. Il endosse aussitôt sa veste de bure, excite les jeunes gens à laisser leurs chaumières, leurs familles, leurs bêches, leurs charrues, pour s'atteler aux canons. « Votre combat d'une heure veut une guerre de dix ans. - Ce que vous venez de faire exige une suite », leur dit-il, et il se met à leur tête. Ils sont vingt-sept aujourd'hui (2) : dans trois mois ils seront 100.000 et assiégeront Nantes, sous les ordres de ce même Cathelineau, devenu généralissime.
Le tocsin sonne bientôt de clocher en clocher; à ce signal, tout paysan valide fait sa prière, prend son chapelet et son fusil, ou s'il n'a pas de fusil, sa faux retournée, embrasse sa mère ou sa femme, et court rejoindre ses frères à travers les haies.

 

 

Retour haut de page

(1) Né en 1758.

(2) Voir leurs noms dans Pitre-Chevalier, page 372, et dans Deniau, T. I, page 263.

 

BONCHAMPS ET D'ELBÉE. -
AFFAIRES DE LA JALLAIS ET DE CHEMILLÉ

 

Cathelineau et ses compagnons, augmentant ainsi leurs forces de métairie en métairie, arrivent le 14 mars à la Poitevinière, où ils recrutent encore une douzaine d'hommes parmi lesquels un des amis de Cathelineau : Humeau, qui devait le recevoir dans ses bras lorsqu'il tomba mortellement frappé au siège de Nantes. La veille, une partie du rassemblement de Saint-Florent était allée au château de la Baronnière, offrir le commandement en chef de l'armée chrétienne à Bonchamps (1), tandis qu'au cœur des Mauges, à Beaupréau, d'autres insurgés proclamaient également général le marquis d'Elbée (2). Les insurgés, au chant du Vexilla Regis prodeunt, qui sera désormais comme le bardit de la Vendée militaire, attaquent ensuite le château de la Jallais (14 mars) défendu par les soldats du 84e de ligne et par la garde nationale de Chalonnes, sous les ordres du médecin Bousseau.

Là, ils improvisent la tactique qui leur vaudra tant de victoires. Ils se jettent tous à terre, laissent passer la mitraille sur leur tête, se relèvent, s'élancent comme l'éclair et enlèvent la pièce de six dirigée contre eux. Ils baptisent aussitôt ce premier canon le Missionnaire. Ils envoient Bousseau, leur prisonnier, porter leurs sommations à Chalonnes, et vont eux-mêmes, secondés par les paysans aux ordres de Bonchamps et d'Elbée, surprendre par deux côtés Chemillé, où ils se saisissent de trois nouvelles pièces ainsi que de fusils.

Ces premiers succès exaspèrent le républicanisme des cités. Les administrateurs siègent jour et nuit. Les milices nationales courent aux armes ; les citoyennes déposent des bonnets rouges sur l'autel de la patrie ; mais rien ne peut arrêter le torrent de l'insurrection qui grossit, entraînant avec elle tout le pays de Mauges.

 

 

Retour haut de page

(1) De Bonchamps, né le 10 mai 1760, au château du Crucifix, commune de Juvardeuil. Il fit l'expédition des Indes sous les ordres du célèbre Bailly de Suffren, brisa son épée et quitta la France en 1791, lorsqu'on lui demanda de jurer la Constitution. Mais il ne tarda pas à venir rejoindre sa jeune femme en sa terre de la Baronnière, près Saint-Florent. C'est là que les insurgés le trouvèrent et en firent un chef. Son héroïsme n'eut d'égal que son habileté, et ses soldats, qui l'adoraient, furent toujours les mieux disciplinés et les plus humains de toute l'armée catholique. Il mourut le 18 octobre 1793, au village de La Meilleraye, à la suite du passage de la Loire, d'une blessure reçue la veille à la bataille de Cholet, après avoir sauvé la vie à cinq mille républicains. Son père était seigneur de la terre de la Coudraye, près Sainte-Hermine, qui au moment de son mariage, en 1758, valait 30.000 livres.

(2) D'Elbée, né à Dresde, en Saxe, en 1753, et naturalisé français en 1757, ancien lieutenant de cavalerie du 5e régiment de chevau-légers, servit en France jusqu'au 17 septembre 1783, époque où il démissionna, et vint se fixer au château de la Loge, près Beaupréau, district de Saint-Florent, où il habitait avec sa femme, née d'Hauterive. Fit partie de l'assemblée générale du tiers-état comme l'un des députés de la paroisse de Saint-Martin de Beaupréau. Généralissime de l'armée vendéenne, le 19 juillet 1793, blessé mortellement à la bataille de Cholet, 16 octobre, 1793, et réfugié à Noirmoutier : il y fut fusillé le 9 janvier 1794.

 

ENTRÉE EN SCÈNE DE FORÊT ET DE STOFFLET

 

Traqué à Chanzeaux.par les gendarmes, René Forêt tire sur eux, sonne le tocsin et soulève la paroisse et les environs. A Maulévrier, Stofflet (1) garde-chasse des comtes de Colbert, doué de hautes et sérieuses qualités, mais brutal, voit avec indignation enlever du château de ses maîtres les douze canons offerts, en 1540, au comte de Maulévrier par la République de Gênes. Il appelle et arme douze cents paysans. Tonnelet, autre garde, en réunit cent cinquante, et leurs rangs se grossissent des insurgés de Mauves, chassés par les nationaux de Nantes, des jeunes gens de Maulévrier, d'Yzernay, des Echaubroignes, de Mazières, de la banlieue de Cholet et de tout le Bas-Anjou.

 

 

Retour haut de page

(1) Stofflet Nicolas, né le 3 février 1753, à Barthélemont, près Lunéville, servit d'abord dans la gendarmerie du roi Stanislas, où il gagna l'estime du comte de Colbert, officier supérieur dans le même corps. Celui-ci l'emmena à Maulévrier et lui confia la garde de son château et de sa forêt. - Il occupait donc le modeste emploi de garde-chasse lorsque se produisit le grand soulèvement de la Vendée et de l'Anjou. Général en chef des armées vendéennes, maréchal de camp et chevalier de Saint-Louis, il fut fusillé à Angers en 1796, après avoir pris part à cent cinquante combats. Il fut livré par une trahison, dont le principal complice était le curé de Saint-Laud, d'Angers, l'abbé Bernier. (Stofflet et la Vendée, par Edmond Stofflet, Pont-à-Mousson, 1868, in-8e).

 

PRISE DE CHOLET (15 Mars)

 

Le 15 mars, Stofflet, Tonnelet et Forêt se réunissent à Cathelineau pour attaquer Cholet, défendu par le marquis de Beauveau, procureur syndic, ancienne victime des lettres de cachet. Etrange opposition qui se renouvellera souvent dans cette guerre.

Ainsi, pendant que la Rouérie, qui avait contribué à fonder la république en Amérique se faisait en France le champion de l'autorité et de l'absolutisme, que Beauveau, l'ancien châtelain de la Treille, défendait la cause du peuple, que l'ex-duc de Lauzun, Biron, commandait les armées de la République marchant pour dompter la Vendée, Stofflet et Cathelineau, deux paysans en sabots, combattaient pour la royauté ainsi que nous l'avons déjà fait remarquer.

Stofflet et l'aumônier Barbotin (1) somment la ville de se rendre, promettant, dans ce cas seulement, d'épargner les propriétés.

Pour toute réponse, le marquis de Beauveau sort de la ville à la tête de la garde nationale et engage l'action. Le combat dure cinq heures. Les deux partis déploient même courage, même acharnement. Le commandant de Beauveau est un des premiers blessé mortellement (2) avec une foule de notables, mais, rien ne peut résister aux Vendéens qui, le chapeau bas, la poitrine découverte et les mains jointes (3), s'élancent au devant des balles ennemies. La ville est prise. Dans toutes les rues ou dans les environs, on fait la chasse aux Bleus. On brûle les archives, on épargne la grande majorité des habitants ; néanmoins L'Espinasse, directeur de la poste, fut tué à sa porte ; Ravinel, fabricant, fut tué à coups de sabre et Moricet, négociant, brûlé dans ses magasins avec sa femme et sa sœur. On enferma soigneusement au château cent patriotes suspects, qui seraient morts, comme le jeune Ballard, sans l'intervention des chefs, surtout de Bonchamps (4) et de, d'Elbée, auxquels Cathelineau et Stofflet remirent le commandement (5), après avoir laissé pour gouverneur de la ville conquise un ancien officier, Cesbron d'Argonnes.

 

 

Retour haut de page

(l) Un enfant de Fontenay.

(2) D'un coup de biscaïen qui lui brisa les reins. - Un officier vendéen, Bernier de Saint-Lambert du Lattay, s'empara de son cheval, qu'il surnomma le marquis de Beauveau, et avec lequel il fit toutes les guerres de Vendée.

(3) Guerre des Vendéens et des Chouans, par un officier républicain, T. I, par 75.

(5) Bonchamps, qui fut véritablement le héros de l'insurrection vendéenne, descendait, par les femmes, de Samuel Majou et de Marguerite Desmé, de la paroisse de Sainte-Pexine, deux victimes de la révocation de l'Édit de Nantes (Bonnemer, page 15).

(5) Pitre-Chevalier, page 375. - Chassin donne la date du 14 mars pour la prise de Cholet, à laquelle n'auraient pris part ni Cathelineau, ni Bonchamps, ni d'Elbée, et l'attaque aurait été dirigée par Stofflet. C'est le 16 mars, toujours d'après Chassin (La Préparation à la guerre de Vendée, T. III, page 451, etc.), que d'Elbée apparut aux côtés de Stofflet, qui avait dirigé l'attaque de Cholet, et ce fut le 21 mars, dans la soirée, àSaint-Laurent-de-la-Plaine, que s'opérait la jonction des troupes de d'Elbée et de Stofflet avec celles de Bonchamps. Il n'est pas douteux pour nous que Chassin fait erreur.

 

PRISE DE VIHIERS. - MARIE-JEANNE

 

La conquête de Cholet entraîne la Vendée entière sous les drapeaux de l'insurrection, et de Cholet Cathelineau court à Vihiers (16 mars), repousser les gardes nationales de Saumur. Il leur enlève, près de Coron, le fameux canon donné par Louis XIII au château de Richelieu. Les Vendéens croient distinguer, sur sa riche culasse, une image de la Vierge; ils le baptisent Marie-Jeanne, et ils en font leur palladium (1).

La garde nationale d'Angers est battue à Jallais et à Mont-Jean. Les scènes de Cholet se renouvellent le 21 mars à Chalonnes, défendu par trois mille hommes (2). Le maire, Vial, propose en vain aux patriotes de s'ensevelir sous les ruines de la ville. Le conseil de Maine-et-Loire, épouvanté, demande à la Convention un « tribunal d'abréviation » pour faire tomber les têtes des conspirateurs,

Mais toutes les mesures de rigueur ne font que donner des ailes à l'insurrection qui s'étend comme une traînée de poudre de la Loire à la mer. Le nord, le centre et l'ouest de la Vendée proprement dite où ont lieu, en 1791 et 1792, des soulèvements partiels, prennent les armes en même temps contre le gouvernement républicain ; ce qui tend à démontrer l'existence d'un plan suffisamment concerté.

 

 

Retour haut de page

(1) Le fameux canon est déposé au musée d'artillerie de Versailles.

(2) Le 22 mai, Chalonnes se rendait aux Vendéens sur la sommation signée Barbotin, Stofflet, d'Elbée, Bonchamps et Leclerc.

 

 

 

PREMIÈRES NOUVELLES DE L'INSURRECTION DE 1793 DANS LE DÉPARTEMENT DE LA VENDÉE

 

DISTRICT DE CHALLANS. - CHARETTE CHEF DE L'INSURRECTION

 

Le 11 mars 1793, le district de Challans informe le département (1), que les habitants de Beauvoir se sont soulevés à l'occasion de l'organisation de la garde nationale (2) ; que les communes de Notre-Damede-Monts et de Saint-Urbain sont assemblées, et qu'elles doivent se porter sur Beauvoir et Challans, où un perruquier, Gaston, s'est mis à la tête des paysans, après avoir tué un officier dont il revêt l'uniforme. Mais le chef suprême de l'insurrection est Charette, ancien lieutenant de vaisseau, né en 1763 et qu'on est allé chercher dans son château de Fonteclause (3).

 

Charette

 

Dans la nuit du 8 au 9 mars, le tocsin avait sonné à Légé, Saint-Etienne-du-Bois, Commequiers, et comme Palluau, où le receveur de la régie Saurin avait failli être tué la veille, n'a que quelques défenseurs qui ne peuvent tenir contre 3 ou 4.000 révoltés, on demande des secours aux districts voisins, car à Challans on a pu à peine retenir pour la nuit 60 gardes nationaux de Saint-Gilles.

Le 12, un attroupement est dissipé à Saint-Etienne-du-Bois : plusieurs mutins sont tués, mais leur nombre augmentant on se replie sur Palluau, où l'on reste sur la défensive. Le 44, de nouveaux attroupements se forment à Apremont, à Saint-Jean-de-Monts, à Challans, à Bouin, sous les ordres de Guéry du Clouzis, Desabayes, Guéry-Fortinière, Pajot, Jolly, etc.: ils s'avancent contre Palluau, dont les défenseurs battent en retraite sur les Sables, en laissant plusieurs blessés et trois ou quatre morts. Le 17 mars, Noirmoutier est aux mains des Vendéens. Le 24, Jolly (4) attaque les Sables, pendant que l'île d'Yeu était sommée de se rendre ; ce qui n'eut pas lieu.

 

 

Retour haut de page

(1) Au 12 mars 1793, Martineau était administrateur du directoire du département à Fontenay-le-Peuple, Cavoleau président, et Gougnaud secrétaire général. - Echos du Bocage, tome III, page 404. 

(2) Machecoul fut la première victime de l'insurrection de la Basse-Vendée. Cette ville fut enveloppée et envahie le 10 mars 1793, par-de nombreux attroupements. Il y périt plusieurs patriotes ; les autres furent jetés dans les cachots. Le comité sanguinaire de Machecoul, loin de les protéger, les fit massacrer presque tous. Il n'en restait plus qu'une vingtaine, lorsque les Républicains s'emparèrent de cette ville au mois d'avril suivant. Du rapport de Wielland, qui le premier entra dans Machecoul et qui fut ensuite sacrifié à Noirmoutier, il résulte que l'on égorgea, après leur avoir fait subir d'horribles souffrances, près de quatre cents patriotes de la ville et des environs.

(3) Charette de la Contrie naquit à Touffé, près de Nantes, le 21 avril 1763. Aspirant de marine il refusa, en 1790, le serment à la Révolution. Pendant la journée du 10 août 1792, il essaya vainement de faire de son corps un rempart à la Royauté. « Entouré par la foule qui assiégeait le palais de Louis XVI, il allait être égorgé, lorsqu'un lambeau de chair humaine se rencontre sous sa main. C'était la cuisse mutilée d'un Suisse. Il s'en empare. A l'aide de cet effroyable passeport, il traverse la haie d'assassins qui l'entourent, et il se réfugie chez un cocher de fiacre, où pendant huit jours il reste caché dans un grenier à foin. Il regagne bientôt la Bretagne sous un déguisement. Bientôt il est comme suspect emprisonné à Nantes, et il ne rompt ses fers qu'à la recommandation du général de Marcé. Il rentre alors dans sa modeste retraite de Fonteclause, où dès les premiers jours de mars 1793, les gars de Machecoul et des environs allèrent le chercher. Il refusa deux fois de se mettre à leur tête et les renvoya comme des mutins sans consistance. La troisième fois, 18 mars, ils lui déclarèrent qu'ils le tueraient sur place, s'il n'acceptait enfin le commandement. Charette les regarda en face, devina tout ce qu'il ferait de tels hommes, et leur dit: « Je serai votre chef, mais je le serai sérieusement. Souvenez-vous que c'est vous qui l'avez voulu, que vous me suivrez partout où il me plaira, que vous m'obéirez quoi que je vous commande, et que le premier qui élèvera la voix contre la mienne sera fusillé à l'instant ».

Tout le caractère et toute la destinée de Charette que nous allons raconter tout en long se révélaient dans cette harangue. Ses soldats lui accordèrent le serment qu'il exigeait, et le lendemain, l'armée de Charette faisait trembler le Marais et la Plaine.

(4) Jolly, ancien sergent, exerçant 20 métiers, notamment celui de chirurgien à La Chapelle-Hermier. Un des plus intrépides lieutenants de Charette, tué près de Saint-Laurent-sur-Sèvre, peu de temps après le meurtre d'un de ses fils.

 

DISTRICTS DE MONTAIGU ET DE LA ROCHE

 

Dans la nuit du 9 au 10 mars une centaine de jeunes gens des environs des Quatre-Chemins et de Saint-Fulgent s'étaient assemblés au Moulin-Dria, pour concerter dans un plan commun leur résolution bien arrêtée de ne pas se présenter au tirage prochain, et le 11 se joignirent aux insurgés qui, le jour de la foire de l'Oie, enlevèrent le poste républicain à l'aide d'un stratagème. Le 11, la région de Veillevigne est en insurrection. Dans la nuit du 12 au 13 mars toutes les communes du district de Montaigu se soulèvent sous la direction d'un paysan, François Cougnaud, de Saint-André-Goule-d'Oie et de La Roche-Saint-André, maire de Montaigu. Des patriotes y sont massacrés, notamment Neau, curé constitutionnel de Bouaine, Blay, de Vieillevigne, Cholet, contrôleur, Jagueneau, des Brouzils et Thiériot, docteur-médecin. D'autres auraient eu le même sort sans la généreuse intervention de Mme de Lécorce, fille de l'amiral Duchaffault et de beaucoup d'autres personnes généreuses. Une autre victime fut le président du Directoire, Beaumier, curé constitutionnel de Mormaison, dont on retrouva le cadavre sur le bord de l'Issoire. Le président du tribunal de district, Esprit Bousseau, blessé, périt un ou deux jours plus tard au passage d'un ruisseau, dans la commune de Saint-Georges-de-Montaigu.

Les paysans des environs de la Roche-sur-Yon qui, dès le 1er mars avaient fait sonner le tocsin, s'arment sous les ordres de Bulkeley, seigneur de La Brossardière en Saint-André-d'Ornay, et le 15 mars ce nouveau chef, avec 300 hommes se rend maître du chef-lieu de district dont les administrateurs se réfugient à Beaulieu, près de Mareuil.

Dès le 3 mars des attroupements séditieux avaient eu lieu dans les environs de la Mothe-Achard, où Biret, procureur syndic des Sables, commandait la garde nationale qui, d'après une lettre écrite par lui (1) aurait fait trente prisonniers.

 

 

Retour haut de page

(1) Original - collection Fillon - communiqué par Mme Charier-Fillon.

 

FORMATION DU NOYAU DE L'ARMÉE CATHOLIQUE ROYALE DU CENTRE

 

Le 13, le tocsin sonne à Saint-Fulgent. Trois mille brigands s'en emparent (1), ayant à leur tête de Royrand (2), lieutenant-colonel en retraite, l'ancien garde du corps Sapinaud de la Verrie (3), son parent, Sapinaud de la Rairie (4), les trois frères de Béjarry (5), de Rangot, de Baudry d'Asson, etc., que ces révoltés ont contraint de marcher à leur tête dès le 10 mars, car redisons-le pour n'y plus revenir, presque tous les nobles refusèrent du premier abord de s'associer à cette révolte qu'ils regardaient comme une échauffourée sans conséquence. Ce fut par dévouement sinon par force qu'ils cédèrent à cette voix du peuple. Mais tous étaient dominés par la grande et populaire figure de Cathelineau, entouré de ses quarante-deux parents (6).

Après s'être emparé de Saint-Fulgent, les révoltés chassent le détachement de la garde nationale de Fontenay (7), qui s'approchait du bourg et coupe le pont. Rouillé, commissaire du département, qui accompagnait ce détachement, rétrograde sur l'Oie, où il rejoint les premiers fuyards. Le soir du 13 il est à Saint-Hermand, d'où il écrit à ses collègues pour avoir des secours.


Saint-Hermand, 13 mars 1793 ; 7 heures 3/4 du soir.

Citoyens et Collègues,

 

Je viens de me replier avec le reste de mes forces et les secours qui nous arrivent à chaque instant à Saint-Hermand, où je vais établir le point de réunion. J'expédie de suite un courrier à La Rochelle et à Rochefort pour avoir trois à quatre mille hommes, de l'artillerie, de la cavalerie et des munitions, l'ennemi doit se porter cette nuit à Chantonnai pour intercepter toute communication, en coupant le pont Charron ; on compte près de vingt mille hommes depuis Aigrefeuille jusqu'à l'Oye, ce nombre augmente à chaque instant ; nous avons à combattre des chefs expérimentés, des hommes intrépides, du canon et de la cavalerie. Réclamez les secours de Poitiers et route, envoyez-moi de suite de la cavalerie et une nombreuse artillerie, des madriers pour jeter des ponts provisoires, des fonds et un commissaire pris dans votre sein, pour partager mes travaux. Je crains que l'ennemi ne se soit emparé de ma correspondance et qu'il ne se porte sur La Roche-sur-Yon.

 

Signé : ROUILLÉ

 

P. S. Faites marcher cette nuit tous les secours que vous pourrez m'envoyer, et remettez au collègue que vous m'adjoindrez le cachet du département.

JOUSSEMET (8)

Pour copie conforme, Signé : COUGNAUD

 

 

Retour haut de page

(1) Fillon, dans les pièces contre-révolutionnaires, prétend que Saint-Fulgent fut livré par le procureur même de la commune Gautier, et par l'aubergiste Lusson. (Chassin, T.IIIi, page 325). Il paraît que Lappara, président de la société populaire de Fontenay, aurait été fait prisonnier par les rebelles, emprisonné à Saint-Fulgent et quelques semaines plus tard massacré par les chefs insurgés.

(2) De Royrand, ancien lieutenant-colonel du régiment de Navare, garda son commandement à travers la campagne d'outre-Loire jusqu'au siège de Granville, et mourut le 5 décembre 1793, à Beaugé, des suites de blessures reçues à la bataille d'Entrammes.

(3) Sapinaud de la Verrie, né en 1736, dans la commune de la Verrie, avait, dit la Boutetière, « salué avec joie l'aurore brillante de 1789 et était imbu des idées du XVIIIe siècle ». Ce qui expliquerait qu'entraîné dans le mouvement insurrectionel, il ne croyait pas à son succès. - Fut le 25 juillet 1793 tué près du Pont Charron, par le général Tuncq.

(4) Sapinaud de la Rairie, né le 3 décembre 1760 au château du Sourdy, commune de la Gaubretière, lieutenant au régiment de Foix en 1789, prit part à toute la guerre de la Vendée jusqu'à la paix de la Jaunaie, qu'il signa avec Charette comme chef de l'armée du centre. Il reprit les armes en 1795 et 1814, - mourut le 20 avril 1829 lieutenant général, cordon rouge et chevalier de la légion d'honneur, comte et pair de France. Il vivait au Boisis, près de la Gaubretière, lorsque les insurgés vinrent l'arracher de la table de famille, et l'emmenèrent presque de force à sa maison du Sourdy, où il quitta ses habits pour se déguiser en paysan.

(5) Amédée de Béjarry, l'un des fils du seigneur de Saint-Vincent-du-Fort-du-Lay, né à Luçon en 1769, mort en 1844, était destiné à l'état ecclésiastique et avait fait ses études au séminaire de Saint-Sulpice. Il forma avec de Verteuil les premières bandes du rassemblement de l'Oie. Après avoir pris part aux diverses batailles autour de Luçon, il passa la Loire avec Royrand, et se cacha en Bretagne après la déroute du Mans, où il avait été mis hors de combat. Il prit une très grande part à la pacification de la Jaunaie, ce qui le fit accuser de trahison par Stofflet. Il alla à Paris avec Scépeaux, auprès du Comité du salut public, sous prétexte de s'entendre sur le maintien de la paix, en réalité (d'après la Fontenelle de Vaudoré), pour entrer en relations avec les agents des Princes et tenter l'enlèvement de Louis XVII. Accompagné de son frère Auguste (né en 1767, mort en 1824), il reprit les armes sous Charette et Stofflet : abandonné de ses troupes, il se rendit et resta en prison à Fontenay jusqu'au Consulat. Les de Béjarry furent encore mélés au mouvement de 1814-1815.

(6) Sur ces quarante-deux, trente-six périrent dans les guerres de l'Ouest. Perrine Godin, cousine germaine de Cathelineau, fut tuée les armes à la main le 16 octobre 1793, à la bataille de Cholet.

(7) Envoyée contre les rebelles à la suite d'un Réquisitoire du département de la Vendée, en date du 13 mars 1793, signé Cavoleau, président, et Cougnaud, secrétaire général.

(8) Original, collection Fillon - communiqué par Mme Charier-Fillon.

 

LES MARCHES DE POITOU ET DE BRETAGNE

 

Le 12, les paysans des paroisses de Boussay, de la Bruffière, Cugand, Gétigné et autres, composant les Marches communes de Bretagne et du Poitou, après avoir tué à l'Echasserie le propriétaire Servanteau, inspecteur des gardes nationales de Cholet, se présentent menaçants devant Tiffauges, défendu par une poignée d'hommes mis à la disposition de la ville par Mortagne (1). Ces hommes, au nombre de vingt-trois, devaient être fusillés le surlendemain avec leur commandant Douhet à L'angle sud-est du parc de la Barillère, près Montaigu.

 

Le vieux Château de Tiffauges. (Vue prise au sud) - D'après un cliché de M. Arsolier

 

 

Retour haut de page

(1) Quelques jours après ces événements (6 avril, 1793), d'Elbée, Bérard et Sapinaud chargeaient Guy Guerry de Tiffauges de faire toutes démarches pour obtenir de l'Espagne ou de l'Angleterre la poudre qui leur manquait. On ne saurait trop blâmer cet appel à l'étranger.

 

OCCUPATION DES HERBIERS ET DE MORTAGNE

CAMP DES QUATRE-CHEMINS DE L'OIE

 

Le 14 mars, le noyau de l'armée du Centre, renforcé des paysans de la Verrie, Saint-Martin-Lars, la Gaubretière, etc., aux ordres de Sapinaud, occupe les Herbiers et Mortagne et s'avance vers Chantonnay, après avoir établi aux Quatre-Chemins de l'Oie, son quartier général, « un rassemblement permanent, une sorte de place de guerre » empêchant l'entrée au cœur de la Vendée des forces réunies à Fontenay, et de celles attendues de La Rochelle.

Le même jour les administrateurs du district de la Roche-sur-Yon, entourés par les bandes menaçantes de Chouppes et de Bulkeley se retiraient avec les papiers et la caisse à Beaulieu, près Mareuil.

 

BATAILLE, PRISE ET REPRISE DE CHANTONNAY
(15 et 17 Mars 1793)

 

Le 15 mars au matin, une partie de l'armée royale attaqua Chantonnay. Les patriotes réussirent d'abord à repousser les brigands dans les bois, mais ceux-ci revenant en plus grand nombre, il fallut évacuer la place et c'est à grand'peine qu'on put sauver la pièce de canon envoyée de Fontenay.

Le lendemain, le général de Marcé, qui bivouaquait au Pont-Charron, avait également subi une défaite, mais il allait reprendre l'offensive (1).

Le 17 mars au matin, le général de Marcé, à la tête des gardes nationales des districts de Rochefort, de La Rochelle, de quelques soldats du 60e régiment d'infanterie et de deux pièces de canon, attaqua entre le Pont-Charron et Chantonnay la section des rebelles qui gardait ce dernier poste sous le commandement de Sapinaud de la Verrie.

Après une énergique résistance les Vendéens furent culbutés, sous les yeux du commissaire national Niou, laissant sur le champ de bataille 40 morts, dont un prêtre, et trois petits canons pris aux Herbiers. Il n'y eut de blessés du côté des républicains que le lieutenant-colonel Laborie, le capitaine de gendarmerie Garnier et un cavalier (2).

 

 

Retour haut de page

(1) Les généraux de Verteuil et de Marcé avaient été par Bouron, procureur général syndic de la Vendée, requis, le 14 mars, de marcher contre les rebelles.

(2) Chassin. - La Préparation de la guerre de Vendée.

 

BATAILLE DE SAINT-VINCENT-STERLANGES

DÉROUTE DE GRAVEREAU (19 Mars 1793)

 

Enhardi par ce succès, le Général de Marcé résolut de forcer le camp des Quatre-Chemins de l'Oie. Le 19 mars, vers midi, l'armée républicaine, comprenant 3.500 hommes d'infanterie, 100 hommes de cavalerie et 8 pièces de canon, se dirigea de Chantonnay vers Saint-Vincent-Sterlanges. Après avoir fait rétablir par l'avant-garde le pont de Gravereau, détruit par les Vendéens les patriotes franchirent le Petit-Lay. A deux heures, l'armée ayant pris position sur le plateau de Gravereau se vit entourée par de nombreux partisans vendéens.

Le général de Marcé donna aussitôt le signal de l'attaque ; mais le canon avait à peine commencé à tirer que Niou, trompé par la Marseillaise des Vendéens, crut que la troupe qui était en face l'armée républicaine n'était autre que la légion nantaise qui venait se réunir à ses frères d'armes : le feu cessa malgré les observations du général. Ce malheureux conflit entre le pouvoir civil et le pouvoir militaire avait retardé de deux heures la marche des opérations, et permis aux Vendéens de porter à leur gauche et à leur droite des troupes cachées par les haies. En vain les chasseurs de Niort font des prodiges de valeur, en vain l'artillerie dirige ses engins meurtriers sur le gros de l'armée des rebelles, en vain le général de Marcé, entouré de ses deux fils, encourage de la voix, du geste et de l'exemple ceux qui l'entourent ; les Vendéens sont les maîtres du terrain. Une panique s'empare des troupes républicaines qui fuient épouvantées jusqu'à Sainte-Hermine. Un homme seul, Boulard, commandant en second, conserve le sang-froid pendant que les commissaires Niou, Auguis et Carra délibèrent au lieu d'agir. A chaque instant on croit voir les brigands, on croit entendre leurs hurlements. On part, on prend la route de Marans, on entre à La Rochelle. On abandonne par cette manœuvre 20 lieues de terrain. On laisse Fontenay, Luçon, Niort, Marans à la merci des brigands. Il fallait une victime : l'infortuné de Marcé fut destitué, emprisonné et condamné plus tard à la peine de mort par jugement du tribunal révolutionnaire en date du 28 janvier 1794 (1).

 

 

Retour haut de page

(1) La défaite de Saint-Vincent ou du Pont de Gravereau eut lieu le même jour que la trahison de Dumouriez à Nerwinde.

 

AUTRES SOULÈVEMENTS

 

Avec la nouvelle de la déroute de Gravereau arrivait au chef lieu du département l'annonce d'autres insurrections. La Châtaigneraie, Bressuire, Parthenay, Thouars, étaient menacés par les brigands des environs soulevés. C'est en vain que les communes patriotes du marais de Luçon demandaient des armes pour lutter contre l'insurrection (1) ; le désarroi était partout, et l'envoi à Paris de Séverin Pervinquière et de Mercier du Rocher, pour demander des secours à la Convention fut décidé (2).

 

(1) Tous les bourgs du marais envoyaient des contingents, et le maire de Saint-Michel-en-l'Herm, Brechoteau, informait les administrateurs du département que des corsaires étaient en vue des côtes de l'Aiguillon-sur-Mer, - que quatre hommes, descendus d'un navire en rade de l'Aiguillon, s'étant rendus au bourg avaient pris des informations sur l'état des esprits et des richesse du pays, - qu'ils avaient ensuite visité la côte depuis les vignes jusqu'à la pointe pour voir s'il y avait des canons. Le même magistrat demandait du canon et faisait connaître que les habitants de l'Aiguillon, étaient sans armes et peu nombreux, et qu'obligés de monter la garde toute la nuit, ils n'avaient pu envoyer que quatre des leurs à Saint-Hermand. (Extrait de Chassin, La Vendée patriote).

(2) Ils arrivèrent à Paris le 23 mars, avec le délégué des Deux-Sèvres, Morisser (Voir le compte-rendu dans Chassin.) - La préparation de la guerre de Vendée, T. III, page 517, et La Correspondance des chefs, 525 à 538.

 

REVERS ET SUCCÈS DE CHARETTE. - TENTATIVES INFRUCTUEUSES CONTRE LES SABLES-D'OLONNE
(24 et 29 mars 1793)

 

Dans les marais de Machecoul, de Challans, de Beauvoir, de Saint-Jean-de-Monts, dans la région de légé, Palluau et Vieillevigne, Charette et ses lieutenants luttaient avec moins d'avantage contre l'armée républicaine. Si Savin avait écrasé à Palluau les républicains sortis des Sables, ses collègues Jolly et de la Sécherie, aidés par Chouppes et Bulkeley avaient complètement échoué dans deux tentatives faites contre cette ville, les 24 et 29 mars (Dimanche des Rameaux et Vendredi Saint). Charette lui-même faisait deux tentatives inutiles, l'une sur Challans, l'autre sur Saint-Gervais et perdit Machecoul (1), son quartier général, qui fut occupé par le général républicain Beysser. Malgré ces revers, Charette n'était point abattu et nous le verrons bientôt prendre sa revanche d'une manière éclatante.

 

 

Retour haut de page

(1) Tristement célèbre par les atrocités qu'y commirent les Vendéens sous les ordres de Souchu, et qui se renouvelèrent à Légé, à Montaigu, aux portes de Paimbœuf et surtout à Pornic, envahi par les bandes de la Roche-Saint-André et de l'ignoble Souchu (Pitre-Chevalier, page 392). Un écrivain de nos jours, Alfred Lallié (Le district de Machecoul 1788-1793) a consacré des pages remarquables pour prouver que ce sont les massacres de Machecoul qui ont eu les premiers torts : nous regrettons de ne pouvoir complètement accepter le système de l'honorable écrivain, bien que nous reconnaissons volontiers que tous les torts ne furent pas du côté des Vendéens.

 

PROGRÈS DE L'INSURRECTION

 

Cependant ces revers partiels ne pouvaient compenser les conquêtes de l'insurrection ni suspendre ses rapides progrès. Elle s'étendait dans le marais, depuis les environs de Nantes jusqu'aux Sables, et dans l'Anjou et le Poitou jusqu'aux environs de Vihiers et de Parthenay. Elle avait rassemblé plus de sept cents communes sous ses drapeaux, et tout le territoire de la Vendée, à l'exception du district de Bressuire était en son pouvoir.

 

DÉCRET DE MISE HORS LA LOI

(19 Mars 1793)

 

La Convention qui, jusque-là, avait ignoré la véritable situation de la Vendée et s'obstinait à ne voir dans cette insurrection qu'un événement sans importance, alors qu'elle luttait contre l'Europe entière, lançait le 19 mars un décret de mise hors la loi contre tous les habitants qui avaient pris ou prendraient un signe de rébellion. Cette mesure extrême surexcita les esprits et n'eut d'autre effet que de fortifier la révolte.


SUCCÈS DU GÉNÉRAL RÉPUBLICAIN BOULARD

PRISE DE CHALLANS, SAINT-GERVAIS, BEAUVOIR, NOIRMOUTIER ET MACHECOUL (7, 12, 14, 29 Avril)

 

Dans les premiers jours d'avril, le lieutenant-colonel du 60e régiment, Boulard (1), nommé général aux lieu et place du malheureux de Marcé, reçut, l'ordre de former une colonne et de pénétrer dans la Basse-Vendée en suivant la côte. Le 7 avril, Boulard, parti des Sables à la tête de 3.500 hommes d'infanterie et de 200 cavaliers, battait le 8 les Vendéens à la Grassière près la Mothe-Achard. Le 9 il était à Saint-Gilles, où trois frégates et trois corvettes républicaines vinrent mouiller. Poursuivant sa marche vers Noirmoutier il s'empare le 13 avril de Challans ; le 14 il prend possession de Beauvoir et de Saint-Gervais, où huit mille Vendéens l'attaquent le lendemain avec impétuosité mai en vain. Le 15, la division Esprit Baudry, qui était allée reconnaître la route de Noirmoutier est entourée par 3.000 hommes commandés par Charette et Gaston. Les royalistes, vivement canonnés sont mis en déroute et se retirent vers Palluau, laissant sur le champ de bataille Gaston, le mystérieux perruquier de Saint-Christophe-du-Ligneron. Vainqueur encore à Port-Saint-Père, à Machecoul (25 avril), à Bourg-Neuf, à Aizenay (29 avril), il avait reçu le 29 avril la soumission de Noirmoutier, où le 27 avril l'amiral Joyeuse avait opéré une descente.

 

(1) Né à Paris le 25 novembre 1741.

 

SUCCÈS DE CHARETTE A LÉGÉ, SAINTE-PAZANNE, SAINT-COLOMBIN, MACHECOUL (30 Avril 6 Mai). - POSITION CRITIQUE DES ARMÉES RÉPUBLICAINES DANS LA BASSE-VENDÉE

 

Charette avait fait sa retraite sur Légé, abandonné d'un grand nombre des siens ; mais dans ce moment d'adversité il déploya toute l'énergie de son caractère. Tandis qu'on le croit sans ressources, il met complètement en déroute le 30 avril l'adjudant général Bois-Guyon, qui était venu l'attaquer imprudemment à Légé et lui prend ses munitions et son artillerie. Poursuivant ses succès il bat les républicains à Sainte-Pazanne, à Saint-Colombin, où il écrase le 6 mai 1.200 républicains, et à Machecoul, où l'ancien régiment de Lamark passe aux Vendéens avec armes et bagages. Le 17 mai les seuls postes de la Basse Vendée occupés par les républicains étaient le Port-Saint-Père, La Mothe-Achard, Challans, Saint-Gilles et la ligne des Sables à Luçon (1).

 

 

Retour haut de page

 

(1) Mareuil avait été le 3 mai enlevé aux troupes de Saint-Pal et Chouppes, qui en avaient pris possession le 28 avril. Le 10 mai, le district de la Roche-sur-Yon se rendit tenir ses séances à Mareuil.

 

 

 

Histoire de Vendée
Chapitre Précédent Table des matières Chapitre Suivant
Page d'accueil - Organisation d'activités et de séjours - Photothèque - - Patrimoine Naturel - - Visites de Monuments - Produits Régionaux - - Loisirs - Sports - Hébergement - Contactez-nous - - Infos éditeur